Genre: science-fiction
Année: 1957
Durée: 1h38
L'histoire : Au XXIIe siècle, le vaisseau spatial C 57 D se pose sur la lointaine planète Altair 4. Une expédition dirigée par le commandant Adams vient enquêter sur la disparition, vingt années plus tôt, du navire spatial Bellérophon et de son équipage. Les explorateurs sont accueillis par Robby, un robot ultra perfectionné qui les conduit jusqu'à la formidable demeure de l'énigmatique Docteur Morbius. Celui-ci, avec sa fille Altaira est le seul survivant de l'expédition précédente qui a été décimée par une force inconnue...
La critique :
Nouveau classique du cinéma et plus précisément un noble classique de la science-fiction et du space opera. J'ai nommé Planète Interdite, réalisé par Fred McLeod Wilcox en 1957. Au moment de la sortie du film, le cinéaste est lui-même surpris par le raz-de-marée et l'enthousiasme de la critique et de la presse cinéma. Un énorme succès qui va dépasser Fred Wilcox lui-même.
Avant Planète Interdite, le réalisateur est considéré comme un honnête artisan du Septième Art. Dans les années 1940, il devient le spécialiste des aventures de Lassie au cinéma. Sans plus. Cependant, Planète Interdite va asseoir définitivement sa notoriété. A ce jour, le film est toujours considéré comme l'un des monuments du cinéma de science-fiction aux côtés de 2001, L'Odyssée de l'Espace et Solaris (la version de 1972).
Presque soixante ans après sa sortie, Planète Interdite reste un film incontournable qui a plutôt bien traversé le poids des décennies. A l'origine, le long-métrage est l'adaptation d'une pièce de théâtre, La Tempête, de William Shakespeare, transposée ici sous la forme d'un space opera. Planète Interdite est aussi l'un des premiers films de science-fiction ayant bénéficié de la couleur et du format cinémascope. Le long-métrage va marquer durablement le genre et une époque pourtant en plein marasme, dans un contexte de paranoïa, de peur indicible et de Guerre Froide.
Planète Interdite va influencer de nombreuses productions de science-fiction, notamment la série télévisée Perdus dans l'espace, qui engendrera elle-même une adaptation cinématographique homonyme. La distribution du film réunit Walter Pidgeon, Anne Francis, Leslie Nielsen, Jack Kelly et Richard Anderson.
Attention, SPOILERS ! Au XXIIe siècle, le vaisseau spatial C 57 D se pose sur la lointaine planète Altair 4. Une expédition dirigée par le commandant Adams vient enquêter sur la disparition, vingt années plus tôt, du navire spatial Bellérophon et de son équipage. Les explorateurs sont accueillis par Robby, un robot ultra perfectionné qui les conduit jusqu'à la formidable demeure de l'énigmatique Docteur Morbius.
Celui-ci, avec sa fille Altaira est le seul survivant de l'expédition précédente qui a été décimée par une force inconnue... Le Docteur Morbius explique qu'il a découvert qu'il y a plusieurs milliers d'années, la planète était habitée par des êtres à l'intelligence exceptionnelle, les Krells, qui ont mystérieusement disparu, laissant derrière eux des traces de leur civilisation : un cube gigantesque de plusieurs kilomètres de côté capable de fournir une énergie incommensurable.
Dès ses premières minutes, Planète Interdite a le mérite de présenter les inimitiés. L'action se situe un siècle après notre ère. Désormais, les hommes sont parvenus non seulement à maîtriser mais aussi à dépasser la vitesse de la lumière ! Ils peuvent donc voyager "tranquillement" dans l'espace intersidéral et explorer de nouvelles contrées.
Un groupe de scientifiques atterrit sur la planète Altair 4. Sur place, il semblerait qu'une force mystérieuse et inconnue se soit emparée de la planète... Certes, en apparence, le scénario de Planète Interdite peut paraître assez basique et laconique. Pourtant, avec ce film de science-fiction, Fred Wilcox vient de réaliser le tout premier space opera philosophique, ésotérique, cosmologique et même psychanalytique.
Arrivés sur Altair 4, les cosmonautes font la rencontre du Docteur Morbius et de sa fille Altaira. Exilés sur cette planète, le professeur et sa fille étudient les vestiges d'une ancienne civilisation extraterrestre. Ainsi, le film délivre peu à peu ses secrets et nous transporte dans une sorte d'immense ascenseur qui contient des myriades de passerelles, d'étages et de réacteurs nucléaires.
Symboliquement, ce labyrinthe complexe et hétéromorphe, constitué de couloirs longilignes et interminables, préfigure le cerveau humain. Impossible de ne pas y voir une force destructrice et annihilatrice, à l'image de cette créature invisible et indicible qui semble dévorer de l'intérieur la planète. Impression renforcée par cet appareil de haute technologie moderne capable de sonder les pensées et les images véhiculées par le cerveau humain.
En ce sens, Planète Interdite s'inscrit dans la psychanalyse de Jung, en particulier la psychologie analytique. Certes, le Docteur Morbius apparaît comme un parangon de flegmatisme et de sobriété. Mais toute âme recelle un profond secret, un mal ineffable et inexpugnable qui se tapit au fond de son inconscience. Et c'est cette même source maléfique qui sourde des entrailles et des limbes d'Altair 4. Autrement dit, "quelles que soient les intentions des hommes, il existe toujours en chacun une part d’ombre, un consentement au Mal ; sans cesse à débusquer", selon les termes de la psychanalyse jungienne. Tel le propos de Fred Wilcox à travers Planète Interdite.
Inutile de préciser que ce chef d'oeuvre a probablement influencé Stanley Kubrick pour 2001, l'Odyssée de l'Espace et Andreï Tarkovski pour Solaris. A l'instar de Fred Wilcox, eux aussi nimberont leur scénario d'une dimension mentale et cosmologique, à la fois inextricable et inaccessible au cerveau humain.
Il ne faut pas se leurrer. Dans Planète Interdite, Robby le robot et tous les bijoux technologiques ne sont que des détails secondaires. Néanmoins, ils ont tout de même leur importance dans l'étrange poésie et mélancolie qui se dégagent du film. A cela, s'ajoute une musique énigmatique et électronique, digne des futures sonorités cybernétiques de notre époque actuelle.
Seul petit bémol, assez mineur par ailleurs, l'interprétation, bien que correcte, est loin d'être irréprochable. A l'image de Leslie Nielsen, incroyablement coi et presque figé dans le rôle de ce commandant de vaisseau à l'espièglerie redoutable. Mais ne nous y trompons pas. A ce jour, Planète Interdite reste probablement l'un des tous meilleurs space opera, même soixante ans (ou presque...) après sa sortie.
Note : 19/20