L’anniversé

Par Z. @Bizardbizard

Jésus-Christ Superstar, Norman Jewison, 1973

Ça y est, nous y sommes. Le compte à rebours est lancé, le calendrier de l'Avant préparé, la liste au Père Noël envoyé et le sapin est en cours d'achat (sauf pour ceux qui vont directement le couper en forêt). Bref vous l'avez compris Christmas is here !

Mais derrière toutes ces festivités matinées de cadeaux et de foi gras il y a une réelle raison de faire la fête, et ça n'est pas dû au Coca-Cola. Le 25 décembre est surtout et avant tout le B day de Jésus-Christ, roi des chrétiens et des hippies !

Afin de rendre à Jésus ce qui appartient à Jésus (soit son appartenance au star système), en l'an 1973, un groupe de jeunes personnes se revendiquant du mouvement dit " hippie " investirent un désert et en firent le théâtre de l'art chrétiennement impie en nous offrant une nouvelle lecture des Évangiles. Avec une approche pédagogiquement rock'n roll (comme si le Livre ne l'était pas déjà assez), s'appuyant sur leurs mots, leurs danses et leurs chansons cette bande de jeunes gens ont su remettre la barbe et les haillons au goût du jour en nous racontant ce qu'a été la vie de Notre Sauveur.

Bien qu'une comédie musicale made in 70's sur Jésus paraît être le nec plus ultra à voir pour toutes personnes censées, nous sommes au fait que de nombreuses personnes insensées tapis dans l'ombre des sapins ne se laisseront pas convaincre par ce pitch pourtant si résolument parfait. Voilà pourquoi Bizard Bizard vous offre, avec ses mots, Jésus-Christ Superstar sur un plateau (pas celui des fruits de mer ou encore celui qui accueilli la tête de feu Jean-Baptiste, on peut vous l'assurer).

Mais qui est Jésus ? Cet homme entouré par ses amis qui aime trainer au milieu des chèvres dans le désert. Cet homme, sain de corps et d'esprit à l'air épanoui, suscitant passion et émotion chez ses disciples, mais emplissant le cœur de crainte et de jalousie chez ses ennemis... Voilà tout est dit ; Jésus-Christ c'est d'abord une star malgré elle qui ne poursuit qu'un but : se comporter comme le digne fils de Dieu et sauver le monde. Seulement cette abnégation dans cette mission divine en énerve plus d'un, et en premier lieu le tristement connu Judas. Tandis que Jésus gambade dans les montagnes arides, la fleur à la main et le sourire aux lèvres avec tous ses copains, l'envieux Judas chante seul sur un caillou en adoptant des postures agressives tentant d'attirer l'attention de J-C en hurlant à pleins poumons " come on listen to me ". Mais le futur crucifié n'a pas que ça à faire de ses journées, non non. À peine remis de cette balade de la paix il doit déjà faire face à une situation de crise : sa tribu conspue une jeune femme répondant au nom de Marie-Madeleine (qu'on appellera MarieMad si vous le voulez bien) prostitué de son état. Bien évidemment l'un des instigateurs de cette échauffourée n'est autre que Judas. Après avoir ramené le calme dans la grotte, MarieMad et toute la bande tente de convaincre Jésus de prendre un day off, de fermer les yeux, de se relaxer et de reposer sa tête et ses pieds. Malheureusement c'est bien mal connaître le bonhomme et bien mal connaître la vie, car dans ces années là le refrain " relax don'do it " n'existait pas encore et certainement encore moins pour le fils de Dieu. Parce que pendant qu'on essaye de prendre du bon temps dans la grotte ça chauffe à Jérusalem, et ça, Jésus le sait. En effet, la soldatesse jérusalemienne commence sérieusement à s'inquiéter du phénomène Jésus-Christ. Coiffés de toque en latex et perchés sur des échafaudages, les hauts dirigeants font toner leurs voix de fausset et ne cesse de répéter " this Jesus must die ". Il n'en faut pas plus à l'intéressé pour se manifester aux portes de la cité afin de montrer qu'il n'a pas peur. Le postérieur vissé sur son fidèle destrier, un âne, brandissant amicalement des fleurs et toujours aussi entouré, Jésus parvient à terrifier le gang en latex désormais convaincu que cet homme est dangereux et qu'il doit die par le fait.

Après ce coup marketing réussi, la Jésus mania ne cesse de prendre de l'ampleur. A tel point que la magie s'en mêle et que des gens apparaissent (littéralement) en faisant des acrobaties, suppliant Jésus de " touch me, kiss me " tout en entrant dans une transe divine. Mais encore une fois tous ces appels à devenir une superstar n'intéressent pas Notre Sauveur, scandalisé par la dépravation capitaliste qui règne au marché de Jérusalem. Révolté par cette débauche impie il décide de détruire tous les stands, même celui des cartes postales, et d'en finir avec le trafic de grenades, d'armes et de poulets. À la suite de l'épisode dit " du marché ", Jésus, éreinté mentalement et physiquement, accuse le coup et tente de trouver la paix dans la solitude des montagnes désertiques. Encore une fois la vie ne lui laisse pas de répit. Alors qu'il tente d'apaiser son esprit et ses pieds, des lépreux lui saute dessus et l'oblige à écouter leurs doléances bien trop nombreuses (ce qui est normal puisqu'ils ont la lèpre).

C'est finalement à la nuit tombée que Jésus peut enfin rejoindre ses quartiers où la bonne MarieMad l'attend pour le border (et chanter une petite chanson sur les biens faits de la détente par la même occasion). Mais tandis que la future superstar fait un gros câlin à Morphée son funeste destin se met en marche. Judas l'infâme, aussi cupide que Marjolaine (de Greg le Millionnaire), se laisse convaincre par l'appât du gain et choisit la bourse et la vie en vendant Jésus à ses ennemis. S'en suit alors un pique-nique champêtre, que J-C sait bien être son dernier repas, où il explique à ses amis que manger de la pita revient à manger son corps et que boire du vin revient à boire son sang. Après une nuit sans sommeil à chanter son désespoir dans les octaves les plus aigues, Jésus est livré à Ponce Pilate et aux soldats romains, vêtus d'un marcel mauve, d'un pantalon de treillis et coiffés d'un casque de chantier. Mais ses dernières surprises terrestres ne s'arrêtent pas là car il est ensuite présenté au roi Hérode, sorte de golden boy cocaïnomane qui nourrit une vraie passion pour les bijoux bling-bling et le cabaret (et qui aime jeter des bagels sur les gens qu'ils n'aiment pas).

Après ces derniers rebondissement d'ordre vestimentaires et culturels, Jésus-Christ Notre Sauveur et fils de Dieu de son état affronta le fatal destin que l'on connaît tous.

Voilà comment de berger philosophe puis d'homme molesté et crucifié Jésus-Christ est passé au rang de superstar.

Et comme dirait sa bande, désormais plus connu sous le nom d'apôtres : " forever Amen ".

N.B : nous informons nos aimables lecteurs que tout ce qui vient d'être retranscrit est le fruit d'une histoire uniquement chantée et dansée. Nous comprendrons ainsi que pour les fans de dialogues l'expérience pourra être éprouvante, sans pour autant diminuer sa divinité.

" We gon' party like it's yo birthday " Jesus Chriiiiiiist!

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