Christopher vogler : archetypes (1)

Par William Potillion @scenarmag

Pour Carl Gustav Jung, les archétypes appartiennent à notre mémoire collective. Ce sont des comportements, des modèles, des symboles, des types de relation que chacun d’entre nous renferme en lui-même et qui sont l’héritage d’anciennes personnalités que la race humaine a développées au cours des temps et des cultures.
Cette mémoire collective est intégrée de façon consciente et inconsciente dans les personnalités uniques qui constituent les individus.
Joseph Campbell identifia que lors de son aventure un héros était amené à rencontrer un certain nombre de personnages qui relevaient des archétypes.

A lire (sur les différentes étapes du voyage du héros) :
THE WRITER’S JOURNEY (LE VOYAGE DU HEROS)

 Ces types de personnages et les relations qu’ils entretenaient entre eux pouvaient donc être reconnus comme le héros (qui mène une quête ou une mission si vous préférez), un messager ou hérault qui a en charge l’appel à l’aventure pour le héros (c’est par son intermédiaire que le héros prendra conscience qu’une aventure l’attend même si dans un premier temps, il la refuse), un sage (homme ou femme) souvent dénommé mentor (c’est en effet un précepteur qui a la charge d’enseigner au héros les rudiments nécessaires pour mener à bien son aventure) qui offre au héros un objet magique (du moins qui possède une valeur symbolique tel le sabre-laser que remet Obi Wan à Luke), un gardien du seuil dont la fonction est de bloquer le héros et que celui-ci doit absolument contourner ou vaincre pour continuer l’aventure, un métamorphe qui est un compagnon de route dont la fonction est de désorienter le héros, de l’induire en erreur (cet archétype prend davantage de signification lorsqu’il est considéré à la manière de Dramatica qui identifie en lui un Influence Character, c’est-à-dire un personnage qui va tenter par tous moyens d’envoyer le héros vers une autre solution. L’Influence Character agit comme l’antagoniste mais sans réelles mauvaises intentions), le méchant qui agit souvent dans l’ombre pour nuire au héros. Il y a encore le trickster qui ajoute un côté comique à l’histoire mais dont la fonction consiste essentiellement à bouleverser le quotidien (ou l’équilibre mental) du héros.

A lire :
LE MENTOR
ARCHETYPE : LE TRICKSTER
ARCHETYPE : LE HERAUT

Il ne faut certes pas se sentir contraint ou confiner lorsqu’on choisit d’adopter un modèle pour conter son histoire. Il faut suivre la structure qui vous convient le mieux si tant est qu’il y en ait une qui vous sied.
Cependant, il est indéniable que les mythes et les contes de fées répètent inlassablement les mêmes types de personnages. Ce ne sont pas des stéréotypes car il est greffé sur ces personnages caractérisés par notre inconscient collectif des traits de personnalité qui les rendent uniques à chaque histoire.

Il n’en reste pas moins vrai que les archétypes présentent une constance remarquable au fil du temps et des cultures désignant ainsi des types de personnages que les conteurs d’histoire ont employés et continuent d’employer pour raconter encore et toujours de nouvelles histoires.

Ces archétypes permettent donc à un auteur d’articuler les éléments dramatiques de son histoire. Ils sont bien plus que de simples outils pour obtenir un effet dramatique ou vous sortir (deus ex machina ?) de situations où vous vous êtes empêtrées et dont vous ne savez plus comment en exfiltrer vos personnages. Ce sont de véritables forces que vous devez comprendre et gardez à l’esprit que ces forces sont les mêmes qui animent les mythes immémoriaux.

Si vous identifiez chez l’un de vos personnages un comportement archétypal, vérifiez que la présence de ce personnage dans votre histoire fonctionne tel que l’archétype l’induit. Si vous estimez par exemple que l’un des personnages a une forte propension à partager ce qu’il sait, êtes-vous bien sûr que vous avez développé chez lui des qualités de mentor ?
Si sa fonction est d’enseigner, est-ce que cette fonction pèse-t-elle de toute sa signification dans l’histoire ? considérez Obi Wan Kenobi, par exemple.
Les archétypes font partie d’un langage universel. Les personnages qui s’en réclament sont reconnus par les lecteurs. L’auteur doit donc en maîtriser la force et utiliser leur énergie pour établir un lien entre ses personnages et ses lecteurs. En d’autres mots, le personnage n’est pas un questionnement permanent pour le lecteur. Ce dernier sait à quoi s’attendre du personnage. Même avec l’archétype du métamorphe (lorsque celui-ci affiche ouvertement son statut), le lecteur sait qu’il faut s’en méfier, que c’est un être double.

Joseph Campbell (dans la lignée de Carl Gustav Jung) considère que les archétypes sont des constituants de la psyché de tout être humain. Inconsciemment ou non, les individus répètent un même type d’attitude dans une situation donnée. L’universalité de ces modèles rend donc possible de les partager avec les personnages de fiction qui peuplent nos histoires.
Les auteurs choisissent donc naturellement des personnages et des relations entre personnages qui résonnent de l’énergie des archétypes. Cela leur permet de créer des expériences dramatiques partagées par le plus grand nombre. Considérez le succès de Star Wars et vous comprendrez ce que nous cherchons à dire.