RoboCop - 2014 (Le digne épigone du smartphone)

robocop 2014

Genre : science-fiction, action 
Année : 2014
Durée : 1h57

L'histoire : Les services de police inventent une nouvelle arme infaillible, Robocop, mi-homme, mi-robot, policier électronique de chair et d'acier qui a pour mission de sauvegarder la tranquillité de la ville. Mais ce cyborg a aussi une âme

La critique :

En 1988, le cinéma d'action et de science-fiction se découvre un nouveau justicier, à la fois de chair et de métal. Son nom ? Robocop, soit cette nouvelle panacée contre la criminalité. Paul Verhoeven assène un véritable uppercut à ses contempteurs. Son androïde se transmute en "Jésus Américain" et en allégorie sur l'âme humaine. Immense succès au box-office, RoboCop premier du nom engendre deux nouveaux épisodes. Hélas, dès le second chapitre (donc RoboCop 2), la franchise a déjà perdu de sa superbe et se transforme en honnête série b de science-fiction. Sans plus.
Pour la firme Orion Pictures, il s'agit d'orienter le cyborg vers de nouvelles inimitiés. La chair ensanglantée d'Alex J. Murphy (alias RoboCop) doit être copermutée par un divertissement consensuel et familial.
Tel est le concept bêtifiant et amphigourique de RoboCop 3 (Fred Dekker, 1993). 
La saga robotique ne s'en remettra pas. Jamais. Pourtant, les producteurs s'ingénient. Une mini-série, RoboCop 2001 (ou RoboCop : directives prioritaires), est réalisée et s'inscrit dans la logique (douteuse) du troisième long-métrage. Le glas du policier cybernétique a sonné. Mais en 2008, un remake est d'ores et déjà annoncé. Le choix se tourne vers Darren Aronofsky pour une sortie prévue en 2010.
Parallèlement, la MGM connaît une grave crise financière et Darren Aronofsky abandonne le projet. En 2012, le remake est relancé, cette fois-ci sous la direction de José Padilha. Le cinéaste a la lourde tâche de succéder à Paul Verhoeven. Le tournage débute et le réalisateur vit un véritable calvaire. Toutes ses idées sont répudiées par les producteurs. 

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José Padilha décrit le film comme la pire expérience de sa carrière cinématographique. La presse s'empare de l'affaire et oppose à Padilha à ses nombreux contempteurs. RoboCop (2014) n'est pas encore sorti au cinéma, mais il est déjà fustigé, chapitré et gourmandé par les critiques. Les premières photographies du film sont publiées. Les fans de la copie originale se gaussent de ce futur échec annoncé.
Hélas, la bande annonce corrobore leurs suspicions. Evidemment, la comparaison avec le chef d'oeuvre de Paul Verhoeven est inévitable. Après avoir visionné le remake, ce dernier déclare péremptoire : "J'ai l'impression d'avoir été enterré vivant". A nouveau, les fans fulminent. RoboCop (2014) est-il réellement la catastrophe annoncée ? Réponse dans les lignes à venir.

La distribution de ce remake réunit Joel Kinnaman (qui succède à Peter Weller), Gary Oldman, Michael Keaton, Samuel L. Jackson, Abbie Cornish, Jackie Earle Haley, Jay Baruchel et Michael K. Williams. Attention, SPOILERS ! En 2028, la technologie robotique de l'OmniCorp, un conglomérat militaro-industriel, est à la pointe du progrès. Non content de vendre des drones et autres robots militaires, comme le ED 209, lors de conflits, la société désire rentrer dans le marché de la sécurité publique.
Mais les dirigeants tergiversent. Est-il absolument nécessaire de tester cette technologie sur le sol américain pour protéger les citoyens ? La loi Dreyfuss interdit l'usage de robots sur le sol des États-Unis. 
Alex Murphy est un père de famille et un bon policier qui fait son possible pour éliminer le crime à Détroit. À la suite de l'explosion de son véhicule piégé, son corps est gravement mutilé. 

