L’inspiration

Par William Potillion @scenarmag

Ci-après, nous survolerons quelques œuvres majeures qui sont de véritables sources d’inspiration.

Orgueil et Préjugés de Jane Austen (1813)

Avec un charme féerique, la romance entre Elisabeth et Darcy se développe, vivifiée par le charisme de ces deux personnalités magnétiques. De froides réalités s’immiscent aussi sous la forme des rumeurs, de la suspicion, de l’argent et d’ingérences et de nombreux couples de cette gentry campagnarde des 18° et 19° siècles sont la proie de mauvaises romances (la recherche d’une sécurité financière et d’un statut social des femmes de cette époque ne facilitant pas la tâche des amours véritables et sincères).
Par la complexité des étapes qui la constitue, cette danse nuptiale se révèle avec intelligence et une telle précision que cette histoire pourrait presque servir d’initiation aux relations entre les gens. Finalement l’espoir d’un véritable amour entre Elisabeth et Darcy parvient à percer et nous nous surprenons à croire qu’ils vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours.

Le cœur révélateur de Edgar Allan Poe (1843)

Nous sommes immédiatement plongé au cœur d’un cauchemar. Nous sommes en compagnie d’un vieil homme qui possède un répugnant oeil de vautour. Du moins, c’est l’impression qu’en donne le narrateur de cette histoire à la première personne. Peut-être bien que Edgar Allan Poe nous questionne sur notre désir de tuer ou notre instinct de prédateur.
Un bavardage qui se veut anodin alors qu’un cœur palpite sans cesse de plus en plus fort : la culpabilité fait confondre les battements de nos propres cœurs avec ceux de nos victimes. La terreur suinte parce que l’ennemi, le méchant psychotique admirablement décrit par Poe est à l’intérieur de nous-mêmes. C’est une des histoires les plus terrifiantes qui soient et étrangement appréciée des enfants.

Les Aventures de Huckleberry Finn de Mark Twain (1884)

Ce qui est passionnant et remarquable (voire révolutionnaire pour l’époque) est le point de vue incroyablement  plausible de Huck sur le monde qui l’entoure et sa façon originale de s’exprimer au moment de la parution du livre. Le lecteur est pris dans cette descente du Mississipi en compagnie de Huck et de Jim. Il est émotionnellement impliqué dans les pérégrinations des deux amis (parfois vaudevillesques, parfois plus sérieuses). C’est une approche du duo et du road-movie. Ce qui est intéressant aussi avec le point de vue de Huck est qu’il nous est décrit les côtés les moins nobles de notre nature humaine, une description d’autant plus renforcée par le regard innocent de Huck.

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LE POINT DE VUE

La dame au petit chien de Anton Chekhov (1899)

Un homme un peu lassé de la vie qui trompe son ennui existentiel dans les conquêtes féminines commence une relation avec une jeune femme rencontrée dans une station balnéaire. Aucun des deux ne semblent croire en une relation durable. Pourtant, l’homme se laisse prendre dans  les filets d’un amour authentique.
C’est une histoire d’adultère mais racontée tout en nuances. C’est le cœur humain qui nous est décrit dans son aspiration tranquille et son incertitude. Le lecteur est véritablement dans l’attente de voir où les choses vont aller et le suspense recouvre l’atmosphère.

Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald (1925)

Tout comme le narrateur, nous sommes intrigués par Gatsby. Qui est-il ? D’où vient-il ? Que désire-t-il le plus ? L’insaisissable Daisy que l’argent que Gatsby possède ne lui permet pas d’acheter ? ou simplement le rêve ?
Gatsby le Magnifique est souvent décrit comme le reflet des années folles mais peut-être après tout que le lecteur apprécie que les gens riches ne sont pas nécessairement heureux. Ce qui est intéressant dans cette structure est qu’elle lie Nick, Tom, Gatsby, Jordan, Myrtle et Daisy pendant cet été 1922 comme autant de facettes qui renvoient une observation, un point de vue particulier sur cet univers si spécifique.

L’inspiration

Ces histoires entrelacent à la fois le divertissement et le sens. Il suffit de l’un de ces deux critères pour faire une bonne histoire mais il y a un avantage certain à jouer sur ces deux critères dans une histoire : c’est-à-dire apporter du sens tout en distrayant.
Ne cherchez pas cependant à écrire un classique : l’inspiration n’est pas faite pour cela. Ne vous mettez pas une pression inutile, c’est encore le meilleur moyen d’étouffer votre créativité.

Posez-vous comme défi de faire en sorte que votre lecteur ne puisse s’empêcher de tourner les pages et donnez-lui quelque chose qui va perdurer et se propager bien au-delà de votre histoire : divertissement et sens.
Si votre histoire fait écho chez votre lecteur après qu’il ait fini de la découvrir, vous avez évité la frustration. Et l’écho n’a pas besoin d’être une impression métaphysique pour que  la frustration ne s’installe pas.

Pour trouver l’inspiration,  choisissez une fiction que vous appréciez. En une phrase, écrivez la raison principale qui vous a fait tant aimé cette fiction particulière. Ne faites pas de comparaison avec d’autres œuvres. Ne faites pas non plus une prémisse. Vous devez fouiller en vous pour comprendre les raisons qui vous font apprécier cette histoire.

Lorsque vous avez identifié la raison  de votre passion pour cette histoire, listez plusieurs moyens que l’auteur a utilisé pour accomplir ce sentiment en vous ou du moins cet effet en vous. Cette opération est très subjective et vous n’avez pas non plus le besoin de vous livrer à une psychanalyse pour comprendre les raisons de votre engouement. Cette étude n’a de sens que par rapport à vous et après tout, il s’agit de votre inspiration, de votre muse pas de celle de quelqu’un d’autre. Vous essayez de vous accorder avec l’alchimie créative qui émane de cette histoire et avec le matériel ainsi déterminé, vous allez écrire votre propre histoire.