Steve Jobs, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Prenez le sujet « Steve Jobs« , associez-y les noms de Danny Boyle, Aaron Sorkin, Michael Fassbender et Kate Winslet et vous obtenez forcément un film intéressant qui a toute sa place aux oscars.

En 2013, tout juste 2 ans après la mort de Steve Jobs, un premier film lui était consacré et si la prestation d’Ashton Kutcher était tout à fait louable, le film n’était pas exceptionnel avec sa structure classique de biopic et la fin arrivait au moment où le film pouvait enfin décoller. Mais qu’importe, on savait depuis un moment qu’un autre film serait fait puisque qu’Aaron Sorkin planchait sur le scénario.

A l’origine, le scénariste devait retrouver son associé de the Social Network, David Fincher mais suite à quelques soucis de production (différents artistiques, changement de studio, choix d’acteurs fluctuant de Leonardo DiCaprio à Christian Bale…), c’est finalement Danny Boyle qui se voit mettre en scène l’audacieux script.

Et pour être audacieux, ça l’est complètement puisque le film ne se contente pas d’être un biopic mais un véritable exercice de style pour un scénariste. Car Steve Jobs est ici composé en 3 actes, chacun se déroulant dans les coulisses d’une conférence très importante qui a marqué la vie de Jobs et d’Apple. A chaque fois ce sont donc 40 minutes de discussions à un rythme effréné dans les coulisses, permettant de retrouver le génie échanger avec ses collaborateurs et donc de comprendre les personnages, leurs enjeux, leurs histoires sur plusieurs décennie seulement à travers des dialogues parfaitement écrits.

En 3 actes et 3 conférences (le révélation du Macintoch, la vengeance avec NeXT et la consécration avec l’iMac), le scénariste revient sur 3 périodes phares et s’intéresse aux personnages, à la révolution technologique, aux dimensions stratégiques et économiques de l’entreprise tout en offrant une dimension théâtrale presque shakespearienne à l’ensemble.

Il faut dire que Danny Boyle a parfaitement compris l’intention de Sorkin et va mettre ces dialogues en image de manière particulièrement intelligente. Ainsi, les 3 actes auront vraiment un traitement différent avec chacun son propre style d’image ou de musique mais gardant sans arrêt ses personnages debout, parlant tout en marchant en étant suivis par une caméra aux aguets. Il nous entraîne avec Steve Jobs dans les coulisses des théâtres où se jouent les moments les plus cruciaux de sa vie et nous ne pouvons qu’être absorbés par cette manière de faire.

Et cela ne pourrait être aussi marquant sans les prestations impeccables des acteurs qui arrivent à sortir les lignes de dialogues de Sorkin de manière naturelle et ce n’est pas évident quand on voit le rythme auquel ils sont soumis. Michael Fassbender, si il ne ressemble finalement physiquement que peu à Jobs, en restitue en tout cas toute l’intensité perfectionniste et machiavélique à travers son interprétation alors qu’en face de lui, Kate Winslet se démarque particulièrement en bras droit qui n’a rien d’inutile, peut-être la seule attache humaine du génie.

Avec Steve Jobs, Sorkin et Boyle nous offrent donc en plus de bons numéros de comédiens un biopic qui sort complètement de l’ordinaire et se révèle d’une intelligence et d’une audace à la hauteur du personnage. Bravo.