LIZZIE BENNET DIARIES (Critique Web série)

Par Cliffhanger @cliffhangertwit
Synopsis : Adapté du livre de Jane Austen Orgueil et Préjugés, The Lizzie Bennet Diaries suit les aventures de Lizzie Bennet, étudiante en Master de Communication qui nous parle en direct via son blog vidéo.

Succès énorme pour cette web série sur laquelle personne n'aurait parié il y a quelques années. Une adaptation d'un classique de la littérature anglaise sur YouTube ? Laissez-nous rire. Et pourtant, avec plus d'un demi-million de vues en moyenne par épisode, plusieurs livres et un Emmy à la clé, la série s'est rapidement imposée comme l'un des grands triomphes des nouveaux médias. Preuve que les nouvelles formes si chères au Treplev de Chekhov (on est dans la critique du littéraire, hein !) sont bien en train d'émerger. The Lizzie Bennet Diaries est plein à craquer de douceur et de bons sentiments, distillant les chapitres de Jane Austen en épisodes de quelque minutes seulement. Montée comme un confessionnal de télé-réalité où un personnage voire deux s'assoient devant une caméra et discutent des choses qu'il leur arrivent, la série parvient à rendre palpitants les évènements en somme tout à fait banals de la vie de tous les jours.

La force de la série, c'est d'abord son scénario. Adaptée avec brio par Hank Green et Bernie Su, aidés par une belle équipe de scénaristes, l'œuvre de Jane Austen prend une toute autre ampleur sur le petit écran de YouTube. On y voit Lizzie Bennet ( Ashley Clements) se lamenter sur les frasques de sa mère et s'inquiéter de la vie amoureuse de ses sœurs Jane ( Laura Spencer, la Jessica Warren de Bones) et Lydia (l'adorable Mary Kate Wiles). On ne voit au final que très peu de personnages puisque Lizzie, ses sœurs et son amie Charlotte ( Julia Cho) nous rejouent les scènes de leur vie, interprétant tour à tour leurs parents, leur voisins, ou les petits copains en tous genre. Léger ? Absolument. On est dans le domaine de plume fin du XVIIIème siècle, l'époque où la grande destinée d'une femme était de faire un beau mariage. Mais c'est là justement tout le génie de la web série : en remplaçant les offres de mariage par des contrats professionnels, les scénaristes maintiennent les enjeux de l'intrigue, tout en les modernisant. Qui ne rêverait pas d'une offre de job à cinq zéros en sortant de l'université ? Ou d'être promu chef de département, voire partenaire de firme en quelque mois seulement ? C'est de la fiction pure, certes, mais de la fiction qui fait rêver, de la fiction qui colle à la vie du spectateur, et qui garde l'essence du livre tout en se débarrassant de son côté désuet. Une grande leçon d'adaptation romanesque, que certains scénaristes feraient bien d'étudier (on ne pointera personne du doigt mais dans le genre... Revenge ?).

Bénéficiant d'un montage dynamique et d'une héroïne à la frimousse d'ange, The Lizzie Bennet Diaries se révèle être bien plus profond et réfléchi qu'on ne pourrait le penser au premier abord. Lizzie a beau être la narratrice principale, le problème de son objectivité, qui est d'ailleurs, tout le sujet du livre, se pose assez rapidement. Nous sommes invités à prendre ce qu'elle dit avec des pincettes, cassant là le contrat intrinsèque qui s'établit toujours entre le spectateur et une œuvre de fiction, et qui dicte qu'un narrateur est digne de confiance. Sans tomber dans l'analyse de principe façon Umberto Eco, on est confronté là à une idée originale, peu exploitée dans la plupart des séries : ne pas prendre les répliques du narrateur pour parole d'Évangile. Et c'est cette invitation à participer activement à l'histoire, en plus de YouTube qui réclame toujours des commentaires, qui a fait le grand succès de cette minisérie. C'est une rare expérience pour un spectateur que de se voir incorporé, même à travers le filtre d'Internet, d'une histoire qui se déroule sur un écran. Cela ne révolutionnera peut-être pas le genre, mais cela mérite amplement d'être vu.

Crédit images :Imdb.com/ Fictionlove.com / Pemberleydigital.com

Catégories : Critiques, Séries

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