Genre : horreur, gore, trash (interdit aux - 18 ans)
Année : 2014
Durée : 1h15
L'histoire : Kevin et Nord ont subi d'effroyables maltraitances durant leur enfance. Devenus adultes, ils ont sombré inéluctablement dans la drogue. Leur vie a basculé dans le chaos et la violence. Désormais, ils assouvissent une vengeance inextinguible par le biais de tortures qu'ils infligent à des personnes innocentes tout en filmant leurs exactions.
La critique :
Il y a quelques semaines, nous nous étions intéressé à Madness of Many, le premier film notable du réalisateur danois Kasper Juhl. J'avais eu sur cette oeuvre un avis mitigé au vu de la trop grande ressemblance tant sur le fond que sur la forme, avec la trilogie Vomit Gore de Lucifer Valentine. Il s'agissait donc de voir si le cinéaste nordique avait rectifié le tir en insufflant un propos plus personnel à son film suivant, Monstrosity. Précédé d'une réputation pour le moins sulfureuse, Monstrosity promettait d'envoyer du brutal, du très brutal même.
Pour certains, il devait même établir une nouvelle référence trash, en Europe tout du moins. Ah bon ? Ceux qui ont imprudemment claironné sur quelques sites spécialisés le côté parfois insoutenable du film n'ont pas dû voir beaucoup d'oeuvres extrêmes dans leur existence... Autant vous le dire tout de suite, ce film est à tout point de vue une grosse déception, pour ne pas dire un véritable naufrage.
De quelques côtés que l'on puisse l'aborder, on peine à trouver quoique ce soit à sauver de cette oeuvre pourtant très récente. Juhl ne pourra même pas se réfugier derrière le prétexte fallacieux d'un cinéma underground et donc de son manque inhérent de moyens. Il suffit d'aller jeter un coup d'oeil chez Marian Dora pour se rendre compte de ce que certains réalisateurs peuvent faire avec peu d'argent et beaucoup de talent. C'est donc un spectacle à la limite du pitoyable auquel nous avons droit et le désappointement est d'autant plus grand que Madness of Many avait laissé entrevoir de la part du réalisateur de réelles qualités artistiques. Attention, SPOILERS !
Kevin et Nord forment un couple de junkies complètement shootés. Enfants, ils ont subi de terribles maltraitances qui les ont détruit psychologiquement. Devenus adultes, ils se sont transformés en meurtriers sadiques qui torturent et assassinent gratuitement des innocents, tout en ne manquant pas de filmer la moindre de leurs exactions.
Le film débute par une intrusion ultra violente du couple chez des particuliers choisis au hasard, battus et achevés sans autre forme de procès. Puis nous suivons la dérive de deux jeunes gens au gré de leurs pérégrinations, entre beuveries et meurtres odieux. Les victimes sont pour la plupart des jeunes femmes qu'ils séquestrent avant de salement les torturer et de les exécuter. Les méfaits se déroulent dans une pièce insalubre au coeur d'une usine désaffectée.
Après qu'ils aient exécuté une victime, les deux tueurs se retrouvent confrontés à deux individus en train de voler leur voirture sur le parking de l'usine. Une bagarre s'engage au cours de laquelle Kevin et Nord tuent l'un des voleurs. Son compagnon (une femme en l'occurrence) sera torturée et achevée à coups de marteau. S'en suivra une dispute finale où Kevin, pris d'un énième excès de colère, étranglera Nord sans que l'on comprenne pourquoi. Clap de fin !
Là, c'est certain. On peut affirmer que Kasper Juhl souffre d'un sérieux manque d'inspiration et c'est plutôt inquiétant pour un jeune réalisateur ambitieux qui se veut être la relève du cinéma trash sur le vieux continent. En effet, Madness of Many souffrait déjà de copier (et de manière ostensible) les composantes essentielles de la trilogie de Lucifer Valentine. Ici, Juhl en rajoute une couche dans le plagiat en biglant furieusement du côté des August Underground.
On retrouve au détail près l'ensemble des éléments qui composaient l'univers malsain des films de Fred Vogel : le côté taré des psychopathes de service, une caméra qui donne le tournis et ce vrai faux snuff étalé complaisamment avec actes de barbarie à la clé, subis par des victimes expiatoires. Et comme si cela ne suffisait pas, l'actrice principale s'affiche avec un jogging flanqué d'un "Toetag Pictures" sur le dos. Toetag Pictures qui n'est autre que la boîte de production de Fred Vogel... A ce niveau, c'est carrément une déclaration d'amour au réalisateur américain !
Seules (pauvres) initiatives personnelles de la part du réalisateur danois, l'utilisation d'un noir et blanc craspec et surtout, d'un procédé qui déforme la voix des acteurs en leur donnant une tonalité d'outre-tombe. Du coup, les dialogues deviennent purement et simplement inintelligibles. Seuls des "fuck" répétés à l'envie (encore un point commun avec les August Underground) demeurent compréhensibles. Mais le très gros point faible de Monstrosity est qu'en dehors des scènes de meurtres, l'histoire confine au zéro absolu. Durant plus d'une heure dix de bobine, le spectateur doit subir une intrigue sans queue ni tête, où les protagonistes boivent des bières en poussant des cris de dégénérés, se "picousent" ou font de grands gestes obscènes face à la caméra. Franchement, on a connu plus passionnant comme scénario !
Le film n'a donc strictement rien à raconter ni aucun message à délivrer. Bref, l'oeuvre de Kasper Juhl patauge sans vergogne dans un marécage de médiocrité cinématographique. Les amateurs d'effets sanguinolents n'auront pas non plus de quoi se consoler puisque le gore est réduit à sa portion la plus congrue.
Un découpage de langue (bâclé), une rapide éviscération et un égorgement douteux constituent l'indécent menu des festivités. Quant au défonçage crânien à coups de marteau, il est juste à hurler de rire tant il est mal fait et que l'on peut voir aisément qu'il s'agit d'un mannequin. Non décidément, il n'y a rien à sauver de ce métrage auprès duquel les trois August Underground ressemblent à des chefs d'oeuvre. Quand on connaît la "qualité" pour le moins aléatoire de la trilogie américaine, cela donne une idée du niveau de Monstrosity... Le problème vient bien de Kasper Juhl car le bonhomme ne se comporte pas du tout en réalisateur mais en fan énamouré.
Ses hommages récurrents et appuyés aux oeuvres de Lucifer Valentine et Fred Vogel en deviennent égrillards et risibles. D'autant plus que les films (je devrais dire plutôt "les photocopies") du réalisateur danois sont très loin d'arriver à la cheville de ceux qu'il plagie. En tout état de cause, Juhl navigue à vue sans trop savoir où il va et il est clair qu'il n'a pas encore trouvé son propre style, son propre univers. Au final, prédomine un sentiment de désillusion concernant ce nouveau venu qui aura bien du mal à faire oublier ses débuts ratés dans la réalisation.
Côte : Navet