Mu Zan E (I spit on your snuff !)

Par Olivier Walmacq

Genre: gore, trash, harcore (interdit aux - 18 ans)
Année: 1999
Durée: 1h05

L'histoire : Une journaliste enquête sur la mystérieuse disparition d'une actrice porno. Après avoir interrogé plusieurs témoins, l'un d'entre eux lui remet une cassette contenant un véritable snuff movie. Au fil de ses investigations et aidée par son équipe, elle remontera la filière et intégrera les milieux underground au point d'assister à des tournages interdits. Mais elle va payer très cher son incursion dans un monde secret et interdit. 

La critique :

Aujourd'hui, je vous propose de faire la connaissance de Mu Zan E. Du pur hardcore nippon propre à déstabiliser l'imaginaire des plus endurcis. Mais tout d'abord, que sont les muzan-e ? Et bien, il s'agit d'estampes représentant des viols, supplices et autres actes de torture. Ces gravures réalisées sur bois ou sur métal appartiennent depuis la nuit des temps à la culture du pays du soleil levant. Il est à noter qu'elles ont grandement influencé les mangas actuels.
Le réalisateur Daisuke Yamanouchi reprend à son compte le pan de cette culture pour nous proposer un film bien glauque de derrière les fagots. Pas de doute, question trash Mu Zan E envoie méchamment le matos.  Attention spoilers ! Une journaliste enquête sur les milieux de la pornographie et la mystérieuse disparition d'une actrice.

Face caméra, elle propose aux téléspectateurs de suivre son reportage. Elle commence ses recherches en visitant les sex shops puis elle est amenée à rencontrer plusieurs témoins, acteurs ou producteurs, de cette industrie bien particulière. Comme dans un vrai reportage, le visage des intervenants est souvent flouté ou plongé dans l'obscurité, le ton est sur dramatisé et les images sont filmées caméra à l'épaule.
Le récit de la journaliste est fréquemment interrompu par des images hardcore, à la faveur des cassettes qu'elles regarde et qu'elle fait partager aux spectateurs. Une première étape est franchie lorsqu'elle assiste à un tournage terriblement choquant où une femme est humiliée par deux hommes qui la force à déguster son tampon hygiénique encore sanguinolent. 
Au fur et à mesure de ses investigations, elle est contactée par un témoin anonyme qui lui fait remettre une vhs. Lorsqu'elle la visionne, la journaliste constate avec effroi qu'il ne s'agit plus de pornographie mais de scènes où les tortures infligées sont bel et bien réelles. Dans sa quête de sensationnalisme, la journaliste et son équipe remontent peu à peu la filière, sortent de la ville et arrivent devant une maison isolée en pleine forêt. A peine arrivée, la journaliste est agressée par des hommes masqués qui la ligotent et la baillonnent. Elle se retrouvera à son tour torturée puis tuée à coup de cutter tandis que son équipe semblait s'être raliée aux tortionnaires. 
Déjà coupable des débordements outranciers du dyptique Red Room, Yamanouchi enfonce le clou avec ce film d'une rare barbarie qu'est Mu Zan E.
Sous couvert d'enquête journalistique, le réalisateur nous balance tout de même quelques scènes à la limite du soutenable: arrachage de téton avec les dents, excision au cutter avec gavage forcé du clitoris, broutage de minou avec recrachage de sang menstruel, éviscération d'organes génitaux etc. 


La violence de Mu Zan E est avant tout une violence sexuelle, ce qui compte tenu de la thématique de l'oeuvre est somme toute assez logique. Il est dommage que nous soyons privés de sous titres car le film est assez bavard. A noter aussi pas mal de temps morts entre deux scènes chocs. Le manque évident de moyens (qui ont tous dû passer dans les effets spéciaux) se fait également sentir lors d'une fin conclue un peu à la hâte. Un fin curieuse d'ailleurs qui voit la journaliste, alors qu'elle se retrouve atrocement torturée, obligée de fumer une cigarette tout en "discutant" avec ses bourreaux. 
Je soupçonne le réalisateur d'avoir voulu intégrer une note (un peu) légère pour dédramatiser l'ambiance glauquissime de la scène et du film en général. Celui ci n'est pas pour autant dénué de qualités et Yamanouchi se révèle être même assez bon derrière la caméra.

Le postulat de départ, avec un documentaire en filigrane, était intéressant mais le côté répétitif des interventions de la journaliste devient vite lassant. L'histoire aurait mérité un meilleur traitement et la fin aurait pu être mieux travaillée. Au final, un sentiment étrange se dégage de cette oeuvre. Cependant, ne vous méprenez pas sur mon analyse mitigée.
S'il se situe un cran en dessous de Tumbling Doll of Flesh, le film de Daisuke Yamanouchi reste choquant, ignoble et d'une perversité très rarement vue à l'écran. Situé à l'extrême limite de la pornographie décadente pimentée d'un gore répulsif, Mu Zan E fera le bonheur des amateurs d'un cinéma sans concession et fera fuir tous les autres. 
Quoiqu'il en soit, force est de constater que depuis une vingtaine d'années, les réalisateurs nippons règnent en maîtres sur le cinéma trash. Miike, Anaru, Sato, Matsumura repoussent à chaque fois un peu plus les frontières de l'intolérable.
Avec Mu Zan E, Daisuke Yamanouchi n'est pas passé loin de les franchir. Jusqu'où donc s'arrêtera la surenchère ?


Note: ?

