Jane got a gun, mais ne s’en sert pas…

Publié le 30 janvier 2016 par Rémy Boeringer @eltcherillo

Sous-genre cinématographique qui a révélé tant de grands noms, en commençant par Sergio Leone, Ennio Moriccone ou encore Clint Eastwood, madeleine de Proust pour beaucoup de cinéphile, le western est peu à peu tombé en désuétude. Ce ne sont pas l’hommage poussif de Tarantino ni le dernier film de Gavin O’Connor, Jane got a gun qui vont lui redonner du souffle. On attend comme le messie chaque nouveau prétendant en espérant y retrouver cette ambiance si particulière que l’on affectionne fait d’attente, de tensions et de gueules cassées ravinées comme les grands espaces américains. Jane got a gun mais ne s’en sert pas.

Jane Hammond (Natalie Portman) est mariée à Bill (Noah Emmerich), un bandit repentit, sous le coup d’une condamnation. Lorsque celui-ci rentre à la maison criblée de balle et incapable de les défendre, Jane Hammond n’a plus que le choix de se défendre elle-même. Elle va néanmoins chercher l’aide de son ancien amour, Dan Frost (Joel Edgerton).

Jane (Natalie Portman)

Jane got a gun, ça claquait comme une détonation dans le désert. On espérait tellement. Et on y a cru quand Jane fait tomber sa robe de bonne mère de famille pour revêtir un manteau long et qu’elle insère le colt de son mari à sa ceinture. On y croyait encore quand elle montait à cheval et partait à toute allure en direction de la ville. Et même lorsqu’elle achetait une quantité astronomique de munition et de dynamite. On en était sur, ça allait défourailler à tout-va entre deux duels épiques où les yeux parlent autant que les revolvers. Jane got a gun emprunte un autre voie et tombe dans le drame psychologique et les atermoiements des protagonistes sont sans fin. Dans un premier temps, on a trouvé ce background des personnages et ce parti-pris intéressant. On avait même envie d’en savoir plus. Mais on attendait toujours la libération cathartique que cela appelait. Avec une Jane outragée, une Jane brisée, une Jane martyrisée mais libérée, on la voyait déjà comme une icône féministe en puissance, prenant sa vie en main dans un univers machiste, et donnant du fil à retordre à tous ces sales mecs qui lui en ont fait baver. Nos espoirs ont été grandement déçus.

Dan (Joel Edgerton)

Hormis une révélation finale poignante qui a réussit à nous émouvoir un petit peu et bien que l’histoire d’amour des deux hommes avec Jane fut une bonne idée, replacée avec intelligence durant les temps troublés de la guerre de Sécession, la trop longue diatribe des deux anciens tourtereaux finit par lasser le spectateur et de captivante devient ennuyante au possible. Et puis, il y a un je-ne-sais-quoi de convenu dans les dialogues de Jane got a gun que l’on a finalement l’impression d’être allé voir un drame français sur un couple quinquagénaire plein de regrets. Plus énervant encore, Jane n’a rien de la femme forte que le titre du long-métrage et les premières minutes du film mettent en avant. Pire, elle n’est capable de rien si un homme n’est pas là pour la sauver. L’imagerie de la femme indépendante est terriblement mise à mal. Elle ne peut, au final, que passer entre les mains de l’un puis de l’autre. Elle est toujours la possession d’un homme. Et ne le remet jamais en cause. D’ailleurs, son calvaire est assez peu explicité, rapidement évoqué et dans le seul but de mettre en valeur Bill. Jane got a gun manque d’ambition et de panache et cela se reflète dans les représentations sociales convenus qu’il met en exergue.

John Bishop (Ewan McGregor)

Décevant est certainement le mot le plus juste pour qualifier Jane got a gun. Si l’on cherche du grand western, on s’endormira sur les considérations métaphysiques des personnages. Pour peu que l’on accroche à celle-ci, on finira par le regretter devant le peu d’originalité de celles-ci. Jane got a gun est un pétard mouillé que n’arrive à rallumer ni Portman ni Edgerton.

Boeringer Rémy

Retrouvez ici la bande-annonce :