Genre : drame
Année : 1994
Durée : 2h20
L'histoire : En 1947, Andy Dufresne, un jeune banquier, est condamné à la prison à vie pour le meurtre de sa femme et de son amant. Ayant beau clamer son innocence, il est emprisonné à Shawshank, le pénitencier le plus sévère de l'Etat du Maine. Il y fait la rencontre de Red, un Noir désabusé, détenu depuis vingt ans. Commence alors une grande histoire d'amitié entre les deux hommes.
La critique :
L'univers fantastique et horrifique de Stephen King a toujours inspiré le noble Septième Art. Que ce soit Carrie au bal du Diable, Shining, Dead Zone, Cujo ou encore Simetière, pour ne citer que ces exemples. Mais le célèbre grimaud n'a pas seulement oeuvré dans l'épouvante. On relève tout de même des opuscules plus personnels, notamment Stand By Me et La rédemption de Shawshank.
Ce dernier livre va être à nouveau l'objet d'une adaptation cinématographique avec Les Evadés de Frank Darabont en 1994. Avec ce film, le cinéaste va devenir le véritable spécialiste des adaptations des romans de Stephen King au cinéma. Par la suite, il réalisera La Ligne Verte (1999) et The Mist (2007). Certes, au fil des années, Les Evadés va s'octroyer le statut de film culte et même de classique du cinéma.
Pourtant, au moment de sa sortie, le long-métrage se solde par un bide commercial. A l'inverse, il obtient des critiques unanimement panégyriques. La distribution du film réunit Tim Robbins, Morgan Freeman, Bob Gunton, Clancy Brown, William Sandler, James Whitmore, Gil Bellows et Mark Rolston. Dans un premier temps, Frank Darabont présente à Stephen King un court-métrage adapté de sa nouvelle Chambre 312. Impressionné, l'écrivain exalte les qualités du cinéaste.
Le réalisateur décide alors de tourner Les Evadés. Le personnage d'Andy Dufresne suscite les convoitises de Tom Cruise et d'Harrison Ford. Mais Frank Darabont opte pour le charisme de Tim Robbins. Certes, à l'origine, le film s'inspire d'une nouvelle de Stephen King. Pourtant, au niveau de sa tonalité et de ses influences, Les Evadés n'est pas sans rappeler un autre grand film de prison et d'évasion, L'Evadé d'Alcatraz (Don Siegel, 1979).
Attention, SPOILERS ! 1947. Andy Dufresne, un banquier américain, est jugé coupable du meurtre de sa femme et de l'amant avec qui elle le trompait. Pour ce double meurtre, il est condamné à subir deux peines de prison à vie consécutives, et se retrouve emprisonné dans le pénitencier fédéral de Shawshank, dans l'État du Maine. Le directeur de la prison, Samuel Norton, un homme ambitieux et pétri de valeurs religieuses traditionnelles, est épaulé par un gardien-chef brutal et sans pitié, le capitaine Byron Hadley, qui ne craint pas de recourir à une violence aveugle afin de faire respecter la discipline.
Visiblement, Frank Darabont est passionné par l'univers carcéral. Quelques années après Les Evadés, il tournera La Ligne Verte, un autre film de prison, à la fois dramatique et fantastique.
Dans Les Evadés, point de lumière énigmatique et fluorescente ni de prisonniers aux pouvoirs extravagants. Le film se divise en plusieurs parties bien distinctes. Dans la première, le long-métrage se focalise sur un univers carcéral et atrabilaire qui applique des principes religieux et rigoristes. Finalement, sur la forme, Shawshank n'est qu'une variation de la prison d'Alcatraz : un directeur à la fois dévot et despotique, un garde-chiourme au comportement soldatesque et plusieurs portraits de divers prisonniers claquemurés dans des cellules vétustes et exigües.
Les Evadés fonctionne comme une sorte de roman déployé sur une longue pellicule (deux heures et vingt minutes de film tout de même). Le long-métrage s'ingénie à décrire le parcours escarpé d'un innocent, injustement condamné pour un meurtre qu'il n'a pas commis.
Certes, le scénario est à la fois classique et laconique. Pourtant, la magie opère. A aucun moment, le long-métrage ne sombre dans une soupe mélodramatique ou moralisatrice. Frank Darabont évite intelligemment tous ces écueils au profit d'un récit à la fois retors et espiègle. Le parcours d'Andy Dufresne s'apparente, dans un premier temps, à une sorte de martyr christique.
C'est la seconde partie du film. Poursuivi, malmené, morigéné et même violé par une bande de prisonniers libidineux, Andy Dufresne est régulièrement battu et rudoyé. Parallèlement, il s'accointe et sympathise avec Red (Morgan Freeman), un autre chiourme condamné à perpétuité. Les années passent. Frank Darabont humanise son récit. Andy Dufresne devient peu à peu un oracle au sein de cet univers carcéral.
C'est ainsi qu'il s'attire la confiance de plusieurs matons et même du directeur de la prison. C'est la troisième section du film. Après avoir rendu de grands services financiers et fiscaux à Shawshank, Andy Dufresne devient à la fois ce contrôleur des impôts et ce bibliothécaire érudit et avisé. Il prend même sous son aile un jeune prisonnier. Mais la vérité ne va pas tarder à rejaillir des murs de Shawshank.
Andy Dufresne est innocent. "Réellement innocent", une gaudriole qui se transforme peu à peu en combat pour faire triompher la vérité. Le récit progresse et se transforme en ode pour la liberté. C'est la quatrième et dernière partie du film. L'évasion peut enfin commencer... Dès lors, Frank Darabont décrit un long processus de creusage pendant plus d'une quinzaine d'années avec un petit taille pierre (à peine quelques centimètres).
Comme un symbole. Ce sont des posters ou plutôt des affiches de film qui vont farder cette astucieuse évasion au nez et à la barbe de toute l'administration de Shawshank. Mais Les Evadés, ce n'est pas seulement l'histoire ou le portrait de divers prisonniers. C'est aussi cette quête existentialiste. A maintes reprises, lors de conversations à priori triviales et oiseuses, Andy et Red dissertent, professent, hypostasient et ratiocinent sur leur vie à l'extérieur du pénitencier. Une chimère.
Tout du moins aux yeux harassés de Red. Toute évasion est impossible. A l'extérieur de cet enfer, la rédemption est vouée à l'opprobre et aux gémonies. A l'image de cet ancien forçat qui choisit de se pendre. En prison, ils sont des personnages importants. Dans la réalité, ils ne sont que des reclus pestiférés et répudiés par la société toute entière. Mais même à Shawshank, on n'enferme pas l'espoir. Un rêve qui se transforme en Empyrée terrestre.
Son nom ? Zihuatanejo, une petite ville du Mexique qui vient sonner le toxin de la révolte et de la liberté pour Andy Dufresne. Certes, les esprits chagrins pourront éventuellement pointer certaines approximations, ellipses et facilités. Par exemple, comment Andy Dufresne a-t-il pu s'évader sans attirer la moindre suspicion durant sa (très) longue incarcération ?
Mais peu importe, encore une fois, la magie fonctionne. Et Frank Darabont signe le ou l'un des meilleurs films de genre. Tout simplement.
Note : 17.5/20
Alice In Oliver