Raconter une histoire dramatique

Par William Potillion @scenarmag

Pour qu’une histoire puisse être considérée comme telle (d’autant plus si elle est destinée à un court-métrage), il faut qu’il y ait une relation harmonieuse entre les parties qui la composent et le Tout qu’elle représente. C’est en tant que Tout que nous appréhendons une histoire, c’est ce Tout qui lui donne son caractère dramatique.
Toutes les parties qui constituent une histoire (en d’autres termes, chacun de ses éléments dramatiques) doivent fonctionner ensemble, se renforçant mutuellement, étant connectées les unes aux autres, inséparables – au risque que Tout s’effondre si l’une d’entre elles venait à manquer.
Et tout ce petit monde doit s’organiser au cœur d’une harmonie nécessaire et parfaite.
Donc, si une histoire est destinée à une lecture (visuelle) dramatique, son contenu doit être articulé sous une structure dramatique.
Reprenons quelques définitions :
Le protagoniste est le personnage principal, celui qui devra se battre dans votre histoire pour obtenir ce qu’il veut (son objectif dans votre récit).

L’antagoniste est une entité dramatique, c’est-à-dire qu’il peut être humain ou une force de la nature telle qu’une montagne ou le désert ou bien encore une autorité religieuse ou politique. L’antagoniste est une force, donc, un obstacle majeur contre lequel le protagoniste devra lutter.

L’intrigue est l’histoire de ce conflit, de cette lutte entre un protagoniste et un antagoniste. A noter aussi que l’antagoniste du protagoniste peut être le protagoniste lui-même, son arrogance, ses peurs et ses angoisses ou des besoins inavoués qui le taraudent.

Plus votre antagoniste sera puissant et plus le conflit sera passionnant car le protagoniste devra redoubler d’efforts et de persévérance pour atteindre son but. D’où l’importance de bien choisir le méchant de son histoire. Certains auteurs changent même de personnage en cours de révision de leur script.

Vous devrez retenir aussi qu’un conflit n’est légitime que si les enjeux de ce conflit le justifie. En effet, pourquoi le protagoniste serait-il prêt à tout risquer, à tout perdre (y compris sa vie ou celles de ceux qu’il aime) si ce qui est en jeu pour lui dans ce conflit n’est pas d’une importance capitale ?
Plus ce qui est en jeu est crucial et plus le conflit sera dramatique (à la fois dans sa nature mais aussi sous l’aspect d’une narration dramatique).

L’action dramatique est le mouvement de l’âme, la force vitale de votre scénario. Tout comme notre propre psyché – l’énergie interne qui nourrit nos pensées et sentiments, la force sous-jacente qui nous motive – l’action dramatique est la psyché de votre récit. Elle se concentre dans la personnalité du protagoniste essentiellement. C’est par le comportement du héros, ses actions et réactions aux événements de l’histoire que l’action dramatique s’exprime. L’action dramatique est ce qui identifie une narration dramatique de toute autre forme d’expression.

L’incident déclencheur est l’événement dramatique qui amène l’action dramatique du protagoniste à la vie. Il s’agit de l’événement qui va bouleverser le quotidien de votre héros et l’amener doucement vers l’acte Deux, en d’autres termes, l’intrigue.

Le climax est le point culminant de votre histoire, là où les questions posées par votre récit trouvent enfin une réponse. Même dans un court-métrage, le climax est souvent le moment où l’intensité est la plus forte et le point final d’une série de crises de moindre effet.

Il existe aussi un moment intéressant dans la vie d’un personnage de fiction. Un moment que Aristote définissait comme celui du passage de l’ignorance à la connaissance. Il s’agit du point dans l’histoire où le protagoniste réalise que l’action dramatique qui le caractérise l’a conduit à une transformation intime de sa personnalité. C’est bien d’une métamorphose au sens littéral (parfois) et figuré. Le personnage a changé, s’est transfiguré au cours de l’histoire. Même s’il retrouve un équilibre, il ne sera dorénavant plus jamais le même. C’est la reconnaissance enfin de sa véritable nature qu’une série d’événements vécus par le héros lui a permis de révéler. Cette reconnaissance, cette révélation est comme une illumination pour votre protagoniste.

Une scène enfin recouvre plusieurs définitions. Nous préférons retenir celle d’un bloc narratif fondamental participant de l’élaboration d’une situation dramatique. Tout particulièrement dans un court-métrage, une scène devrait servir à faire avancer l’action.