La Revue Du Béophile n°5 : Southpaw, Honey I Shrunk The Kids, House Of Sand And Fog

Horner au grand !

Revue Beophile 5 1Southpaw / James Horner (53 min.)

Pour nombre de critiques, Southpaw marque un tournant dans la carrière de James Horner, une sorte de renaissance musicale que l’avenir ne nous confirmera malheureusement pas. C’est oublier cependant que le bonhomme a, par le passé, déjà rompu son lyrisme romantique habituel pour pénétrer des lieux plus abstraits : l’inquisitrice cité bénédictine de The Name Of The Rose lui avait ainsi ouvert les portes d’un design sonore moins académique, au même titre que quelques-uns des thrillers dont il a eu la charge au cours des années 90 et 2000 (Ransom, Flightplan, The Forgotten). Ainsi, avec cette pénultième création (avant The 33, dont la sortie est prévue pour la fin de cette année), Horner revient à des couleurs plus inhabituelles, contraint par un budget qui ne lui permettait pas de réveiller les sanglots longs de ses violons. Néanmoins, c’est toujours avec passion qu’il nous offre ici un enchainement de pièces rogues et électriques, au suspens chauffé à blanc, dont les plaies émotionnelles qu’elle tente d’ouvrir en nous se gorge de tristesse lorsque déboule sur le ring une déchirante mélancolie jouée au piano (comme en témoigne le magnifique A More Normal Life). En assurant de cette manière l’enregistrement du score sur ses propres deniers, Horner hurle à nos oreilles sa rage de vivre son art sur grand écran, lui qui avait pris ses distances, plus ou moins volontairement, avec la politique des grands studios américains pendant près de trois ans. (4.5/5)

Revue Beophile 5 2Honey, I Shrunk The Kids / James Horner (52 min.)

En 1989, suite à ses efforts sur les films d’animation An American Tail et Land Before Time, et fort de son succès dans le registre de l’aventure et de la science-fiction, James Horner est attaché à la musique de Honey I Shrunk The Kids, une comédie fantastique produite par Disney. Un projet qui lui permet de collaborer avec le réalisateur Joe Johnston, rencontré dans le cadre de la production de Batteries Not Included (Miracle Sur La 8ème Rue en français) et qu’il suivra par la suite fidèlement sur The Rocketeer, The Pagemaster et Jumanji. Pour cette grande aventure miniature avant tout destiné au jeune public, le compositeur fait le choix de fêler un peu plus le bocal du savant fou Wayne Szalinski en combinant, dans son laboratoire musical, saxophone, harmonica et une flopée d’idiophones (crécelle, xylophone). Créant une dynamique musicale proche du cartoon, Horner donne ainsi à entendre une de ses partitions les plus récréatives et les plus fantasques, cherchant d’abord à amuser l’auditeur, mais également à le faire voyager par delà la palissade de ce modeste jardin, les volutes équatoriales de la flute de pan venant envelopper d’un ravissant exotisme ce trek bocager qui ne manque pas d’ampleur lorsque plane au dessus des héros l’ombre menaçante de l’orgue. Une agréable sucrerie musicale. (4/5)

Revue Beophile 5 3House Of Sand And Fog / James Horner (70 min.)

Au cours des années 2000, les apparitions de James Horner sur la scène cinématographique se font plus confidentielles, son écriture symphonique n’étant visiblement plus en harmonie avec les exigences esthétiques des grands studios américains. Néanmoins, il peut encore compter sur la fidélité de certains grands cinéastes (Jean Jacques Annaud, Ron Howard, Martin Campbell, Wolfgang Petersen) et trouve, au sein du circuit indépendant, matière à étoffer sa plume. House Of Sand And Fog réalisé par Vadim Perelman lui permet ainsi d’arpenter d’autres rivages moins opulents mais en rien néfaste pour son talent. Il trace sur le sable de ce drame une musique aux vibrations intimes et délicates, peignant un paysage côtier qui se fissure sous la pression d’une ambiance à la clarté sépulcrale dont la progression, frappée d’un choeur fragile et par une onde de cordes, traduit à merveille le désir des personnages de construire un avenir et cette rancœur conduisant leurs âmes vers le naufrage. Une magnifique perle noire. (4.5/5)