 Inthemoodforgore

Seconde critique :

Le nom de Daisuke Yamanouchi ne doit pas vous évoquer grand-chose. Pourtant, le cinéaste fait désormais partie des références du cinéma trash dans son pays (le Japon). Sur les informations que j'ai pu obtenir sur le site Wikipedia, le réalisateur s'est essentiellement spécialisé dans le cinéma Underground, et plus précisément dans le gore, les sensations extrêmes et la pornographie.
On luit doit notamment Red Room, Beautiful Lesbian Sisters : On the day of mourning, ou encore Dead A Go ! A Go ! Vient également s'ajouter Mu Zan E, sorti en 1999 dans la plus grande confidentialité. Le film n'est même pas sorti en dvd en France. Je tiens d'ailleurs à remercier notre ami Inthemoodforgore (l'auteur de la chronique ci-dessus) pour m'avoir envoyé le film, uniquement disponible (en version originale) sur le site Twistedanger.

Certes, Daisuke Yamanouchi est totalement méconnu dans nos contrées hexagonales. Néanmoins, le réalisateur s'est taillé une solide réputation au-delà de ses frontières, notamment aux Etats-Unis. En effet, en 2011, le livre d'Alexandra Heller-Nicholas, Rape-Revenge Films: A Critical Study, est encensé et plébiscité par les amateurs du cinéma trash.
C'est ainsi que Daisuke Yamanouchi devient "célèbre" chez l'Oncle Sam... Enfin célèbre... C'est vraiment un terme à guillemeter tant les films du cinéaste restent (je me répète...) confidentiels. En même temps, Daisuke Yamanouchi ne fait clairement pas dans le bon goût et la dentelle. Avec Mu Zan E, le cinéaste nous entraîne dans le milieu du snuff movie.

Attention, SPOILERS ! Une journaliste enquête sur la mystérieuse disparition d'une actrice porno. Après avoir interrogé plusieurs témoins, l'un d'entre eux lui remet une cassette contenant un véritable snuff movie. Au fil de ses investigations et aidée par son équipe, elle remontera la filière et intégrera les milieux underground au point d'assister à des tournages interdits.
Mais elle va payer très cher son incursion dans un monde secret et interdit. Contrairement à la chronique précédente, je ne vais pas forcément m'attarder sur les séquences trash, sanglantes et sexuelles. Cela n'aurait aucun intérêt. Surtout pour réitérer la même chronique et les mêmes propos qu'Inthemoodforgore.

Depuis une quinzaine d'années, le cinéma asiatique s'intéresse de plus en plus à notre société consumériste et décadente. Par exemple, Battle Royale de Kinji Fukasaku (2000) critiquait (entre autres) un univers adolescent en total décalage avec le monde des adultes. Suicide Club de Sono Sion (2002) s'attaquait lui aussi à une société japonaise en pleine déliquescence.
Mu Zan E fait plus ou moins le même constat. Certes, le film ne contient aucun message sous-jacent sur notre monde contemporain en proie à la mondialisation et au capitalisme triomphant. Paradoxalement, le long-métrage est le parfait reflet d'une virilité à la fois castrée et exacerbée. Plus qu'une antinomie, un oxymore.

En l'espace de plusieurs décennies, ce n'est pas seulement le cinéma asiatique qui s'est transformé et radicalisé. Le genre pornographique a connu lui aussi de profondes mutations. Le genre cinématographique est donc passé du simple libertinage un peu coquin à des parties de gang bang avilissantes, avec une dizaine de mecs qui tabassent (plus ou moins) une pauvre femme avant de l'humilier et de la forniquer dans tous les sens et dans toutes les positions.
C'est exactement ce que décrit Daisuke Yamanouchi dans Mu Zan E. Ainsi, le réalisateur plonge le spectateur dans un univers fantasmogorique, presque irréel, dans lequel il est non seulement question de viol, d'humiliations diverses, mais aussi de tortures sadiques se déroulant dans le sang, la mort et la violence gratuite... Quelque part à la recherche d'une virilité oblitérée.

Le capitalisme a transformé les hommes en de vulgaires cacochymes, réduits à l'impuissance, à l'égoïsme et à la surconsommation. Naguère, ceux qui étaient les symboles de la loi, des limites, des règles et de l'autorité ne sont plus que des individus castrés par notre société hédoniste et "no limit". Lorsque "Phallus" n'est plus "Fascinus"... Tel est le message volontaire (ou non) de Mu Zan E.
Désormais, le cinéma pornographique propose un univers fantasmé et ultra sexué dans lequel il est question de retrouver cette virilité à travers l'excision, le sadisme, le sang, la torture et la dépravation la plus totale. A la recherche inconsciente de Monsieur "Fascinus", la journaliste va explorer les facettes les plus sombres d'un milieu destiné à rester dans la confidentialité.
Comme si cette virilité exacerbée devait être à tout prix protégée de la surveillance et des anathèmes d'un capitalisme sauvage, liberticide et moralisateur. Daisuke Yamanouchi opacifie son propos en exagérant outrageusement la violence. Encore une fois, je ne vais pas décrire dans les détails les supplices infligés aux jeunes demoiselles. Inthemoodforgore l'a déjà fait dans la chonique précédente.
Pourtant, impossible de ne pas y voir un retour à une primauté animale, quand l'homme redevient un chasseur et un redoutable prédateur... En l'état, difficile voire même impossible de noter un tel film. Les âmes sensibles sont donc priées de quitter leur siège et d'aller faire un petit tour...

Note : ?

 Alice In Oliver