Fatima
Réalisé par Philippe Faucon
Avec Soria Zeroual, Zita Hanrot, Kenza Noah Aïche
France, 2015, 1h19
Date de sortie 7 octobre 2015
Sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2015.
Synopsis
Fatima vit seule avec ses deux filles : Souad, 15 ans, adolescente en révolte, et Nesrine, 18 ans, qui commence des études de médecine. Fatima maîtrise mal le français et le vit comme une frustration dans ses rapports quotidiens avec ses filles. Toutes deux sont sa fierté, son moteur, son inquiétude aussi. Afin de leur offrir le meilleur avenir possible, Fatima travaille comme femme de ménage avec des horaires décalés.Un jour, elle chute dans un escalier. En arrêt de travail, Fatima se met à écrire en arabe ce qu’il ne lui a pas été possible de dire jusque-là en français à ses filles.
Un film tourné en partie en région lyonnaise
Le nouveau film réalisé par Philippe Faucon (Samia, La Trahison, Dans la vie, La Désintégration …) est librement adapté de deux ouvrages de Fatima Elayoubi – Prière à la lune et Enfin, je peux marcher seule . Une évocation de la vie d’une femme de ménage originaire du Maghreb qui élève seule ses filles adolescentes nées en France. Avec Fatima, Philippe Faucon pose la question de l’intégration et du décalage entre les générations d’immigrés.
Fatima a été tourné à Lyon durant l’été 2014 et à Marseille. Le réalisateur Philippe Faucon a confié le rôle titre de son dernier film à une femme de ménage et mère de famille de Givors, Soria Zeroual.
Fatima, une mère courage en laquelle beaucoup de reconnaissent
Le personnage de Fatima est avant tout celui une mère qui veut le meilleur pour ses filles. Cela donne un caractère universel au film. C’est d’ailleurs ce qu’a constaté le réalisateur Philippe Faucon dans toutes les salles où il a montré son film en avant-première ces dernières semaines : »Il y avait régulièrement quelqu’un qui parlait de sa mère à lui, d’origine polonaise ou italienne, ou même d’aucune origine étrangère, et qui avait retrouvé dans son rapport au film et au personnage quelque chose de très fort. C’est là que je me suis dit que le film avait atteint sa raison d’être, parce que, à ce moment-là, dans le rapport au personnage, il n’y a plus de foulard, il y a juste une histoire humaine, avec quelque chose de plus universel, et pour moi, c’est important. »
Philippe Faucon dresse le portait de trois femmes
Fatima, immigrée en France de première génération, est une femme-courage qui de petits en boulots en petits boulots se démène pour offrir à ses deux filles une vie meilleure. Son quotidien est émaillé par une violence sociale souvent insidieuse, celle de la bourgeoise qui l’emploie, le regard que lui renvoient les parents des camarades de ses filles, lui faisant ressentir le poids de la différence ou encore celle de la propriétaire qui refuse de louer son appartement à une femme voilée. Sans oublier la colère frontale de Souad sa plus jeune fille à son égard. Cette dernière n’accepte pas la vie laborieuse de sa mère, elle préférerait « voler plutôt que nettoyer la merde des autres ».
Maîtrisant encore mal le français, Fatima se sent coupée de la société à cause de la barrière de la langue et a du mal à communiquer avec ses filles. Pour pallier cette frustration, elle écrit quotidiennement des pensées dans sa langue natale dans un journal intime.
Nesrine est une aînée modèle dont la soif de réussite est à l’image de sa maîtrise de la langue de Molière. On devine qu’elle a dû très tôt aider sa mère dans ses démarches administratives et s’enrichir de lectures qui ont forgé son identité.
A l’inverse de sa soeur, Souad apparaît en rupture avec un environnement familial dont elle a honte et dont les expressions imagées et provocatrices ressemblent à celles de son environnement social. Elle reproche violemment à sa mère son manque d’instruction, dans le langage des jeunes de la rue « Tu es une cave. (…) Tu comprends tout de travers de toute façon. Tu ne sais même pas lire. » alors qu’elle-même sèche les cours.
Fatima est un film délicat, sensible, humaniste qui nous parle de la barrière de la langue, du fossé générationnel, du racisme ordinaire, des difficultés de l’intégration. Il est porté par trois actrices sublimes. Soria Zéroual illumine le film. Zita Hanrot et Kenza Noah Aïche, deux jeunes comédiennes professionnelles, interprètent leur personnage avec une grande justesse.