Genre: policier, action (interdit aux - 12 ans)
Année: 1971
Durée: 1h42
L'histoire : Si la police de San Francisco ne remet pas immédiatement 200 000 dollars à un homme qui vient de commettre un crime, il recommencera au rythme d'un assassinat par jour. L'inspecteur Harry Callahan est sur ses talons.
La critique :
On ne présente plus Don Siegel qui fait désormais partie du panthéon du noble cinéma hollywoodien. On lui doit plusieurs films cultes et/ou classiques du cinéma, notamment L'invasion des profanateurs de sépultures (son seul film fantastique), Un shérif à New York, Le Dernier des Géants, ou encore L'évadé d'Alcatraz. Vient également s'ajouter L'Inspecteur Harry, un film policier dans lequel le cinéaste retrouve son acteur fétiche, Clint Eastwood.
Devenu le mentor de l'acteur, Don Siegel est malade sur le tournage et confie plusieurs séquences à son nouvel épigone. Clint Eastwood participe activement à la mise en scène. Le scénario du film s'inspire d'un tueur en série tristement célèbre, le tueur du Zodiaque, qui sévit à San Francisco dès la fin des années 1960.
Dans un premier temps, le script est proposé à Paul Newman, puis à Frank Sinatra, mais pour diverses raisons, les deux interprètes abandonnent le projet. Pendant quelques temps, le nom d'Irvin Kershner est évoqué. Mais le réalisateur doit lui aussi se désister. Le scénario arrive finalement entre les mains de Clint Eastwood et de Don Siegel. Hormis l'acteur, la distribution du film réunit Andrew Robinson, Harry Guardino, Reni Santoni, John Vernon et John Mitchum.
Au moment de sa sortie, L'Inspecteur Harry reçoit un accueil mitigé. Si le long-métrage cartonne au box-office, il reçoit néanmoins les foudres et les avanies de certaines critiques, beaucoup moins dithyrambiques que le public. Certains journeaux parlent d'un film fasciste qui prône la violence et la loi du Talion.
Lors de sa sortie en France, L'Inspecteur Harry est carrément interdit aux moins de 18 ans ! Incontestablement, le film dérange et provoque les anathèmes de la presse cinéma. En outre, le long-métrage repose essentiellement sur les épaules d'un Clint Eastwood qui interprète un flic aux méthodes expéditives, par ailleurs peu appréciées par ses supérieurs et ses nombreux contempteurs.
Néanmoins, fort de son succès, surtout aux Etats-Unis, ce premier épisode sera suivi par quatre nouveaux chapitres : Magnum Force, L'inspecteur ne renonce jamais, Le retour de l'inspecteur Harry et La dernière cible. Attention, SPOILERS ! San Francisco, au début des années 70. Un tueur se faisant appeler Scorpio tue une femme au hasard, et menace de recommencer si une forte rançon ne lui est pas remise.
L’affaire est confiée à Harry Callahan, un inspecteur de police atypique. Solitaire, n’hésitant pas à sortir son arme, il est mal considéré par sa hiérarchie qui lui confie les tâches dont personne ne veut. Il se lance alors dans une chasse à l’homme afin de mettre un terme à cette folie meurtrière. Autant le dire tout de suite : la réputation de film "fasciste" est totalement inappropriée.
C'est ce qu'explique Don Siegel lors d'une interview : "Harry est un puritain. C’est un homme amer. Il n’aime pas ceux qui violent la loi et il n’aime pas la façon dont la loi est appliquée. Ca ne veut pas dire que je lui donne raison." En effet, au grand dam du réalisateur, le film se focalise essentiellement sur la personnalité complexe et retorse de l'inspecteur Harry Callahan.
Si ce dernier n'apprécie guère les lois en vigueur aux Etats-Unis, il n'utilise son flingue que dans des situations extrêmes. En outre, le flic solitaire et taciturne se retrouve régulièrement dans des situations dangereuses, parfois grotesques, à l'image de cet homme anonyme qui tente vainement de se suicider, mais sauvé in extremis par un Harry à la fois amer et opiniâtre.
Mais très vite, le quotidien violent d'Harry Callahan est troublé par les meurtres d'un certain Scorpio, un tueur en série qui kidnappe une jeune éphèbe de 14 ans. Sur ce dernier point, le film de Son Siegel ne verse jamais dans l'angélisme. Au contraire, à travers les aventures de son personnage principal, le cinéaste signe une véritable diatribe contre une Amérique en plein marasme, désormais dépassée par ses propres criminels.
Hélas, quelques jours plus tard, la dépouille de la jeune femme dénudée est exhumée d'un puits sordide, isolé au beau milieu de nulle part. La séquence est filmée du point de vue de Harry Callahan, qui assiste à cette séquence d'une violence inouïe. Visiblement, l'inspecteur semble lui-même dépassé par cette même violence et la paupérisation d'une société en pleine déliquescence.
Tel est le message principal du film. Néanmoins, bien qu'il n'ait aucune revendication "fascisante", le discours est bel et bien réactionnaire. On relève tout de même des dialogues xénophobes avec un inspecteur qui méprise tout le monde ("les Rosbifs, les Ritals, les Youpins, les Métèques, les Négros, les Polacks, les Chinetoques" comme il le dit lui-même).
De surcroît, la justice américaine est considérée comme inefficace et trop clémente envers les assassins. Néanmoins, Don Siegel euphémise son propos par un humoir noir, parfois graveleux et égrillard. Face au redoutable Scorpio, nouveau symbole du mal et d'une Amérique confinée dans la violence, l'inspecteur Harry devient une sorte de Sauveur de la veuve et de l'orphelin.
A l'image des vingt dernières minutes du film avec ce tueur qui prend en otage un bus scolaire. Réalisé avec maestria, L'Inspecteur Harry n'en demeure pas moins une référence. Insolent, désespérement noir, en total décalage avec les films de son époque, le long-métrage a plutôt bien traversé le poids des années. Enfin, ce premier épisode reste aussi le meilleur chapitre de la saga.
Note : 17.5/20
Alice In Oliver