DVD/BLU-RAY : L’ENFANT MIROIR : le désenchantement ★★★★★+♥

Une fable magistrale et déchirante sur l’anéantissement des rêves de jeunesse.

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Voilà 25 ans que L’Enfant Miroir a pris l’affiche sur nos écrans. Un anniversaire célébré aujourd’hui avec la ressortie exceptionnelle du film en DVD, dans une copie restaurée, disponible chez nous depuis le 7 décembre et supervisée par son réalisateur lui-même, Philip Ridley. L’occasion de (re)découvrir ce chef-d’oeuvre intemporel, à mi-chemin entre le conte horrifique et le drame rural. L’histoire est celle de Seth Dove, un petit garçon un brin agitateur qui trompe la morosité du quotidien avec ses deux copains et son imaginaire débordant. Un jour, il se persuade que sa voisine (Lindsay Duncan), une femme solitaire portant le deuil comme un masque insondable, est un vampire. De cet argument de départ, le long-métrage ouvre un horizon de croyances que seul le regard de l’enfant est à même de redéfinir. Un geste, un mot deviennent instantanément matière à fabulation. Il suffit d’entendre cette voisine ironiser sur son âge ou repenser à son défunt mari jusqu’à la transe pour donner raison aux élucubrations de Seth. Tout est affaire de point de vue et la mise en scène se garde bien de trancher tant que le mystère et le merveilleux font jeu égal avec l’intransigeance du monde réel.

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Néanmoins, le vice n’est pas exclusif aux adultes, il nous habite dès le plus jeune âge. Ridley le rappelle sans délai, lors d’une séquence inaugurale qui révèle les penchants morbides du petit garçon. Avec un savoir-faire exemplaire, le réalisateur évite le manichéisme facile et dresse le portrait d’un personnage éminemment complexe, à la fois trop conscient de sa violence et trop inconscient de sa naïveté. Dans cette Amérique profonde, vaste océan de blés où surnagent quelques vieilles bâtisses, les lignes de fuite sont nombreuses mais conduisent toutes à une même impasse. Chaque plan agit comme un leurre, les limites du cadre compromettant le désir d’évasion de Seth qui, après avoir couru à travers champs, s’en retourne constamment au chagrin qui se niche sous les toits. Chagrin de ses parents, qui se répugnent, ou de sa mystérieuse voisine donc, qui pleure toujours la mort de son époux. Seule l’arrivée de son grand frère (Viggo Mortensen) semble en mesure de conjurer la tourmente. Pourtant, sa première apparition, lointain mirage trop beau pour être vrai, nous signale déjà la désillusion qui attend Seth.

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Il faut aussi dire à quel point la chaleur du soleil joue un rôle hautement symbolique ici, en ravivant les odeurs indésirables ou en desséchant les corps. « N’oublie pas qu’on finit tous en cendres » martèle le père du héros, qui n’aura de cesse de s’hydrater. Ce sort funeste auquel doit se résoudre le petit garçon, au gré des disparitions successives dont il est témoin, culmine lors d’une dernière scène bouleversante où l’enfant crie sa détresse face caméra, dans le soleil couchant. L’heure est désormais aux ténèbres, l’horizon des croyances s’étant évanoui avec le déclin du jour. Une conclusion terrible, soutenue par l’interprétation mémorable du jeune Jeremy Cooper et la sublime partition de Nick Bicât.

Réalisé par Philip Ridley, avec Jeremy Cooper, Viggo Mortensen, Lindsay Duncan

Disponible en DVD chez Blaq Out depuis le 7 décembre 2015.