Après une descente aux enfers marqués par les échecs commerciaux consécutifs de La Jeune fille de l’eau, Phénomènes, Le dernier maître de l’air et plus récemment After Earth, M. Night Shyamalan renoue enfin avec le succès. Au-delà de son beau score rapporté au box-office américain, The Visit marque aussi et surtout le retour du cinéaste à un type de film qui faisait le sel de son cinéma, à savoir le film d’horreur intimiste sous couvert de drame familial. Pouvons-nous pour autant parler de résurrection artistique ?
Dès les premières minutes, Shyamalan parvient à mettre en place une ambiance mélancolique qui détone agréablement dans le paysage de la production horrifique actuelle, et encore plus dans celui -très superficiel- du found-footage. Cette mélancolie se traduit de manière touchante à travers les caméras des deux jeunes protagonistes, qui par la réalisation de ce documentaire tentent de recoller les morceaux avec leur famille. De plus, le fait que la caméra soit ici utilisée en tant que documentaire (et non pas comme caméra-embarquée témoin de la situation) permet au cinéaste de soigner ses cadrages et d’éviter au maximum les plans migraineux en shaky-cam. The Visit s’autorise aussi quelques ruptures de ton bien senties, qui se traduisent uniquement par la mise en scène lors de formidables séquences volontairement déstabilisantes, à la lisière de la comédie et de l’épouvante pure. Malheureusement, les bonnes idées de Shyamalan se concrétisent au détriment de scènes plus poussives, banales, ou qui tout simplement ne trouvent pas de cohérence interne avec le concept initial. Aussi efficace soit-il, le dernier acte ne parvient pas vraiment (ou du moins laborieusement) à concilier les envies de Shyamalan, à savoir conclure son film sur une touche mélancolique, et toutes les contraintes consubstantielles au concept de base. Tout le film est ainsi à l’image de son climax : tiré par les cheveux, tantôt intense, tantôt bancal, mais profondément attachant.
Malgré un savoir-faire indéniable, The Visit n’en demeure pas moins extrêmement frustrant, tant on aimerait voir un réalisateur aussi brillant que Shyamalan déployer la pleine puissance de son cinéma. Mais il permet de croire à nouveau en son cinéaste, et c’est déjà beaucoup !