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Murphy est cependant sauvé par OmniCorp et le docteur Dennett Norton, qui utilise son savoir scientifique pour le remettre sur pied. Alex Murphy est transformé en machine, un cyborg du nom de RoboCop, spécialement programmé pour rétablir la justice grâce à des méthodes expéditives. A priori, le scénario de ce remake partage de nombreuses analogies avec la version de 1988.
Pourtant, sur le fond comme sur la forme, les deux films sont très différents. Dans la version de Verhoeven, RoboCop était l'incarnation ou plutôt un clone entre Maria (la femme robotique dans Metropolis de Fritz Lang) et la créature de Frankenstein. Un atavisme lourd à porter pour cet homme transfiguré en machine. Pas de résurrection sans crucifixion. Telle était la principale rhétorique du film de Verhoeven, conférant à sa machine une dimension à la fois spirituelle, religieuse et vindicative.

Une étrange filiation qui se mute peu à peu une quête identitaire. Prière d'appeler le robot policier Alex J. Murphy ! José Padilha opte pour une nouvelle vision de ce cyborg 100 % flic. Certes, RoboCop est toujours le fruit d'un capitalisme à la fois militaire, vénal et technologique. Mais dans la version de 2014, Padilha abandonne totalement cette aura spirituelle au profit d'une carcasse étonnement vide.
C'est la grande surprise de ce remake. RoboCop n'est ni le descendant du monstre de Frankenstein ni cette nouvelle variation (masculine) de Maria, mais le digne épigone du smartphone. 
Comme une évidence. Dans ce monde technologique, égotiste et sclérosé par la criminalité, l'Humanité ne signifie plus rien. A peine une coquille vide. L'argent a remplacé la réalité.  

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Telle est la vision alarmiste de José Padilha. A l'image de cette séquence profondément touchante montrant un Alex J. Murphy réduit à un vulgaire cacochyme, en l'occurrence un tronc cérébral. Le reste de son corps n'est que machine et un ajustement de prothèses démantibulées. Un simulacre. Ou plutôt une chimère. Dommage que cette idée ne soit pas davantage exploitée par Padilha qui tient enfin son remake. Hélas, cadenassé par ses producteurs et une autre machine (cette fois-ci hollywoodienne), le cinéaste se contente de signer une copie en demi-teinte.
Non, RoboCop (2014) n'est pas la catastrophe annoncée. A condition (bien sûr) d'évacuer le film de Verhoeven de son esprit. Un exercice ardu. Conscient de l'inanité à la fois de son androïde et de son propre film, José Padilha se gausse de son propre personnage.

Vous pouvez donc oublier les mouvements incertains de l'androïde de Verhoeven contre une machine qui gesticule, tressaillit, court et défie même la gravité. Sur ce dernier point, le réalisateur n'évite pas toujours le ridicule. Clairement, les atermoiements du héros puis ses retrouvailles avec sa petite sphère familiale ne sont guères éloquents. Même remarque concernant certains personnages peu ou pas assez exploités. A l'image de Michael Keaton en mode cabotinage.
Quant à Joel Kinnaman, il ne parvient jamais à transcender ce héros hybride, nouvelle moraline de l'industrie technologique et consumériste. 
Finalement, cet androïde ressemble étrangement à l'univers qu'il propose : souvent fade, sans réelle consistance et incapable de passionner sur la durée. Pourtant, au détour de plusieurs séquences solidement troussées, José Padilha sauve ce remake de la catastrophe (encore une fois) annoncée. Rien de bien mémorable non plus. Côté action, le cinéaste se montre assez timoré, mais assure le minimum syndical. Bref, un remake assez énigmatique au final.
Une sorte de brouillon pas trop mal torché. En quelques mots : pas génial mais pas honteux non plus.

Note : 10.5/20

sparklehorse2 Alice In Oliver