Il est de coutume de dire qu’on apprend des bons films comme des mauvais, mais La Mutante semble échapper à l’adage et fait figure d’imbuvable fiasco. A titre personnel c’est une bobine qui jouit du statut particulier de madeleine de Proust avariée, véritable étendard de mon aversion pour le cinéma d’épouvante. Le souvenir d’une peur persistante et singulière, et l’image très précise de mon père et moi nous rendant de notre vidéo club préféré un jour de terrible orage pour y louer la cassette. Le tonnerre grondait et le ciel était noir d’ébène, instaurant un climat anxiogène et ce avant même le début du film. Les quelques jump scares et l’ambiance horrifique de piètre qualité avaient suffit à me terroriser, tandis que les scènes de nues sont longtemps restées dans ma mémoire. J’étais ressorti de l’expérience chambardé et il aura fallu attendre quinze années avant que j’ai le courage de me plonger à nouveau dans le récit. Pour finalement réaliser que rien ne s’en dégage si ce n’est un vide abyssal. Tout y est plat et sans nuance, et même si on l’envisage comme un pur produit de divertissement c’est un échec total.
Les prémices laissaient pourtant augurer d’un film certes classique mais aux enjeux relevés et doté de protagonistes principaux sympathiques. Malheureusement le récit ne décolle jamais et le scénario se révèle digne d’un film pornographique des années 70. La plupart des prestations sont catastrophiques (mention spécial à Ben Kingsley qui fait les gros yeux comme personne), et seule la présence surprise d’une toute jeune Michelle Williams réjouit. Il ne transpire du film aucune envie, pas plus que la volonté de rendre crédible l’univers ou les relations entre les personnages. Les musiques sont insignifiantes et la technique est archaïque – entre costume d’alien miteux et effets spéciaux numériques scandaleusement pauvres.
Au niveau de la réalisation le film assure le minimum syndical et la caméra se contente de suivre l’action et les déambulations nudistes de la superbe Natasha Henstridge. Aussi simpliste dans la forme que dans le fond, le métrage souligne avec insistance les dangers de la curiosité scientifique et la propension des hommes à se prendre pour Dieu. Classique mais relativement pertinent.
Au final on retient du film son esthétique gore sympathique et une hybride extraterrestre fréquemment nue qui passe son temps à chercher le partenaire sexuel idéal. La Mutante est une catastrophe industrielle sans aucun respect pour les spectateurs, une œuvre vaine et superficielle à l’origine d’une saga funeste. Du navet véritable.