Crazy Amy, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Le Apatow nouveau, qui porte surtout la marque de sa scénariste et comédienne principale Amy Schumer arrive en salle après avoir été présenté sous les rires de Deauville. @JM_Siousarram revient sur Crazy Amy, enchanté.

C’est peu dire que Judd Apatow nous devait une sorte de petite revanche vis-à-vis de ses dernières productions cinématographiques, me murmurais-je au moment de m’installer dans l’immense salle du CID de Deauville pour mirer cette fameuse Crazy Amy. Démarrée en trombe avec le truculent et bien nommé 40 ans toujours puceau, qui en plus d’avoir l’honneur de mettre au jour un nouvel auteur de comédie, nous révèle sur grand écran le génial Steve Carrell, la carrière de monsieur Apatow en tant que réalisateur va être loin de faire l’unanimité alors qu’il produit hit sur hit au box office hollywoodien. Loin de se contenter d’amasser son pognon de manière pépère, Judd Apatow installe une main mise totale sur le rire chez l’Oncle Sam en découvrant tout un tas d’artistes issus du stand-up, Jonah Hill ou Seth Rogen, et surtout en y mettant une patte parfaitement reconnaissable dans les scénarios : l’art de mêler burlesque décomplexé et sujet contemporain et d’actualité.

Crazy Amy, c’est un peu tout ça à la fois et cela malgré l’absence d’Apatow au scénario pour la première fois dans une de ses réalisations. A sa place, Amy Schumer, qui ça tombe bien cumule aussi la casquette d’actrice principale du film, la fameuse follasse Amy. Amy qui ? Le pape de la comédie US se voue pied et main liés à une inconnue qui n’a pas franchi l’Atlantique avec ses émissions télévisées, alors même qu’il sort du tiède 40 ans : mode d’emploi. Trop long, trop mou malgré quelques foisonnements dont il a le secret, sa crise de la quarantaine nous a plus barbé qu’autre chose. Crispant. On se demandait presque si Apatow n’était pas entrain de devenir un clown triste, la mélancolie prenant le pas sur les gauloiseries.

D’où le choix d’Amy Schumer peut-on se réjouir après projection. Connue aux Etats-Unis comme l’une des comédiennes de stand-up les plus drôles et corrosives à travers son show Inside Amy Schumer (tout un programme), cette boule d’énergie, qui ne possède pas le physique stéréotypé de la blonde platine qu’elle est malgré tout, est disons le sans détour, l’atout maitre du film. A l’image de l’explosive Melissa McCarthy avec laquelle elle partage le dynamisme, la prestance et l’humour no limit, ou encore de Cameron Diaz pour sa féminité engagée et fière tout en assumant son sex-appeal, Amy Schumer nous décoche régulièrement la mâchoire comme il y avait longtemps que Judd Apatow ne nous l’avait pas fait.

Le reste de la distribution n’est pas en reste, même si l’histoire de cette working girl à la vie sentimentale désastreuse laisse peu de place aux seconds couteaux. A commencer par Bill Hader, le « prince charmant » de miss Amy, lui aussi n’a pas un physique de jeune premier, sans compter que son rôle de chirurgien ultra talentueux mais coincé n’en rajoute pas une couche dans la catégorie compliment. Et pourtant la magie est là, on pense au début de Steve Carrell, voir ceux de Jim Carrey, avec lesquels il partage le sens et le timing humoristique pince sans rire, les grimaces en moins. Ses nombreuses chroniques dans l’hilarant Saturday Night live y sont sûrement pour beaucoup dans cette maitrise. Le couple qu’il forme avec Amy est aussi mal assorti que touchant et beau à voir.

Rayon seconds rôles, on peut saluer les performances très convaincantes de Lebron James, le double champion NBA dans son propre rôle mais auquel Amy Schumer a donné un coeur d’artichaut à contre-emploi de sa carrure de géant. Tout bonnement surprenant et hilarant. Comme John Cena, l’ex-catcheur devenu action man, une montagne de muscle que miss Schumer transforme en métrosexuel limite gay (ou inversement).

Un jeu de jonglage avec les clichés qui, conjugué avec une réalisation qui dessert parfaitement l’écriture de son auteur, transporte Crazy Amy dans la cour des meilleurs comédies romantiques vues en cette année 2015. On en attendait pas moins de la part de Judd Apatow. Un film fait à quatre mains dont le mérite de son auteur aura été de donner les pleins pouvoirs à la révélation Amy Schumer. C’est aussi ça le talent d’Apatow, vivre dans son époque et découvrir ceux qui feront demain.