La subversion est une affaire de point de vue. Quand une fiction se veut ou est reconnue subversive c'est qu'elle transgresse des règles que ce soit dans sa forme, dans son ton ou dans ses propos. Avec la standardisation des films à destination du grand public, l'estampille " subversif " est vite posée sur des œuvres qui en ont l'apparence mais qui ne le sont pas. Vulgarité, sexualité (pas trop quand même) et comportements " déviants " ne suffisent pas à rendre une œuvre ou une histoire subversive. La preuve en est une fois de plus acquise avec ce Dirty Papy porté par Robert De Niro et Zac Efron. L'ancien gangster de Scorsese et l'ancienne vedette Disney se partagent l'affiche de cette comédie qui mélange buddy movie et comédie romantique. Buddy movie plutôt déjà vu d'ailleurs entre un prude coincé et un jouisseur et comédie romantique encore plus déjà vue entre une belle américaine adepte de simplicité et un jeune homme qui a lui oublié ses valeurs fondamentales mais pas tant que ça au final. Très peu d'originalité donc, mais surtout une fausse subversion qui s'insinue de plus en plus régulièrement par les temps qui courent dans les productions audiovisuelles. La saga Very Bad Trip, Games of Thrones, les comédies d' Apatow, toutes ses productions se veulent subversives mais ne sont finalement qu'à l'image d'autres productions hyper formatées. Dans une Amérique puritaine, montrer ou même suggérer la sexualité semble subversif, mais il est important de se poser la question sur les valeurs que ces productions mettent en avant ou tentent de transgresser. Pour Dirty Papy, le personnage de De Niro attendra le décès de sa femme pour souhaiter une sexualité nouvelle. De même que son petit-fils incarné par Zac Efron ne s'autorisera à embrasser "l'amour de sa vie " qu'une fois ses fiançailles annulées. Le modèle de la famille, le sacro-saint couple n'est en rien remis en cause bien au contraire.
Une fausse subversion encore avec la vulgarité du personnage de De Niro, soi-disant étonnante pour un grand père. Sauf que non seulement il est ridicule de trouver " osé " un grand père qui dit des gros mots mais en plus le faire incarner par Robert De Niro, dont le langage fleuri est quasiment une marque de fabrique depuis ses premiers films avec Scorsese, est ridicule. Par Alec Guiness cela aurait peut-être pu être plus drôle. Les comportements " déviants " se résument ici à la prise de drogues en soirée et l'abus d'alcool. Faisant de toutes ces actions des actes cools, même si évidemment le héros regrettera par la suite d'avoir cédé aux tentations, sans heureusement de graves conséquences. Le film se paye même le luxe de faire une entorse à son propos en faisant du papy De Niro, ancien des forces spéciales, un personnage défendant un gay pris à parti pour son orientation sexuelle. Le personnage de Gran Torino de Clint Eastwood était beaucoup plus subversif car il était posé en personnage principal du film, presque en héros, malgré ses comportements racistes. Dirty Papy représente parfaitement une subversion d'apparat, ne transgressant aucun vrai code de société, aucune limite morale et bien au contraire restant dans les clous pour mieux finalement assener une morale blanche, protestante et anglo saxonne qui est bel et bien la marque d'une conformité du cinéma grand public américain dans ce qu'il a de plus bas. Reste à savoir ce qui a poussé le grand Robert De Niro dans ce projet, tout comme Zac Efron qui, loin de s'éloigner de son image de boy scout Disney ne fait que la renforcer un peu plus.
Titre Original: DIRTY GRANDPARéalisé par: Dan Mazer
Genre: Comédie
Sortie le: 3 février 2016
TRÈS MAUVAIS