[Critique] – Floride

Par Pulpmovies @Pulpmovies

Réalisé par : Philippe Le Guay
Avec :
Jean Rochefort, Sandrine Kiberlain, Anamaria Marinca
Sortie :
12 août 2015

Durée: 1h50
Budget:
Distributeur :
Gaumont Distribution

3D: Oui – non


Synopsis :
 
À 80 ans, Claude Lherminier n’a rien perdu de sa prestance. Mais il lui arrive de plus en plus souvent d’avoir des oublis, des accès de confusion. Un état qu’il se refuse obstinément à admettre. Carole, sa fille aînée, mène un combat de tous les instants pour qu’il ne soit pas livré à lui-même. Sur un coup de tête, Claude décide de s’envoler pour la Floride. Qu’y a-t-il derrière ce voyage si soudain ?

Notre avis :

Il n’y a pas de surprise à voir Philippe Le Guay réaliser l’adaptation cinématographique de la pièce du dramaturge Florian Zeller, Le Père. Habitué des personnages aux blessures profondes ainsi qu’à l’orgueil mal placé, c’est avec facilité qu’il a conçu Floride.

Dans son nouveau film, Philippe Le Guay troque son acteur fétiche Fabrice Luchini au profit de Jean Rochefort. Homme de grande éloquence contre homme de grande éloquence, accompagné de Sandrine Kiberlain, qui a déjà accompagné le cinéaste  dans Les femmes du 6ème étage, la nouvelle « bande à Le Guay » semble parfaitement à la hauteur de ses deux derniers longs métrages. Pourtant, l’alchimie entre les deux acteurs ne se crée pas spontanément. Et c’est dès ce premier point que le film est décevant. Le réalisateur endosse la casquette de tuteur et accompagne le spectateur, lui mâche le travail avec des plans insistants, où la facticité se ressent à chaque  bord de cadre, et des champ-contrechamp père / fille des plus classiques ; il presse sur le spectateur en vue de faire monter l’émotion qu’il n’arrive pas à créer naturellement dans le cadre.

Le film est ce que certaines critiques appellent «  un drame de l’oubli ». Certes encore, on reste loin de Richard Glatzer et du bouleversant Still Alice. Mais Jean Rochefort est tout aussi émouvant que Julianne Moore, voire plus attachant. S’il s’agit d’examiner comment cette maladie déteint sur le quotidien, le réalisateur parvient avec brio  à ne jamais prononcer le mot si terrifiant, Alzheimer. Comme à son habitude, le cinéaste capte l’altérité, notamment par le personnage de Thomas, interprété par Laurent Lucas, qui ne fait guère preuve de patience à l’égard de Claude.

Il fait le pari du premier degré par ce personnage, non sans aspérité, de Claude, évitant toute prise en otage émotionnelle du spectateur. Cependant, le film avance masqué, le mélange drame/ comédie ne prend pas, et reste plat. . En voulant éviter le sentimentalisme, le réalisateur ne rend possible  aucune frivolité des sentiments. Par un montage alterné, pas si bien structuré, Le Guay tente de créer l’effet de surprise en nous plongeant dans la folie de Claude, mais les plans finaux restent vides. Un dernier coup d’œil de Sandrine Kiberlain sur la pension où elle a enfermé son père, on essaye de rajouter un sou dans la machine à pleurs du spectateur, mais cela ne fonctionne pas. La prestation de Rochefort est, à elle seule, plus vive que toute l’émotion que le film veut nous asséner. On se sent finalement gêné par les banalités dessinées à gros traits par le réalisateur face à la légèreté de jeu de Rochefort qui, selon les mots du réalisateur, « transforme tout par sa poésie et sa truculence. » .

Après un peu plus de deux ans, Philippe Le Guay est de retour avec Floride, nous rappelant qu’il sait toujours aussi bien diriger les hommes au bagou extraordinaire.

Critique rédigée par Marion Dupont.

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