Une nouvelle pièce a débarqué sur la scène du Théâtre Trévise, dans le neuvième arrondissement de Paris. Carmen à tout prix, mise en scène par Manon Savary et écrite par Sophie Sara, propose une mise en abyme de la création théâtrale. Nous avons assisté à la première de cette comédie opératique la semaine dernière, et voici notre avis.
Du théâtre dans le théâtre
Carmen à tout prix est, pour faire simple, une tentative de mise en scène de la Carmen de Georges Bizet. A quelques minutes du lever de rideau, le directeur du théâtre doit faire face à une grève de ses régisseurs, rendant toute représentation impossible. Son équipe, dont la secrétaire fofolle est interprétée par Sophie Sara, va alors essayer de sauver la soirée. C'est donc à une pièce de bric et de broc que l'on va assister. Les acteurs sur scène vont devenir acteurs de la pièce qui se déroule sous nos yeux, une Carmen loufoque jouée sur une scène sobre et dans un étrange décor, censé représenter l'Andalousie du début du XIXème siècle. Les costumes et les accessoires, parfois anachroniques, parfois burlesques, conviennent parfaitement à l'intrigue et aux personnages sur scène. Les acteurs/chanteurs, qui seront vite rejoints par des musiciens, se déplacent dans l'espace de la salle du théâtre Trévise, entraînant une relation de complicité avec le public, qui s'amuse des facéties se jouant devant eux.
Un joyeux mélange entre opéra et théâtre
Carmen à tout prix est un véritable creuset artistique : s'y mêlent chant, théâtre et musique, le tout superbement interprété sans aucune fausse note. Les voix de Sophie Sara, mezzo-soprano, Mathieu Sempéré, ténor remarqué du groupe Les Stentors, ainsi que celles d'Ariane Olympe Girard, soprano et Philippe Scarami, baryton, fusionnent sur les airs les plus connus de l'opéra Carmen : L'amour est enfant de bohème, Toréador toréador et bien d'autres qui rythment la soirée et les rires des spectateurs. Ceux-ci sont facilement provoqués par les coups de théâtre et les effets de comique de situation qui se multiplient. Les plaisanteries grivoises ainsi que les réflexions sexistes et désagréables du directeur de théâtre austère déclenchent l' hilarité du public. Cependant, ce qui est le plus plaisant lorsque l'on assiste à la représentation de Carmen à tout prix, c'est l'enchevêtrement d'airs d'opéra accompagnés d'une musique jouée par trois musiciens (au violon, à l'accordéon et à la guitare/au saxophone) qui cadence l'intrigue.
Une troupe talentueuse
On les avait repérés dans cette vidéo parodique de Games of Thrones, dans laquelle l'on distingue le talent de chacun des membres de la troupe, mais les entendre en vrai est impressionnant. La voix des acteurs/chanteurs résonne dans la salle du théâtre Trévise et prend le spectateur aux tripes. L'énergie communicative des acteurs et des musiciens donne la pêche et tient en haleine le spectateur du début à la fin. Carmen à tout prix est en outre bel et bien une pièce hybride, confondant un art souvent réservé à une élite, l'opéra, et une pièce populaire souvent cantonnée au théâtre de boulevard. Voilà là le talent caché de la troupe interprétant la pièce, qui parvient à la dépoussiérer et à la rendre moderne, voire à ramener le spectateur à des préoccupations bien actuelles : la situation des intermittents du spectacle, pour laquelle les techniciens sont en grève, le rôle de la femme - dénigré par le directeur du théâtre ainsi que la faillite des industries culturelles sont autant de thèmes développés tout au long de Carmen à tout prix.
Vous pouvez retrouver une critique de la pièce sur le site " we are girlz ". Nous vous conseillons fortement de foncer voir cette pièce étonnante qui se joue jusqu'en janvier 2016 au théâtre Trévise , je vous garantis d'y passer un excellent moment !
Critique - Carmen à tout prix
- Le scénario farfelu et loufoque
- Les coups de théâtre hilarants
- Le talent des chanteurs d'opéra
- Le rôle plutôt en retrait des musiciens par moments
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- Titre : Carmen à tout prix
- Acteurs principaux : Mathieu Sempéré, Sophie Sara, Ariane-Olympe Girard, Bertrand Mombaylet, Philippe Moiroud