[Critique] – Much Loved

Much Loved Réalisé par : Nabil Ayouch
Avec :
Loubna Abidar, Asmaa Lazrak, Halima Karaouane et Sara Elmhamdi-Elalaoui
Sortie :
16 septembre 2015

Durée: 1h44min
Budget:
Distributeur :
 Pyramide Distribution

3D: Oui – Non

Synopsis :
 

Interdit aux moins de 12 ans.

Marrakech, aujourd’hui. Noha, Randa, Soukaina et Hlima vivent d’amours tarifées. Ce sont des prostituées, des objets de désir. Vivantes et complices, dignes et émancipées, elles surmontent au quotidien la violence d’une société qui les utilise tout en les condamnant.


4 Stars


Notre avis :

Fiction, documentaire ou drame social ? Difficile de donner une étiquette à Much Loved, le dernier film controversé du réalisateur franco-marocain Nabil Ayouch. Si sa sulfureuse réputation a naturellement fait la promotion du film, il n’a pas eu besoin de cela pour se faire remarquer à la Quinzaine des Réalisateurs cette année à Cannes. Mais que cache l’un des films les plus polémiques de l’année 2015 ?

Much Loved 2

Much Loved est fait d’une manière plastique, il fait corps avec les personnages, rendant hommage à la beauté de l’anatomie humaine, et surtout féminine. Le titre original Zin Le Fik révèle d’avantage le travail effectué sur la plasticité des corps féminins qui, lors de certaines séquences, se perdent entre l’amour du désir, de la chair et leurs obligations professionnelles. C’est le cas au cours d’une scène entre Loubna Abidar et un touriste français plus âgé qu’elle, lors de laquelle elle mêle passion et travail ne sachant plus où est la limite. Ces femmes assument totalement leur statut social, ce qui ne les transforme pas en objet de désir ou de honte. Nabil Ayouch nous fait découvrir le monde caché et minoritaire de la prostitution dans ce pays de religion. Cette visite se fait au travers de ces trois personnages féminins, et donc sous l’angle léger des jeunes femmes qui acceptent ce qu’elles sont peu importe la situation. Les scènes sont intimes, le réalisateur est à la recherche de réactions fugitives des actrices ; rappelons qu’il s’agit d’actrices non professionnelles, qui se sont inspirées de prostituées qu’elles mêmes connaissent. Considérant cette donnée, leur prestation n’en est que plus remarquable. La beauté des scènes se trouvent justement dans ces petits moments que Ayouch arrive à voler à ces femmes.

Convainquant dans son aspect brut et réaliste, le film déçoit en voulant absolument ancrer les personnages dans une réalité étrangère au monde de la prostitution : la recherche d’un père, une famille déchirée, un prétendu amour impossible entre un SDF et l’une des prostituées.. En outre, la dernière partie du film, avec l’arrivée d’une quatrième figure féminine, alourdie le tout et rend la fin interminable. On a l’étrange sentiment que cette dernière partie, ainsi que les dérives narratives, sont là pour tempérer le sujet du film, et empêche le réalisateur d’assumer pleinement le style documentaire de son oeuvre.

Mais vient également le temps des règlements de comptes. Inutile de nier que le réalisateur, qui se dit étonné de l’interdiction du film au Maroc pour « outrage grave aux valeurs morales et la femme marocaine« , a tout de même cherché à attaquer le front d’une société dont il ne partage pas totalement les idéaux. Il tombe parfois dans la provocation pure, notamment lors de l’évocation de l’homosexualité cachée d’un des personnages masculins. En tant que spectateur, il est intéressant de faire l’expérience de ce film en salle. En effet, il engendre souvent le rire, le sourire mais peu le mal-être. C’est parce qu’il réussi avec brio à traiter ces trois personnages avec grâce, pudeur et respect.

« Much Loved, septième long-métrage de Nabil Ayouch se révèle être le point d’orgue de sa carrière, qu’il continuera, on espère. »

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