[critique] sicario

[CRITIQUE] SICARIO

Denis Villeneuve sait tenir en haleine le spectateur. Là est sa grande qualité. Dans Prisonners, cette quête de la vérité était magistralement sombre. Dans Enemy, impossible de lâcher ce puzzle tortueux au final étrange. Le réalisateur parvient à chaque fois à imposer son ambiance lente et étouffante, et ce dès les premiers plans.

Pour Sicario, il ne déroge pas à sa règle de conduite. L'introduction du film, puissante, implante un décor sale, méchant, macabre, qui annonce la couleur pour la suite. La photographie est magnifique, les plans aériens sublimes, le tout accompagné par un score des plus incommodants (dans le bon sens du terme) et d'un montage qui laisse apprécier l'ampleur de chaque scène, de la plus intimiste à la plus nerveuse.

Car malgré cette mollesse parfois un peu trop prononcé (dû entre autre à Kate Macer, son héroïne, mais on va s'occuper de son cas un peu plus loin), Sicario possède des moments d'une intensité redoutable, jubilatoire même, et sans artifice inutile. De l'anti-spectaculaire, qui donne l'impression d'assister à un film d'action ébouriffant, en démontre cette scène de l'embouteillage incroyablement fiévreuse. Un véritable tout de force.

Sans compter qu' Emily Blunt, Josh Brolin et Benicio del Toro sont vraiment impressionnants. Blunt arrive à donner vie à un personnage pas vraiment évident à faire exister (on va y venir, un peu de patience), Brolin et sa cool-attitude égaye parfaitement ce paquetage oppressant, et le charisme de del Toro amène brillamment l'ambiguïté de son rôle, tour à tour sympathique et inquiétant.

Pourtant, ce n'était pas facile de réussir un tel film avec une base aussi maigre que ce scénario. La guerre contre les cartels, la frontière du bien et du mal, être un loup ou s'éclipser : des sujets aussi bateau que vus et revus, et surtout à peine effleurer. Certes, l'intérêt n'est peut-être pas dans une énième démonstration d'un groupe de " héros " qui tente de faire renverser une organisation, alors qu'eux-mêmes ne sont pas des saints, mais on ne peut s'empêcher de penser que tout ça est assez vain, surtout quand le dernier quart sombre dans une idée totalement primaire, intensifiant justement ce côté " tout ça pour ça ".

Et rien ne s'arrange quand on repense au personnage d' Emily Blunt (Ah ! Enfin !). Seul femme dans cette équipe de gros bras, Kate se propose volontaire pour une mission dont elle se rend compte qu'elle n'a pas vraiment les infos. Elle qui devrait alors être sur le qui-vive et s'imposer un peu pour connaître toutes les réponses ne fait que subir tout le long, en suivant sans entrain le mouvement, et peine, comme dit plus haut, à exister. D'autant plus que ses moindres décisions personnelles l'emmène toujours au devant des ennuis. Certes, elle brille quand la situation l'exige, mais perd de sa superbe quand il s'agit de poser ses couilles sur la table. Pour être poli.

On passera également sur certains effets grotesques (le coup de l'élastique, franchement...) ou inutiles (l'histoire secondaire avec ce flic qui pionce et son gosse accroc au football), pour ne retenir que l'efficacité dont fait preuve Denis Villeneuve pour nous plonger dans ses films, et ce même quand le récit est loin d'être passionnant.

[CRITIQUE] SICARIOPOUR LES FLEMMARDS : Villeneuve plonge le spectateur dans un sujet hélas éculé, avec un personnage principal trop distant pour s'y attacher, mais son casting brillant, son ambiance étouffante et ses quelques scènes nerveuses font de Sicario une grande réussite.

Bande-annonce de Sicario :

FICHE TECHNIQUE

  • Sortie : 07 octobre 2015
  • Titre original : -
  • Réalisateur : Denis Villeneuve
  • Scénariste : Taylor Sheridan
  • Acteurs : Emily Blunt, Josh Brolin, Benicio del Toro...
  • Compositeur : Jóhann Jóhannsson
  • Genre : Thriller posey
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 2h