Ce dimanche 15 novembre 2015, nous avons pu assister à l’avant-première de L’hermine, le dernier film de Christian Vincent, qui sortira ce mercredi 18 Novembre. Chronique d’un procès en cour d’assise vu du côté du président et des jurés, assorti d’une romance singulière, le long-métrage est porté à bout de bras par Fabrice Luchini, capable de transformer les dialogues les plus plats en chef d’œuvre, sans réussir à nous emballer.
Michel Racine (Fabrice Luchini) est un président de cour d’assise. Peu aimé de ses collègues, il dirige ses procès avec rectitude. Lors d’un procès, une ancienne connaissance, Ditte Lorensen-Coteret (Sidse Babett Knudsen), pour qui il a eut le béguin est choisie comme jurée.
L’hermine se débat entre deux faces, l’une étant la chronique judiciaire et l’autre étant la naissance des sentiments amoureux. Sous ce premier aspect, le film manque terriblement d’aspérité. Son approche naturaliste, presque documentaire, n’apporte rien de neuf à un genre éculé. Constituant les trois quarts du récit, la partie concernant le procès tente de faire dans la chronique sociale, et fait rire, presque à ses dépens, en tentant de multiplier les portraits de témoins caricaturaux. Nous sommes dans le Nord et la plupart des témoins semblent consanguins. Le juge et ces assesseurs esquissent quelques sourires entendus. Bref, avouons que l’on rit de cette misère humaine, prise inévitablement sous l’angle comique, mais pourtant dramatique. Nous ne sommes pas sur qu’il s’agissait du but affiché de Christian Vincent. Concernant les jurés, leurs doutes sont mis en avant sans panache, reposant essentiellement sur des artifices scénaristiques concernant le jeu de l’accusé plutôt que sur leurs considérations philosophique et humaines. Difficile d’égaler le chef d’œuvre de Sidney Lumet, Douze hommes en colère, sur ce principe.
Rien que de très banal dans le déroulement du film rappelant le meilleur (ou le pire selon le point de vue) des séries télévisuelles sur les coulisses des Palais de Justice. Du côté de la romance entre la jurée et le juge, le scénario mettant en scène une séduction feutrée peine à nous passionner pour ce sexagénaire tombé secrètement amoureux de son infirmière et se rêvant une seconde jeunesse après son divorce récent. L’hermine se laisse regarder jusqu’au bout pour le plaisir simple mais inégalable d’entendre Luchini réciter son texte avec l’émotion qu’on lui connaît. D’ailleurs, celui-ci ne faisant pas du Luchini, comme on pourrait dire, on attend avec impatience les moments où ressurgissent la bête, comme ce bel instant où il évoque le poème d’Antoine Pol popularisé par George Brassens : Les passantes. Moment gâché par la sonnerie du portable de la jeune fille de Ditte, Ann (Eva Lallier) et permettant une saillie sur cette génération gâchée par les nouvelles technologies. On se demande quand cessera cette querelle idiote de génération si prisée par le cinéma français de nos jours. Notons également la présence de Michaël Abiteboul que nous avions vu dans Jusqu’au dernier (et également dans Papa ou maman), meilleur en avocat qu’en flic.
Récompensé par un prix du meilleur scénario à la Mostra de Venise, Fabrice Luchini ayant quant à lui rafler le prix de la meilleure interprétation masculine, L’hermine n’en méritait certainement pas tant. Cette romance sans relief, ce procès sans profondeur particulière n’a ému ni notre cœur ni notre tête.
Boeringer Rémy
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