À l'instar de Stanley Kubrick le réalisateur Terrence Malick est devenu une sorte d'icône génial et incompréhensible depuis "La Ballade sauvage" (1973) et "Les Moissons du Ciel" (1978). Sa longue absence jusqu'à "La Ligne Rouge" (1998) et sa nouvelle régularité depuis "Le Nouveau Monde" (2005) ont fini par en faire un cas assez unique. "Knight of Cups" est en quelque sorte le troisième opus d'une trilogie thématique (quête de soi, sens à la vie, lien nature-homme...) après "The Tree of Life" (2011) et la déception "À la Merveille" (2012). Le titre du film dit à la fois tout et pas grand chose. Il fait référence à une carte du tarot (le chevalier de coupe) qui signifie changement amoureux, mais si elle est prise dans le mauvais sens elle signifie une personne qui triche (entre autres...)... Bref le titre est là pour montrer toute l'ambiguité du personnage principal de Rick, interprété avec charisme et sobriété par Christian Bale (déjà dans "Le Nouveau Monde"). Le reste du casting est impressionnant et offre ce qui se fait de mieux à Hollywood avec chez les hommes le vétéran Brian Dennehy, Antonio Banderas, Jason Clarke, Wes Bentley, Joel Kinnaman qui jouent tous des rôles presque fantomatique, assez insignifiant.
Amusant de noter que Jason Clarke et Christian Bale se retrouvent chez Malick après avoir été respectivement John Connor dans "Terminator Salvation" (2009) de McG et "Terminator Genisys" (2015) de Alan Taylor. Chez les femmes on a Teresa Palmer, Natalie Portman, Imogen Poots, Cate Blanchett, Freida Pinto, toutes plus belles les unes que les autres qui sont montrées comme les reines de ce casting où les femmes sont toutes magnifiques. Un vrai défilé de mode où on se met à sourire quand Rick fait absolument tout en costard (nager, plage, baiser, jouer au tennis...), comme une continuation de sa vie inepte et superficielle. Car le film de Malick est bien à l'image des deux précédents et pousse même l'étude plus loin, car on serait presque dans une thèse philosophique filmée. La mise en scène de Malick est une fois de plus à tomber à la renverse, une succesion de plans, d'images, de scènes qui touchent au sublime. Le réalisateur à tourner son film sans script, quasi tout le film est improvisé, quelques dialogues étaient donnés aux acteurs (hormis Bale) mais juste pour aider à se préparer. Cette prise de risque totale donne une osmose et un grâce ultime au film. Par contre cette fois le réalisateur impose un monde urbain auquel on était pas habitué, un monde urbain et froid à l'image de la vie finalement vaine de Rick. La religion a moins de place mais marque par sa bêtise (le sermon est d'une idiotie !). Par contre on sent toutefois un peu plus de longueur (10-15mn n'aurait pas été une mauvaise chose) que dans "The Tree of Life", certains plans restent surprenant voir laissent perplexe. Malick impressionne toujours par sa maitrise, son envie, la beauté de ses images, mais il se laisse sans doute parfois trop allé pour frôler de temps à autre la gratuité pompeuse du superflu. Néanmoins ça reste un film d'une poésie évidente qu'il faut prendre le temps de savourer.