Genre : fantastique, aventure
Année : 1933
Durée : 1h40
L'histoire : Figurante sans travail, la blonde Ann Darrow est engagée par le réalisateur Carl Denham pour être la vedette de son prochain film. Le Venture, le navire commandé par le capitaine Englehorn et qui comprend toute l'équipe, atteint Skull Island, une île mystérieuse où vivrait une créature légendaire vénérée par les indigènes et appelée King Kong. Durant le voyage, Ann tombe amoureuse de John Driscoll, le second du bateau. Une fois débarqués, les explorateurs sont aussitôt repérés par les indigènes et font marche arrière. Mais ces derniers enlèvent Ann, la "femme aux cheveux d'or", et l'attachent pour l'offrir en sacrifice à King Kong. Au moment où ses compagnons arrivent pour la délivrer, un singe gigantesque saisit la jeune fille et disparaît dans la forêt. Denham et ses hommes se lancent alors à la poursuite de King Kong.
La critique :
On oublie souvent de le mentionner. Mais avant de réaliser King Kong en 1933, Ernest B. Schoedsack a déjà officié derrière la caméra. Un an auparavant, il signe un autre classique du noble Septième Art, Les Chasses du Comte Zaroff. Grisé par l'immense succès de son gorille anthropomorphique (thème sur lequel nous reviendrons), Ernest B. Schoedsack réalisera (par la suite) de nouvelles productions simiennes : Le fils de Kong (toujours en 1933) et Monsieur Joe (1949).
L'idée du scénario de King Kong vient de Merian Caldwell Cooper (qui participe également à la réalisation du film) et d'Edgar Wallace. Surtout, l'histoire s'inspire d'un autre grand classique du cinéma fantastique : Le Monde Perdu, un roman d'Arthur Conan Doyle publié en 1912 et adapté par les soins d'Harry O. Hoyt en 1925.
Avec King Kong, Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack inventent un nouveau mythe : ce gorille anthropomorphique (encore une fois), dont les racines profondes ne sont pas sans rappeler celles de Victor de l'Aveyron, l'enfant sauvage. Cette figure primitive et simienne est-elle capable de s'adapter et de vivre dans notre époque moderne et "civilisée" ? A moins que ce ne soit l'inverse.
Les vrais sauvages, ce sont ces hommes mercantiles et capitalistes qui recherchent avant tout le lucre et l'appât du gain. Toujours en 1933, Ernest B. Schoedsack réalise une suite, Le Fils de Kong, dans la foulée. Mais le film essuie un véritable camouflet. Néanmoins, King Kong va connaître de nombreux remakes et succédanés. Par la suite, John Guillermin et Peter Jackson s'approprieront le gorille géant dans des versions différentes.
Quant au film d'origine, il ressortira dans les salles en 1938 (à la veille de la Seconde Guerre Mondiale) et en 1956, souvent dans des versions caviardées. Pour la petite anecdote, il existe une version (introuvable) du film avec une séquence censurée, qui montre quatre marins se faire dévorer par des araignées géantes. A l'instar du Monde Perdu, King Kong peaufine et affine (si j'ose dire) la technique de la stop-motion (image par image). Au-delà de sa créature monstrueuse, King Kong, c'est aussi un travail technique, exigeant et finalement monstrueux d'ingéniosité.
La distribution du film réunit Fay Wray, Robert Armstrong, Bruce Cabot, Frank Reicher et Sam Hardy. Attention, SPOILERS ! Dans les années 1930, le réalisateur Carl Denham envisage de tourner un film sur la mystérieuse « Skull Island » après être entré en possession d'une carte mentionnant son existence au large de Sumatra.
Après avoir embauché à New York une jeune femme au chômage, Ann Darrow, Denham embarque avec son équipe sur le navire SS Venturecommandé par le capitaine Englehorn, qui fait route vers l'Océan Indien. Durant le voyage, Ann tombe amoureuse du second de l'équipage, Jack Driscoll. Les explorateurs découvrent bientôt Skull Island, bout de terre peuplé d'animaux préhistoriques féroces. Après avoir interrompu une cérémonie indigène, l'équipe de Denham retourne à bord.
Mais les autochtones enlèvent Ann sur le cargo pour la donner en sacrifice à leur Dieu Kong, un monstre gigantesque. Driscoll et les autres marins se lancent aussitôt sur ses traces. Plus qu'un mythe, King Kong reste avant tout une créature forte en symboles.
Au-delà de son aspect anthropomorphique (je sais, je me répète...), la taille de la créature dolichocéphale varie au cours du film. Sur l'île, sa taille est d'environ six mètres pour atteindre sept mètres dans la ville, et finalement la taille de vingt mètres sur l'Empire State Building. Pourquoi ces variations au cours de cette pellicule ambitieuse ? Probablement pour incarner ce capitalisme destructeur qui se regimbe contre l'homme lui-même et son esprit vénal.
Rappelons que le long-métrage sort dans une époque troublée. Nous sommes en 1933 en pleine crise financière et surtout à l'apogée du nazisme. Le capitalisme a transformé l'homme en producteur. A contrario, ceux qui détiennent le capital sont des chercheurs, des aventuriers et des scientifiques, donc ceux qui vont créer la bombe atomique bien des années plus tard.
Encore une fois, King Kong s'inscrit dans la logique du Monde Perdu dont il reprend les codes et le schéma narratif : l'organisation d'une expédition, l'arrivée dans une île inconnue du monde, une peuplade d'indigènes sauvages et bellicistes (à ce propos, certains contempteurs jugent le film xénophobe et/ou idéologiquement douteux), un gorille géant qui s'empare de la "Belle", une série d'aventures et de pérégrinations dans une jungle préhistorique, la capture de l'animal, le retour dans notre monde moderne ; puis un monstre qui s'insurge et ravage toute la ville.
La partie se déroulant dans la jungle est probablement la plus impressionnante et la plus réussie. Ernest B. Schoedsack multiplie les écueils et les inimitiés : un stégosaure aux incroyables rotondités, des lézards affamés et le fameux tyrannosaure font partie des nombreuses réjouissances.
Certes, certains esprits chagrins tonneront contre l'aspect un peu vieillot et probablement obsolète du film. Les fans d'effets spéciaux visuels et modernes n'y verront qu'un objet désuet. Pourtant, ce King Kong de 1933 possède une certaine poésie, un charme ineffable et une grande mélancolie. A l'image de son gorille de service, la vraie star du film. A tel point que la créature oblitère les acteurs humains du film...
Clairement, on oubliera la prestation dissonante et "cacophonique" de Fay Wray, probablement payée pour hurler le plus fort possible devant la caméra. Une tâche dans laquelle l'actrice excelle... Pour l'expressivité et le côté émotionnel, l'interprète pourra réviser sa copie. Néanmoins, on tient là une véritable pépite cinématographique. King Kong, c'est aussi l'expression d'une société moribonde : des capitalistes fallacieux, une ville en pleine anomie et un gorille qui ravage une société moderne condamnée à la déréliction. Voilà pour les thématiques sous-jacentes de ce grand classique du cinéma fantastique.
Note : 18/20