Le Secret de la Pyramide ("Young Sherlock Holmes")

Par Olivier Walmacq

Genre : aventure, action, policier, fantastique 
Année : 1985
Durée : 1h49

L'histoire : A Londres en 1870, le jeune John Watson fait son entrée dans une nouvelle école. Il y rencontre un autre adolescent à l'esprit de déduction très développé : un certain Sherlock Holmes. Très vite, Holmes et le futur docteur Watson se lient d'amitié et sont conduits à mener leur première enquête sur une série de meurtres étranges survenus à la suite d’hallucinations épouvantables

La critique :

Vers le milieu des années 1980, le cinéma hollywoodien se redécouvre une passion pour le plus célèbre des détectives. En 1986, c'est Walt Disney qui lance et produit Basil, détective privé, un dessin animé évidemment inspiré et ressorti des tiroirs de Sir Arthur Conan Doyle. Un an plus tôt, c'est Amblin Entertainment qui extirpait Sherlock Holmes des oubliettes avec Le Secret de la Pyramide, réalisé par Barry Levinson. Hélas, les deux longs-métrages se solderont par un bide commercial.
Supervisé par Steven Spielberg et écrit par Chris Columbus, Le Secret de la Pyramide sera condamné à l'oubli, jusqu'à renaître peu à peu de ses cendres, avec le retour impromptu de ce personnage flegmatique dans (le pourtant très médiocre) Sherlock Holmes de Lionel Ritchie en 2009.

A l'époque, Barry Levinson n'est pas encore le cinéaste émérite et accompli qui va connaître le succès avec Rain Man (1989) et Good Morning Vietnam (1987). Au milieu des années 1980, il n'est qu'un séide, une ouaille fidèle au cinéma inventé par Steven Spielberg. A l'époque, le réalisateur ressort de l'immense succès d'Indiana Jones et le Temple Maudit (1984).
Fan de films d'aventure, Spielberg souhaite produire un long-métrage aux multiples facettes. Il confie l'écriture du script à un autre de ses collaborateurs, Chris Columbus, le futur "papa" (si j'ose dire) de Harry Potter au cinéma. Prévu comme le premier épisode d'un tryptique, Le Secret de la Pyramide est conçu comme une oeuvre à la fois commerciale, fantastique et policière qui doit séduire à la fois les jeunes et le grand public.

Hélas, malgré des critiques plutôt dithyrambiques, les spectateurs ne se précipitent guère dans les salles. Injustement boudé au moment de sa sortie, Le Secret de la Pyramide s'est peu à peu taillé une certaine réputation au fil des années. Pour Barry Levinson et Chris Columbus, le scénario doit revisiter le mythe et les origines de Sherlock Holmes, déjà affublé de son fidèle compagnon, John Watson, qui n'est pas encore le célèbre médicastre qu'il deviendra par la suite.
La distribution du film réunit Nicholas Rowe, Alan Cox, Sophie Wars, Anthony Higgins, Vivienne Chandler, Susan Fleetwood, Freddie Jones et Nigel Stock. Dans ce casting, ce sont donc des héros quasi impubères qui viennent donner la leçon à un monde adulte confiné dans les flagorneries, les manipulations et le crime. Une tendance qui sera confirmée avec d'autres films juvéniles dans les années 1980, notamment Stand By Me (Rob Reiner, 1987) et Les Goonies (Richard Donner, 1985).

Attention, SPOILERS ! À Londres en 1870, le jeune John Watson fait son entrée dans sa nouvelle école, Brompton Academy. Il y rencontre un adolescent à l'esprit de déduction très développé : un certain Sherlock Holmes. Ils se lient d'amitié et Holmes lui présente son mentor, le professeur Waxflatter, un enseignant à la retraite devenu inventeur qui habite toujours dans l'école.
Il lui présente également la nièce de celui-ci, Elizabeth, dont il est amoureux. 
Très vite, Holmes invite Watson à participer à une enquête concernant M. Bobster et le révérend Nesbitt, tous deux décédés dans des circonstances étranges, s'apparentant à une crise de folie. Ils sont en réalité victimes d'hallucinations épouvantables après qu'une mystérieuse silhouette armée d'une sarbacane leur ait tiré dessus.

Holmes réfute la thèse du suicide, voyant un lien entre les deux meurtres, mais il ne parvient pas à convaincre l'inspecteur Lestrade de Scotland Yard. Comme un paradoxe. C'est en vidéo et surtout à la télévision que Le Secret de la Pyramide va trouver son public. Que les choses soient claires. On tient probablement là le ou l'un des meilleurs films d'aventure des années 1980.
Néanmoins, le long-métrage ne se résume pas seulement à quelques saynettes d'action solidement troussées. Le secret de la pyramide pourrait s'apparenter à un mélange hétéroclite entre l'aventure, le fantastique, le policier, la magie, le drame et le film noir. Noyé dans une ambiance gothique et dans une aura crépusculaire, qui ne sont pas sans rappeler les films de la Hammer, Le Secret de la Pyramide nous convie à découvrir la genèse d'un Sherlock Holmes transformé en éphèbe.

L'enquête menée par Holmes et son nouvel affidé porte sur des meurtres étranges commis sur des hommes visiblement sans histoire. A partir de là, le film propose plusieurs séquences déroutantes sur fond de trip halucinatoires et de secte énigmatique. Parallèlement, le scénario dévoile un futur détective arrogant, hâbleur mais d'une probité stricte. Fustigeant ses professeurs et accusé (injustement) de tricherie à un examen, Holmes est nûment renvoyé de son école.
Première blessure. Première faille. Son auguste maître, une sorte de démiurge un peu fantasque, est assassiné. Le film ouvre alors un curieux passage entre l'adolescence et l'âge adulte. Un gouffre noir et sans espoir qui doit se dérouler dans la violence, le sacrifice et la mort. L'enquête précautionneuse de Holmes et de Watson les conduit sur la piste d'une secte satanique et pharaonique.

Les ombres maléfiques deviennent de plus en plus oppressantes et comminatoires. A contrario, le film bémolise parfois son propos par plusieurs touches humoristiques, peu éloquentes, il faut bien le dire. A l'image de ces sucreries "vivantes" qui viennent contrarier l'appétit pantagruélique du futur Docteur Watson. Si le flegme (célèbre) du personnage d'Arthur Conan Doyle a été conservé, le personnage principal ressemble davantage à une variation victorienne et british d'Indiana Jones.
Les fans du héros original déploreront sûrement le traitement lapidaire opéré sur ce détective déjà accompli. Cependant, Barry Levinson et son équipe rectifient parfois le tir via quelques clins d'oeil (bien sentis) aux nouveaux atours (la veste et la pipe) d'un Sherlock Holmes triomphant de son pire ennemi. Ensuite, le film peut s'appuyer sur d'excellents interprètes, notamment Nicholas Rowe et Alan Cox, qui transcendent leur personnage. Enfin, malgré ses trente années au compteur, le film a plutôt bien supporté le poids des années. Bref, un classique hélas sous-estimé ou injustement méconnu. Vous choisirez.

Note : 16.5/20

 Alice In Oliver