Comme un rock.
Deux jours se sont écoulés, et l’horizon tracé par l’orchestre et le chœur s’est évanouit dans le temps du festival. Une brume blanche se répand maintenant dans l’air, offrant ses fines particules aux lumières incisives des projecteurs. De larges enceintes, sombres cumulonimbus, couvrent la salle, prêtes à libérer la foudre sur nos têtes. Une toute autre ambiance se diffuse alors entre les murs de l’Espace Montrichard, augurant un climat autrement plus électrique que celui déployé par Cosma. En effet, un océan sépare Le Grand Blond du Grand Bleu. Face l’opulence orchestrale de son ainée, se mesure désormais une structure plus « minimaliste » qu’incarne la formation RXRA. Les musiciens entrent bientôt sur le pont. Eric Serra, bien sûr, à la basse et au chant, immédiatement suivit par ses cinq membres d’équipage : les frères Grandcamp, Jim et Jon, à la guitare et à la batterie ; Pierre Marcault aux percussions ; Christophe Panzani au saxophone droit ; et Thierry Eliez au clavier. Tous sont prêt à faire trembler cette mer de spectateurs venus assister à ce concert de clôture.
Une fois les amarres largués, c’est un déluge de sons et de lumières qui s’abat sur nos oreilles. Le compositeur nous embarque à bord de sa Lady Blue, qu’il installe sur les rails de son Subway, poursuivant le lapin blanc jusqu’à la piste du célèbre Cirque Du Soleil avant de partir vers le futur, en quête du Cinquième Élement. Au cœur de cette traversée, Nikita et Léon, figures de proue de sa collaboration avec Luc Besson, émergent des ondes, agrippant nos souvenirs pour nous entrainer dans cette houle acoustique. Le travail de ré-instrumentation imposée par l’arsenal que l’artiste s’est mis à disposition le conduit parfois à ré-arranger ses compositions, avec le risque évident (et malheureusement bien réel) que son GoldenEye et son Arthur & Les Minimoys perdent en puissance d’évocation. Néanmoins, si des péripéties techniques mineures viennent aborder le spectacle, on demeure stupéfait par la quantité d’énergie déployée et de sueurs abandonnées. La complicité rayonnante, Jim Grandcamp transforme, entre ses doigts, sa guitare en organe de course, faisant grimper les tours afin de taquiner son frère, Jon, qui laisse éclater son enthousiasme sur sa batterie que son incandescente autorité fait chanceler, tandis que Christophe Panzani s’époumone, faisant pépier son saxophone au rythme de cette rugissante effervescence musicale qui éclot aux yeux admiratifs des vétérans Thierry Eliez et Pierre Marcault, tout deux impressionnants de force tranquille. Finalement, entre deux riffs, le rock s’attendrit pour s’adresser directement au public, arrangeant de petites escales humoristique, plaisantant autour du « Menu Serra » proposé par le food-truck du festival, composé d’une brochette de dindes (« une formule qui a fait plaisir à mes musiciens »). Mais après un acte de générosité final en réponse à notre rappel, Eric Serra s’envole définitivement, vers d’autres horizons. Que sera Serra…