La nouvelle Nouvelle Vague vient d’Internet.
Les Dissociés est la bonne surprise de cette année qui ravit par sa qualité, tant dans le scénario que dans la réalisation. En effet, le collectif SURICATE (constitué de Raphaël Descraques, Vincent Tirel et Julien Josselin) propose une histoire originale qui casse – enfin ! – les codes du cinéma.
En effet, dès les premiers plans du film, ils arrivent avec brio à nous faire vivre la situation dans laquelle se trouvent Lily (Raphaël Descraques/Marsu Lacroix) et Ben (Julien Josselin/Yoni Dahan), en utilisant une caméra à la première personne (mimant à la perfection la démarche humaine) qui gravite autour de l’action des personnages. L’immersion est totale. Par ce procédé, le spectateur se retrouve lui-même dissocié et ne parvient plus à savoir où se situe exactement l’action. La mise en scène est ainsi tantôt conventionnelle tantôt originale et fonctionne très bien avec les nombreuses analogies entre la fin et le début du film. Cela s’associe à un rythme d’action relativement rapide qui ne laisse ni le spectateur ni les personnages le temps de se poser face à la menace que représente Milo joué par Quentin Bouissou. En plus des séquences en vue réelle, on peut également noter la présence d’une magnifique séquence d’animation (dessinée par l’auteur de bande-dessinée Boulet) qui renforce l’aspect dynamique du film. Cette animation rappelle notamment une autre séquence bien connue : celle de la 1ère partie du film Harry Potter et Les Reliques de la Mort.
Le jeu des acteurs est également très bon, reflétant avec justesse la personnalité des personnages qu’ils soient dans leur propre corps ou dans le corps d’un autre. De ce point de vue, le concept de swapping (échange des corps) est relativement ingénieux. C’est notamment Vincent Tirel (Magalie) qui tire le mieux son épingle du jeu puisqu’il parvient réellement à nous faire croire à la présence d’une petite fille coincée dans le corps d’un homme. Cela crée par ailleurs des situations hilarantes et décalées (Pom’pote quand tu nous tiens !) liées au décalage entre le physique de Vincent Tirel et la personnalité de Magalie. Tous les personnages sont ainsi attachants et leur histoire parvient à nous faire rire de manière subtile et sans trop en faire. Cela est dû en grande partie à un humour très bien dosé, tant au niveau de l’action des personnages que de leurs répliques.
Même le choix des costumes est parfaitement pensé. Les couleurs de Ben et Lily (bleu et rouge) permettent directement au spectateur de les distinguer et de marquer une différence de sexe entre les deux.
Ce choix dans la couleur des costumes rappelle notamment ce qui a été fait par Xavier Dolan dans son film Les Amours Imaginaires pour marquer l’opposition entre les personnages.
Par tous ces procédés, Les Dissociés transmet un message de fond intéressant et universel. L’objectif du film est, en effet, de nous interroger sur la question de notre identité en tant qu’homme ou femme et de qui nous sommes réellement. En créant l’idée même de dissociés, le film rend compte des points communs qui peuvent exister entre les hommes et les femmes et tente ainsi de montrer qu’il existe chez tout un chacun une part de féminité et de masculinité quel que soit son genre. Ce point est réellement visible quand Ben et Lily tentent chacun de tester les aspects du corps masculin et féminin. Ils vont même jusqu’à oublier leur propre identité sexuelle pour s’aimer sincèrement et réellement au-delà de toutes les barrières qu’ils s’imposent. Le concept du swapping interroge aussi le spectateur sur la possibilité de vivre par procuration (n’a-t-on jamais rêvé de vivre la vie d’un autre ?) et implicitement sur l’identité de genre.
Au final, Les Dissociés amène un message de tolérance vis-à-vis des différences de chacun mais également un message d’acceptation et d’amour de soi-même.
Ne serions-nous pas, au fond, tous les mêmes ?