Life – Critique

Par Breakingmen @Breaking_Men

Life est un film réalisé par Anton Corbijn ( Control, The American) sorti dans nos salles le 9 septembre dernier. Avec seulement 32 000 entrées au compteur pour sa première semaine d'exploitation, je me suis dis qu'un aussi bon film méritait bien un peu de promotion. Ce n'est sûrement pas moi qui vais changer les choses avec ma petite critique, mais c'est déjà ça. Life suit la relation de deux personnages : l'acteur James Dean (Dane DeHaan) et le photographe Dennis Stock (Robert Pattinson), de leur rencontre en 1955 à la première du film À l'est d'Eden d'Elia Kazan la même année. Dennis Stock est un jeune photographe ambitieux, qui travaille notamment pour le magazine Life. Suite à sa rencontre avec un James Dean sur le point de devenir célèbre, il voit quelque chose en lui et va essayer de convaincre l'acteur de le photographier pour envoyer les clichés à Life. Ce qui conduira à créer une série de photos aujourd'hui célèbre.

Ce qui intéresse avant tout Anton Corbijn dans cette histoire, c'est la photographie et particulièrement la relation parfois ambiguë qui unit un photographe à son modèle. Ce qui se comprend quand on sait que Corbijn a d'abord été et est toujours un photographe reconnu, entre autres pour ses portraits d'artistes comme Ian Curtis, Miles Davis ou Tom Waits. Le premier plan du film, sur l'ampoule rouge d'une chambre noire de développement photo, pose les choses. Avant tout, on va parler ici de photographie et du travail de photographe, même si le début de carrière de Dean est aussi une part importante du film. Le personnage de Stock est donc en fait le centre du film. La majeure partie du film utilise son point de vue, que ce soit lors des séances photos, pour montrer son regard sur Dean ou lors des quelques scènes avec sa famille (son ex-femme et son fils). La question du point de vue est importante car ce que Corbijn essaye de mettre à l'image c'est justement la vision que la photographe à de Dean. Et ainsi la façon dont il s'immisce dans la vie de son modèle pour le suivre un peu partout et parfois capturer des moments intimes, au risque de s'approcher parfois trop près des faiblesses de l'acteur. Le travail du photographe n'est pas seulement d'attendre le bon moment ou de mettre en scène une situation, mais aussi d'établir un lien de confiance avec son sujet. C'est là que se trouve toute la beauté des photos de Stock et la démarche montrée par le film, celle de rentrer dans la vie de James Dean pour dévoiler sa vraie nature. Mais si la relation entre les deux personnages semble sincère, on se doute toujours que l'un essaye plus ou moins d'utiliser l'autre pour réussir à se faire connaître. James Dean veut que le monde le voit et Dennis Stock veut que l'on reconnaisse son travail comme celui d'un artiste.

Néanmoins, les fans de James Dean ne seront pas en reste car le film s'attarde également sur ce dernier pour montrer la genèse d'une idole. Mais il ne faut pas non plus s'attendre à un encyclopédie sur l'acteur. Comme Dennis Stock, le réalisateur cherche à faire un portrait de Dean plus qu'à exposer sa vie. On découvre alors un jeune homme passionné par le métier d'acteur mais qui déteste tout ce qui entoure ce métier c'est-à-dire, pour simplifier, le show-business. Mais au-delà de cette figure rebelle assez connue, Corbijn décrit Dean comme quelqu'un habité par un sentiment paradoxal. Celui de vouloir être sous le feux des projecteurs tout en voulant rentrer chez soi. Celui du désir d'être célèbre malgré la peur de se montrer. Une scène intéressant illustre cette idée. Lors d'un tapis rouge pour la première d'un film où joue sa petite amie Pier Angeli, la caméra est positionnée avec eux dans la voiture juste avant de devoir passer devant les photographes. Encore une fois le choix du point de vue est important, car contrairement à la scène classique de tapis rouge où le réalisateur se positionnerait du côté du public et des photographes, nous sommes ici avec ceux qui doivent aller sur le tapis rouge. La personne qui communique au public le nom des stars oublie d'annoncer James Dean, à l'époque encore peu connu. Ce dernier hésite alors à sortir de la voiture mais le fait quand même malgré la déception que l'on peu lire sur son visage. Pas du tout à l'aise, il commence à parler à Dennis Stock dès qu'il l'aperçoit parmi les photographes, reconnaissant enfin un visage familier entre tous les flashs qui l'assaille. Les sentiments décrits plus haut se retrouvent dans cette scène. Dean n'est pas dans son élément dans ce milieu et même s'il souhaite être connu, il n'aime pas forcement l'image qu'il renvoie, peut-être par peur de se dévoiler. Aussitôt qu'il peut se rattacher à un élément connu en la personne de Stock pour s'éloigner du centre du tapis rouge, il le fait.

Pour ce qui est des qualités du film, j'ai trouvé les deux acteurs principaux très bons. Robert Pattinson réussi à nous faire croire en son personnage de jeune photographe pas toujours sûr de lui mais persévérant. Et la représentation de James Dean par Dane DeHaan est un succès. Il ne lui ressemble pas forcement beaucoup mais sa démarche et son look suffisent à faire renaître l'acteur sur un grand écran. La mise en scène de Corbijn n'est pas forcement très inventive, mais l'attention portée à la photographie et aux cadrages donne de très beaux plans ayant parfois une composition très " photographique " (utilisation des lignes dans le décor, jeu sur les premier plan/arrière-plan). Un autre point positif se situe dans la musique du film, composée par Owen Pallett. Très jazzy et calme, on y entend plus de contre-basse que de violons et ça fais plutôt plaisir.

En somme Life est un biopic qui n'en est pas vraiment un, ce qui lui va bien. La combinaison entre une mise en scène soignée sans être extraordinaire et une histoire intéressante faite d'une amitié fascinante en font un très bon film, que je conseille à toute personne s'intéressant à la photographie.