Samedi après-midi, avant de s’enfermer dans les salles obscures pour la suite du festival Court Métrange, on a eu la chance d’interviewer une partie de l’équipe du festival. Avec nous, Hélène et Steven Pravong (les fondateurs), Cédric Courtoux (co-directeur) et Benjamin Leblay (programmation).
Pouvez-vous nous raconter les événements qui ont marqué le festival Court Métrange depuis sa création? Comment décririez-vous l’ambiance de ce festival ?
Cédric Courtoux : Je pense que chaque année a sa particularité. Les moments marquants, j’aurais tendance à dire qu’il y en a chaque année. On est tous des passionnés du fantastique autour de ce festival. Ce qu’on propose aux gens, c’est comme de dire « Voilà, on est entre potes, on va se faire une soirée ciné ». Il y a un côté vraiment décontracté au cœur de ce festival, on instaure une ambiance « comme à la maison ». On travaille de manière professionnelle mais cela ne nous empêche pas d’avoir un ton léger.
Pourquoi avoir choisi les genres « insolite et fantastique » comme thématique du festival ?
Hélène Pravong : En fait, Steven et moi, avant de monter ce festival, on avait des métiers dans la réalisation et la production. Ce qu’on a pu constater ces 20 dernières années, c’est que dans tous les festivals où on allait, il y avait très peu de films de genre en sélection et quand il y en avait, ils étaient rarement récompensés voire pas du tout. On savait qu’il existait un vivier, qu’il y avait un vrai potentiel, qu’il y avait des réalisateurs qui avaient envie de parler de sujets de société divers et variés à travers le fantastique. Donc quand on est arrivé à Rennes, Steven m’a dit « Et si on montait un festival dédié au film de genre ? ».
Vous êtes le seul festival de courts métrages à intégrer l’European Fantastic Festivals Federation, pouvez-vous nous expliquer à quoi sert cette fédération ?
Hélène Pravong : La fédération de festival du film fantastique regroupe un certain nombre de festivals qui remettent chaque année un Méliès d’argent (un pour un long métrage et un pour un court métrage) lors leurs éditions respectives. Ces films récompensés par un Méliès d’argent concourent ensuite pour le Méliès d’or. On a souhaité adhérer à cette fédération et pour cela il y avait des règles à respecter : projeter des films en bonne qualité, avoir une programmation de qualité, avoir un public, qualité d’accueil des professionnels. Et on a eu 20/20. (sourire)
L’année dernière, vous avez reçu plus de 1200 films, c’est une somme assez conséquente de courts métrages à visionner. Comment se déroule la sélection des courts métrages en lice ?
Hélène Pravong : On a reçu un petit peu moins de films cette année, on a eu 1000. Cela reste assez conséquent. Il y a sept personnes dans le comité de sélection et vu qu’ils sont présents, ils vont pouvoir t’en parler.
Benjamin Leblay : Effectivement, on en reçoit beaucoup mais on divise cela entre chaque sélectionneur. Avant, on écrème car on reçoit toute une série de films qui ne rentrent pas dans la charte de Court Métrange, qui ne sont pas dans l’esprit du festival. Il y a donc une sélection assez sévère dès le début et ensuite c’est un peu selon les coups de cœur de chacun des sélectionneurs. Les sélectionneurs défendent ensuite les films qu’ils ont choisi devant le comité avant la validation. On regarde le film ensemble, on en discute.
Equipe organisatrice du festival Court Métrange.
Le président du jury de cette édition 2015 est Christopher Priest, auteur de romans et de nouvelles de SF, pourquoi ce choix ?
Steven Pravong : Il y a déjà un certain temps qu’on essaie de réfléchir à des passerelles entre la littérature fantastique et le cinéma. Il faut essayer de faire dialoguer l’ensemble des arts qui s’expriment à travers le fantastique. Avec Christopher Priest, on est allé puiser dans une littérature de référence qui a marqué son temps. De plus, c’est un esprit qui est indéniablement libre. Au sein de la communauté des écrivains de science fiction, d’anticipation, c’est quelqu’un qui, potentiellement, peut agacer ses contemporains. C’est un libre penseur, une personnalité très forte.
Vous disiez l’année dernière que votre rêve était d’avoir David Cronenberg (La Mouche, A History of Violence, Maps to the Stars) comme président du jury, est-ce toujours le cas ? Pourquoi ce réalisateur en particulier ?
Steven Pravong : Je pense qu’à partir du moment où on a imaginé le concept du festival, et bien je crois que j’avais déjà en tête d’avoir un président du jury comme David Cronenberg ou John Carpenter … ou Wes Craven mais maintenant c’est un peu tard. Mais David Cronenberg, on a un rapport très affectif, très affectueux avec l’ensemble de sa filmographie.
Court Métrange n’est pas uniquement axé sur sa programmation de courts métrages, il y a de nombreux événements organisés autour du festival : des masters class pour les scolaires, des conférences, des rencontres entre producteurs et réalisateurs, … Est-ce important pour vous d’organiser des événements annexes comme vous le faîtes ?
Steven Pravong : C’est effectivement important de montrer les différentes approches du fantastique. Les masters class sont des temps forts avec les scolaires car c’est notre petite contribution à l’éducation à l’image. De plus, les enseignants et la communauté éducative ont tendance à nous remercier pour ces moments. On a essayé d’organiser un certain nombre d’événements, pour donner un impact un peu différent, à la dixième édition de Court Métrange. Et on a pris une mauvaise habitude et on a gardé le concept d’organisation d’événements autour du festival, ce qui, bien entendu, fatigue l’ensemble de l’équipe. (rires) L’équipe s’est renforcée au fil des années et on a essayé de profiter des nouvelles compétences de chacun.
Le festival est déjà bien avancé, êtes-vous satisfait de cette 12 édition ? Avez-vous eu des coups de cœur pour certains des courts métrages diffusés ?
Benjamin Leblay : J’en ai plusieurs, en même temps, c’est difficile à dire car les films qu’on a séléctionné, on les a sélectionné parce ce sont des œuvres qu’on a voulu défendre. Chez nos amis britanniques nous avons quelques belles choses comme The Karman Line (d’Oscar Sharp) qui est une magnifique métaphore sur la maladie de longue durée. On a eu des bonnes surprises comme Teenland (de Marie Grahto). En animation, on a eu beaucoup de choses comme Symphony n°42 (de Réka Bucsi) qui était une belle claque. Je crois que globalement, on a un très très bon cru cette année.