Au lendemain d’Halloween, on continue avec les films d’horreur et cette fois l’un des meilleurs remakes du cinéma. Avec La Mouche, David Cronenberg a enfin explosé sur grand écran.
Après une première adaptation en 1958 par Kurt Neumann avec Vincent Price, le producteur Stuart Cornfeld se dit qu’il serait bien d’offrir une nouvelle lecture plus moderne de cette histoire de savant un peu fou qui invente une machine permettant de se téléporter mais qui, suite à un incident, fusionne avec une mouche écrite à l’origine par George Langelaan. La Fox possédant les droits est ouverte à l’idée et il faudra quelques temps avant que le projet ne se concrétise vraiment, passant notamment entre les mains de Tim Burton. Mais, à une période où le studio est en plein chamboulements et où les tournages s’annulent, la Mouche tient bon et fini par trouver un réalisateur. Il s’agira de David Cronenberg qui, jusqu’alors, est resté dans un cinéma un peu underground et violent mais dont la renommée monte en puissance depuis Scanners, Videodrome et Dead Zone.
Le réalisateur canadien s’entour de son équipe habituelle et va revoir complètement le scénario pour le fondre avec ses idées et ses obsessions. En effet, avec La Mouche, nous avons bien le droit à tout ce qui intéresse Cronenberg, que ce soit la science dégénérée, une certaine obsession pour le sexe de manière malsaine et surtout un rapport violent au corps et à la chair. Des images qui sont le propre du réalisateur et qui vont ici pouvoir se concrétiser avec des moyens plus ambitieux tout en restant dans le cadre d’un film intimiste.
Car La Mouche reste toujours centré sur 3 personnages et dans un nombre de lieux qui tient sur les cinq doigts de la main. Nous y suivons donc notre scientifique, Seth Brundle, légèrement perturbé et solitaire qui tombe amoureux d’une jeune journaliste alors qu’il est en train de mettre au point une invention qui pourrait révolutionner le monde : la téléportation. Et pendant ce temps, l’ex de la journaliste fait des siennes pour séparer le couple. Mais l’expérience tourne mal et petit à petit, le corps Brundle commence à tomber en décrépitude alors que son mental est également atteint.
Le film peut alors se voir sous plusieurs angles et le premier est évidemment purement horrifique, le scientifique devenant un véritable monstre qui a de quoi en effrayer plus d’un grâce aux maquillages et effets spéciaux particulièrement remarquables à juste titre récompensés aux oscars. Il s’agit là d’une variante du mythe de Frankenstein au cours de laquelle le savant ne va pas créer un monstre mais bien se transformer lui-même en véritable monstre. Et c’est bien ce qui intéresse Cronenberg qui va nous montrer toutes les étapes de l’évolution physique et mentale de Brundle, de son obsession de plus en plus maladive pour le sexe et la puissance, jusqu’à la fusion humaine, mais aussi nous montrer la perte totale de son corps, de la perte de dents jusqu’à sa transformation totale en être difforme.
Mais il y a aussi une dimension profondément romantique dans ce film horrifique. En effet, la relation entre le scientifique et la journaliste est particulièrement touchante et dramatique. Comme si la Belle et la Bête tournait de plus en plus mal. Cette relation est d’autant plus touchante et dramatique que les acteurs, Jeff Goldblum et Geena Davis, parfaits, sortaient ensemble à l’époque, donnant alors à leurs scènes communes une véritable intensité, jusque dans le final qui voit la monstrueuse métamorphose finale de Brundle qui ne demande qu’à être abattu pour ne plus souffrir et faire souffrir les autres devant une Geena Davis vraiment tiraillée.
Histoire d’amour monstrueuse et mise en scène avec une véritable intimité, La Mouche surpasse donc son modèle en tout point, livrant une lecture beaucoup plus horrifique, intense et dramatique avec des moyens modernes qui ont permit de rendre justice à l’histoire. Mais c’est aussi une oeuvre purement Cronenbergienne qui peut cependant s’ouvrir alors à un public plus large, ce qu’a bien confirmé le succès du film à sa sortie. Encore aujourd’hui, l’interprétation du film et la qualité de ses maquillages rendent toujours le film passionnant et donc immanquablement culte.