genre: comédie dramatique (interdit aux - 12 ans)
année: 1986
durée: 1h24

l'histoire : Antoine est amoureux de la froide Monique qui le rabroue en permanence. Alors Antoine confie son désespoir à son copain Bob qui l'écoute avec beaucoup d'intérêt, car il est amoureux d'Antoine. C'est ainsi que débute cette histoire d'amour. 

La critique :

Bertrand Blier aime le parfum de scandale et de polémique. Le réalisateur des Valseuses affectionne tout particulièrement les tandems voire même les trios. Preuve en est avec Tenue de Soirée, sorti en 1986. Suite à l'immense succès des Valseuses, Bertrand Blier veut à nouveau réunir le trio Gérard Depardieu, Miou-Miou et Patrick Dewaere. Hélas, ce dernier met fin à ses jours.
Qu'à cela ne tienne, douze ans après Les Valseuses, Bertrand Blier continue d'explorer les relations masculines. Pour le rôle d'Antoine, le cinéaste contacte Bernard Giraudeau, mais l'acteur est déjà sur le tournage d'un autre film. Parallèlement, Michel Blanc commence à se lasser de ses rôles d'histrion moqué et ridiculisé par ses pairs, entre autres, dans Les Bronzés.

L'acteur cherche à varier ses rôles au cinéma. Bertrand Blier lui propose alors le rôle d'Antoine. Ce personnage va surtout permettre à Michel Blanc de changer son image. Par la même occasion, l'acteur décide également de se raser la moustache. Quant à Michel Creton, Jean-Pierre Marielle, Jean-Yves Berteloot, Bruno Cremer, Mylène Demongeot, Jean-François Stévenin et Bernard Farcy, tous ces interprètes secondaires complètent la distribution.
Contrairement aux Valseuses, Tenue de Soirée ne déclenchera pas le moindre scandale. A la rigueur, seule l'affiche du film provoquera quelques anathèmes et acrimonies. En effet, sur cette affiche, est mentionné le slogan : "Putain de film !". D'ailleurs, certains spectateurs vocifèrent et crient à la supercherie.

Ils croient que ce slogan est le titre du long-métrage. Attention, SPOILERS ! Antoine et Monique forment un couple à la dérive malgré l'amour qu'Antoine porte à Monique. Un soir alors qu'il se trouve dans un bal, Monique houspille violemment Antoine en lui reprochant sa situation désastreuse, ceux-ci en sont désormais réduits à vivre été comme hiver dans une caravane vétuste.
Un inconnu nommé Bob assiste à la scène et intervient inopinément en giflant Monique et en prenant la défense d'Antoine. Devant le bagout et le charisme de cet homme, le couple accepte de le suivre dans le cambriolage de maisons bourgeoises. Un trio se met alors en place et Bob semble plus intéressé par Antoine que par Monique.

Cette dernière voyant son niveau de vie augmenter grâce à la présence de Bob encourage même Antoine à céder aux sollicitations de ce « mastodonte » qui souhaite entreprendre une relation homosexuelle avec lui. Après Les Valseuses, Bertrand Blier franchit un pas supplémentaire dans la description d'une société consumériste et hédoniste, de plus en plus féminisée.
Souvenez-vous, dans Les Valseuses, Gérard Depardieu s'énamourait de son acolyte, Patrick Dewaere, essuyant le camouflet de ce dernier. Dans Tenue de Soirée, Gérard Depardieu, acteur fétiche de Bertrand Blier, réussit à faire plier (façon de parler...) l'élu de son coeur, donc Antoine (Michel Blanc).

Ainsi, Tenue de Soirée se divise en plusieurs parties bien distinctes. Dans la première, Bertrand Blier brosse le portrait d'un couple, Antoine et Monique, en plein marasme. C'est là qu'intervient Bob (Gérard Depardieu) qui leur promet gloire et argent. Ensemble, ils reforment le trio des Valseuses et deviennent de véritables experts dans l'art de la déprédation et de la grivèlerie.
Pour Bob, c'est l'occasion ou jamais de draguer Antoine, tout d'abord rétif. Puis, celui-ci finit par céder aux avances et aux oaristys de l'intéressé. C'est la seconde partie du film. A partir de là, Monique se transforme en boniche, mais finit promptement par se rebeller. Elle devient alors la prostituée d'un odieux proxénète.

Commence alors la troisième partie du film. Cette fois-ci, Bertrand Blier ne se contente pas seulement de se focaliser sur la relation homosexuelle entre Bob et Antoine. Le réalisateur s'intéresse également à l'éonisme et décide de travestir ses deux acteurs principaux. Autrement dit, en l'espace de dix ans (12 ans pour être exact), les célèbres "valseuses" ont été transformées en clitoris.
En résumé, les hommes sont appelés à devenir des femmes, le tout sous la caméra toujours aussi poétique et mélancolique de Bertrand Blier. Mieux encore, hommes et femmes sont confondus. Tout comme Monique, Bob et Antoine sont voués à l'opprobre et aux gémonies.

Eux aussi décident de se prostituer. Il n'y a donc plus aucune différence entre la féminité et la masculinité, à l'image de Monique qui scande, en parlant de Bob et Antoine : "Mais qu'est-ce qu'elles sont connes !". Comme une chimère, une vague illusion. Les hommes et les femmes peuvent être confondus et indifférenciés. Les hommes sont devenus des femmes comme les autres.
A l'image de Monique, ils sont condamnés à errer dans des rues sordides et à sombrer dans la prostitution. Après Les Valseuses, la société a effectué un pas supplémentaire vers la décadence et la dépravation, semble nous dire Bertrand Blier à travers le regard triste et désabusé de son héros principal, Antoine. Dans Les Valseuses, il y avait encore ce côté rigolard, festif, grivois et ripailleur qui permettait de donner un ton assez libre et goguenard aux péripéties de son trio indocile.
Dans Tenue de Soirée, ce ton licencieux et égrillard est définitivement abandonné pour décrire une société anomique, avec des hommes perdus et castrés, et des femmes livrées à la honte et à la prostitution. Bref, Bernard Blier réalise à nouveau une oeuvre provocante et visionnaire, probablement plus sombre et torturée que son illustre prédécesseur. Oui, c'est un peu le retour des Valseuses, mais avec une grande mélancolie, une tristesse profonde et insondable...

Note: 17/20

 Alice In Oliver