Ce mardi 2 février 2016, nous avons eu l’occasion de voir (ou revoir) sur grand écran le premier film d’une saga mythique du cinéma britannique, James Bond contre Dr. No de Terence Young, sorti le 27 janvier 1963. Aidé par les producteurs visionnaires Albert R. Broccoli et Harry Saltzman, qui à l’exception de Appelez-moi chef, ne produiront plus que des 007, et pour une poignée de figue, le réalisateur va mettre en place toutes les caractéristiques inoubliables qui feront le succès de la série.
L’agent spécial 007 (Sean Connery) est envoyé en mission en Jamaïque par le patron des services secrets britanniques, M (Bernard Lee). Il doit faire la lumière sur la disparition d’un de leurs agents et sur les activités louches d’un certain Docteur No (Joseph Wiseman).
Broccoli voulait un acteur anglais pour incarner l’espion popularisé par Ian Fleming. Sur les conseils de Terence Young qui l’avait déjà dirigé sur Au bord du volcan, il accepta néanmoins de recevoir un jeune écossais, Sean Connery. Séduit par l’audace de l’homme qui refusa de se soumettre à une audition, il le choisir. Un certain Roger Moore avait décliné l’offre. L’acteur fit sensation. A l’heure où grand nombres de vieilles licences sont réadaptées pour un univers plus sombre, y compris 007, surtout depuis Daniel Craig, il est fort agréable de retrouver l’ambiance bon enfant et presque insouciante, un poil kitsch, des origines. Une ambiance tout d’abord caractérisée par le flegme légendaire de l’agent secret dans lequel Sean Connery a figé dans la postérité cet audacieux mélange de classe et de cabotinage. La plupart des éléments centraux et inévitables des épisodes à venir sont là. Il y a déjà le cocktail vodka martini, le goût de Bond pour les casinos et ses inénarrables frasques amoureuses, l’espion accumulant les conquêtes. Seul manque à l’appel, le fameux bras droit du méchant qui est généralement plus coriace. On ne peut pas dire que le géologue trouillard, Professeur Dent (Anthony Dawson) en soit l’archétype. Les gadgets et les voitures de légende sont également absents.
Du côté des James Bond Girl, la dichotomie entre la méchante et la gentille est aussi à l’ébauche devant une méchante, Miss Taro (Zena Marshall) qui donne peu de fil à retordre aux héros et possède encore un second rôle qui s’amplifiera avec le temps. Tandis qu’Honey Rider, la gentille de l’histoire rentre totalement dans le stéréotype de la cruche incapable de s’en sortir sans un homme fort. Une interprétation très machiste que la licence atténuera de plus en plus. Autre aspect tout à fait primordiale de la série, la musique composée par Monty Norman trouva toute se force dans l’orchestration de John Barry. Encore aujourd’hui, elle est omniprésente dans tous les films et annonce l’apparition du permis de tuer comme le messie. Véritable pari réussi pour les producteurs, le film disposa d’un budget tout à fait moyen d’un million de dollars et en rapporta près de soixante. Il fut choisit d’adapter le sixième opus du romancier pour des questions financières. En effet, l’unité de lieu qu’était la Jamaïque réduisait considérablement les frais. C’est le génie du décorateur Ken Adam qui donna vie, avec du bric et du broc, à un quartier général de Docteur No, à la fois réaliste et novateur, rendant la menace tangible et sérieuse. Le choix de cet épisode était aussi une question d’universalité. Ici, Bond se bat contre le SPECTRE, une organisation internationale tentaculaire et mafieuse, qui a le mérité d’être transnationale, laissant de côté les querelles de la guerre froide pour s’ouvrir à un plus large public.
On ne le dit jamais assez mais, surtout lorsque que l’on a découvert les grands classiques du cinéma sur support vidéo, il ne faut jamais faire l’économie de les découvrir sur grand écran si l’occasion se présente. On se rend compte, par exemple, que le charme désuet de James Bond contre Dr. No agit toujours.
Boeringer Rémy
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