The Descent (Allégorie Platonicienne)

Par Olivier Walmacq

Genre : horreur, gore (interdit aux - 16 ans)
Année : 2005
Durée : 1h49

Synopsis : En plein milieu du massif des Appalaches, six jeunes femmes se donnent rendez-vous pour une expédition spéléologique. Soudain, un éboulement bloque le chemin du retour. Alors qu'elles tentent de trouver une autre issue, elles réalisent qu'elles ne sont pas seules. Quelque chose est là, sous terre, avec elles... Quelque chose de terriblement dangereux décidé à les traquer une à une.

La critique :

Vers le milieu des années 2000, le torture porn effectue son grand retour au cinéma. Saw (James Wan, 2004), Hostel (Eli Roth, 2006) et Détour Mortel (Rob Schmidt, 2003) sont unanimement louangés par les fans et la presse cinéma. Ils obtiennent un immense succès dans les salles et/ou en vidéo. La recette est basique et les sources d'inspirations exhument les mythes de Leatherface dans Massacre à la Tronçonneuse (Tobe Hooper, 1974) et de familles cannibales dans La Colline A Des Yeux (Wes Craven, 1977). En 2005, un nouveau concurrent vient sonner le toxin du genre horrifique.
Son nom ? The Descent, réalisé par Neil Marshall. Cinéaste, scénariste, producteur et monteur britannique, Neil Marshall débute sa carrière dès 1994 avec plusieurs courts métrages.

En 2002, il signe son tout premier long-métrage, Dog Soldiers. Contre toute attente, cette série B horrifique obtient plusieurs prix dans différents festivals. Les amateurs de séries B décèlent chez ce réalisateur un vrai potentiel. Potentiel enfin confirmé avec la sortie de The Descent trois ans plus tard. Contrairement à Hostel, Saw et Détour Mortel, le long-métrage ne sera pas décliné en une longue franchise emphatique et moribonde. Néanmoins, le film va tout de même connaître une suite, donc The Descent 2, cette fois-ci réalisé par les soins de Jon Harris en 2009.
Par ailleurs, ce dernier officie derrière le montage du premier chapitre. Suite au tournage de Dog Soldiers, Neil Marshall veut tourner un film d'horreur ambitieux, assez éloigné de la goguenardise de son précédent long-métrage.

En outre, The Descent doit s'inscrire dans une tonalité morbide, obombrée et eschatologique. Neil Marshall possède lui aussi de solides références. On retrouve évidemment l'inévitable Massacre à la Tronçonneuse, mais aussi The Thing (John Carpenter, 1982) et Délivrance (John Boorman, 1972). Le film doit symboliser cette "descente" (c'est le cas de le dire...) dans les limbes de l'enfer. Mais pas seulement.
The Descent doit aussi préfigurer cette fameuse dialectique philosophique platonicienne, soit L'Allégorie de la Caverne. Thème sur lequel nous reviendrons. A son tour, The Descent va inspirer de nombreux films d'horreur se déroulant dans une caverne ou alors dans un endroit cloîtré et isolé du monde moderne. Que ce soit The Cavern (Olatunde Osunsanmi, 2005), Slaughter Night (Frank van Geloven, 2008), ou encore Catacombes (David Elliot, 2007), tous ces films ne sont que de vulgaires ersatz du film de Neil Marshall.
En l'occurrence, le réalisateur sera lui-même dépassé par l'immense succès du film. Certes, il réalisera d'autres longs-métrages horrifiques par la suite, mais sans retrouver la fougue et l'originalité de The Descent, son meilleur film pour le moment. Neil Marshall s'adjoint les services d'un casting essentiellement féminin : Shauna MacDonald, Natalie Mendoza, Alex Reid, Saskia Mulder, MyAnna Buring et Nora-Jane Noone. Attention, SPOILERS ! En plein milieu du massif des Appalaches, six jeunes femmes se donnent rendez-vous pour une expédition spéléologique.
Soudain, un éboulement bloque le chemin du retour. Alors qu'elles tentent de trouver une autre issue, elles réalisent qu'elles ne sont pas seules. Quelque chose est là, sous terre, avec elles... Quelque chose de terriblement dangereux décidé à les traquer une à une.

Certes, en apparence, le scénario de The Descent est de facture classique et laconique. Finalement, le film signe le grand retour de l'horreur des années 1970, celle de John Boorman avec Délivrance, savant mélange entre l'aventure et le survival décérébré. Toutefois, The Descent prend ses distances avec son auguste modèle. Les hommes ont été supplantés par une distribution essentiellement féminine. C'est d'ailleurs l'introduction du film, pour le moins funeste.
Suite à un accident de la route, Sarah (Shauna MacDonald) voit son mari et sa fille mourir sous ses yeux. Direction l'hôpital psychiatrique. Son destin sera à jamais marqué par cette tragédie. Première plongée dans les ténèbres. Un an plus tard, Sarah est de retour vers la lumière. Pas pour longtemps... Ses copines organisent alors une expédion spéléolgique dans une grotte des Appalaches (je renvoie au synopsis).

Seconde plongée dans les ténèbres. Dès lors, la tension monte crescendo. Neil Marshall joue habilement avec nos angoisses archaïques : claustrophobie, achluophobie (la peur du noir) et acrophobie (la peur du vide). Des peurs primaires et animales justement symbolisées par l'apparition impromptue de créatures voraces. Le cauchemar peut enfin commencer. Et nos monstres anthropomorphiques ne font pas de prisonnier. Neil Marshall accentue cet état permanent de frousse par le biais d'une caméra subjective. Pantoise, Sarah assiste à la mort et au supplice de l'une de ses copines.
Encore fragilisée par les cicatrices du passé, la jeune femme va néanmoins réveiller la bête qui sommeille en elle. La caverne de Neil Marshall se transmute subitement en Allégorie Platonicienne.

Face à ces créatures carnassières qui se cachent dans la pénombre, chaque protagoniste doit affronter ses propres angoisses. Chaque personnage doit s'armer de courage et imaginer une éventuelle sortie ou trappe menant vers l'extérieur. Retour vers le passé. Retour vers la notion de mémoire avec ses corollaires. Le vrai monstre de cette caverne comminatoire, ce ne sont pas ces créatures dolichocéphales, mais cette humanité en proie à ses peurs reptiliennes.
Les armes à la main, Sarah ferraille avec ces nouveaux "hommes" des cavernes, les expédie dare-dare au cimetière, assiste impuissante au glas de chacune de ses amies... A l'exception de Juno (Natalie Mendoza), la rivale de Sarah. Le vrai combat peut enfin commencer... Sur ce dernier point, Neil Marshall confère à son film deux conclusions différentes : une fin américaine (celle qui sera reprise pour The Descent 2) et une fin beaucoup plus subtile. La sortie de la caverne prend à la fois la forme d'un fantasme, d'une réalité et d'un délire onirique. La peur cède sa place à l'hystérie générale et à la neurasthénie mentale.
Condamnée à affronter les créatures et à subir tout le poids de son passé, Sarah devra supporter toute sa vie le souvenir de sa fille défunte... En l'état, difficile d'en dire davantage. Mais on tient là le ou l'un des meilleurs films d'horreur de ces dix dernières années.

Note : 16.5/20

Alice In Oliver