Sortie le 3 février 2016 Durée : 2h02 Réalisation : Danny Boyle
Avec : Michael Fassbender, Kate Winslet, Seth Rogen, Jeff Daniels, Michael Stuhlbarg
Production : Management 360 - The Mark Gordon Compagny - Scott Rudin Productions
Distribution : Universal Pictures
Dans les coulisses de l'IWorld
Lorsqu'un réalisateur comme Danny Boyle s'intéresse à la vie d'un homme tel que Steve Jobs adaptée par un scénariste répondant au nom de Aaron Sorkin ; eh bien... voir ou voir, telle est la question.
Pour vous, Bizard Bizard a mis son autisme technologique de côté et est allé à la rencontre de Steve Jobs (le film bien entendu, non pas son fantôme).
À quelques minutes des lancements respectifs de Macintoch 128K (1984), NeXT Computer (1988) et de l' IMac (1998), les coulisses vont par trois fois devenir le théâtre de la vie et de l'esprit du créateur de l'IWorld : Steve Jobs (Michael Fassbender). C'est entre dialogues, dialogues et dialogues que l'on découvre petit à petit l'homme qui se cache derrière la machine.
Autant que vous le sachiez, Steve Jobs ne comblera pas vos lacunes en informatique, et tant mieux. Inspirés par la biographie écrite par Walter Issascon en 2011, Danny Boyle et Aaron Sorkin brossent le portrait d'une success story au travers de l'homme avant son œuvre. Steve Jobs met l'emphase sur la personne et sur l'intime. Au détour des conversations incessantes, le spectateur apprend à connaître le monsieur et comprend comment son esprit a influencé les produits Apple, parce qu'il faut bien le dire : Mac c'est lui. Ainsi le mantra de l'histoire repose sur le fait qu'aussi informatiquement technologique que l'œuvre soit, cela est d'abord le fruit, non pas que d'une réflexion, mais d'une personnalité humaine. Par sa mégalomanie, sa rigueur, son génie et son goût pour le design élitiste accessible à tous, l'hippie psychorigide qu'était Steve Jobs a réellement transmis sa philosophie à ses produits.
La structure même du film ne tourne qu'autour de ce principe là et met tous ses processus à son service. Les dialogues et le walk and talk incessant magistralement scénarisé par Sorkin sont sublimés par une mise-en-scène assez simple mais tout à fait boylesque. Pour couronner le tout ces deux esprits hystériques se complètent dans un domaine qui leur tient extrêmement à cœur : le théâtre. En effet, construit comme une pièce de théâtre le film ne cesse de faire référence à son aïeul : la surpuissance du dialogue, le décor (scène, coulisses), l'idée de représentation, mais aussi la forme de huis-clos qui lui ai donné. L'opposition des coulisses - où toute l'histoire se passe - et la scène - que l'on ne voit presque jamais - est la plus grande métaphore qui exprime le concept du film : Steve avant tout. Le succès, l'informatique et le monde extérieur en général ne son évoqués que par bribes au milieu des discussions et des conflits humains en petit comité; le film coupe d'ailleurs toujours avant les scènes de lancement des produits (c'est vous dire à quel point Danny et Aaron s'en balancent). Cet état d'esprit est aussi exprimé par la teneur des dialogues et le concept de répétition. Le spectateur assiste trois fois à la " même scène " avec des discussions qui tournent autour des mêmes choses répétées par les mêmes personnages, malgré les années qui séparent ces trois évènements. On voit ainsi une réelle envie de montrer la vie et l'humain ; les mécanismes du cerveau qui tournent et retournent en rond avant de, enfin, trouver le petit quelque chose en plus dans la réflexion pour faire avancer les choses. Un parallèle exprimant d'une certaine manière l'évolution de la technologie, qui se fait tout autant pas à pas.
Ce choix de mise-en-scène peut d'abord être assez déroutant pour le spectateur car il influe énormément sur le rythme du film. Mais après un assez long moment d'adaptation, le miracle opère peu avant le lancement de l'IMac - peut-être aussi parce que l'on réatteint notre zone de confort avec une machine que l'on connaît à une époque informatique que l'on a vécu. Cependant, reconnaissons le, il s'agit tout de même de la moitié du film. Les fans de Steve Jobs ou les passionnés d'informatique y trouveront peut-être plus leur compte, mais pour le spectateur lambda, force est de constater que la première moitié du film peut presque paraître pénible.
Bien heureusement, Steve Jobs à une constante qui mettra tout le monde d'accord : les acteurs. Fassbender et Winslet sont tout simplement incroyables : ils ne jouent pas, ils sont littéralement leur personnage. Ajoutez à ça un Seth Rogen sorti des clous des films comiques, un Jeff Daniels et un Michael Stuhlbarg tenant parfaitement leur rôle et vous obtiendrez le casting parfait.
Alors, Steve Jobs : pari réussi ? Un grand et un petit oui.
Un grand oui pour sa construction, ses acteurs, sa mise-en-scène et son esprit où la forme épouse le fond. Sans dire qu'il s'agit d'un film particulièrement audacieux, il reste néanmoins particulier et mérite donc d'être vu de ses yeux vus.
Un petit oui pour son manque de charge divertissante. Steve Jobs apparait comme un film passionnant à analyser sans toutefois être passionnant tout court. Nous ne blasphèmerons pas en invoquant le mot ennui, car nous n'en sommes quand même pas à ce point (et que nous tenons à la vie et craignons les fans de Stevie), mais nous ne ferons pas tourner les serviettes non plus.
Ainsi, Steve Jobs est un film globalement intéressant qui peut se targuer d'avoir plusieurs atouts majeurs dans sa manche.
L'avis de Bizard Bizard : allez-y à bonne allure.Crédits images: screenrelish.com (couverture) - theguardian.com - lefigaro.fr