Genre : action, boxe 
Année : 1982
Durée : 1h39

Synopsis : Rocky Balboa est aujourd'hui un champion respecté, après ses deux victoires contre Apollo Creed. Mais lorsqu'il perd contre un nouveau venu sur le circuit, c'est Apollo Creed lui-même qui va venir à sa rescousse et lui redonner le goût du combat et de la victoire. 

La critique :

La carrière cinématographique de Sylvester Stallone débute dès 1970. A l'époque, l'acteur, encore méconnu du grand public, subsiste et effectue quelques petits rôles dans Klute (Alan J. Pakula), Bananas (Woody Allen) et Les mains dans les poches (Martin Davidsen et Stephen Verona). Parallèlement, il obtient le rôle principal dans des productions de seconde zone, notamment dans un film érotique, L'Etalon Italien (Morton Lewis). C'est durant cette période que Sylvester Stallone écrit le scénario de Rocky, soit l'histoire d'un boxeur minable qui rencontre Appolo Creed, le champion du monde en titre.
Réalisé par John G. Avildsen en 1976, le premier chapitre obtient un immense succès dans les salles et remporte trois Oscars. Etrangement, Rocky premier du nom ressemble au parcours cahotant de son acteur principal.

Sylvester Stallone vient d'accomplir et de réaliser le rêve américain. L'acteur triomphe désormais au box-office. Surtout, il vient de créer un personnage hors du commun. Sylvester Stallone tient enfin le rôle de sa carrière. Rocky 2, sorti en 1978, s'inscrit dans la continuité de son prédécesseur. Toutefois, la situation a changé. Rocky Balboa n'est plus cet enfant de la plèbe, mais une vedette du ring prêt à nouveau à ferrailler avec Appolo Creed. Désormais, le boxeur et l'acteur (finalement les deux se ressemblent) se retrouvent sous la lumière des projecteurs. En 1982, la carrière de Sylvester Stallone prend un tournant rédhibitoire. La même année, non seulement il reprend les gants de son personnage fétiche dans Rocky 3 - L'Oeil du Tigre, mais il se retrouve également dans la peau d'un ancien soldat du Vietnam, dans Rambo (Ted Kotcheff). Le second grand rôle de sa carrière.

En l'espace de six petites années, Sylvester Stallone est donc passé de la populace au vedettariat. Une gloire et une consécration qui viennent auréoler un parcours erratique et chaotique. Telle est la dialectique de Rocky 3 - L'Oeil du Tigre. Après des années de disette, Rocky Balboa se retrouve lui aussi sous les projecteurs. La distribution du film réunit évidemment Sylvester Stallone (également réalisateur du film), Mister T., Talia Shire, Burt Young, Carl Weathers, Burgess Meredith, Tony Burton et Hulk Hogan. Attention, SPOILERS ! Après sa victoire contre Appolo Creed, Rocky Balboa est maintenant champion du monde. Devenu riche et respecté, il néglige les entraînements et s'est très vite embourgeoisé.
Il défend plusieurs fois son titre et reste invaincu. Parallèlement, Clubber Lang, un boxeur farouche et intrépide, écrase tous ses adversaires.

Il défie alors Balboa qui, lui, songe à une retraite bien méritée. Rocky relève le défi malgré les réticences de Mickey. L'entraînement peut enfin commencer. Hélas, Rocky pavoise et plastronne devant ses fans, au grand dam de Mickey. Avant même le début du combat contre Clubber Lang, Mickey est victime d'un malaise cardiaque. Rocky doit donc se résoudre à se battre seul.
Une fois sur le ring, Balboa subit une défaite sévère. Il est mis KO dès le début du second round. À ce malheur suit celui de la mort de Mickey. Apollo Creed, qui a assisté au match de Rocky, lui propose de revenir sur le ring et de prendre sa revanche sur Lang. Avec Rocky 3, la saga oblique vers une nouvelle direction. Rocky Balboa n'est plus cet homme solitaire arpentant les rues sordides de Philadelphie. 

Rocky a vaincu Appolo Creed. Il est champion du monde et mène une vie de petit bourgeois bien rangé auprès de sa femme et de son fils (je renvoie au synopsis). L'argent, les tapis rougeoyants et les Mercedes ont remplacé ce petit appartement vétuste et exigu d'un quartier populaire de Philadelphie. C'est d'ailleurs le terrible constat de Mickey, son entraîneur, qui déclare péremptoire : "Il t'es arrivé ce qu'il y a de pire pour un boxeur. Tu t'es embourgeoisé".
Plus que jamais, la trajectoire du boxeur trentenaire ressemble à celle de son acteur principal. Les paillettes, la gloire et même la bande son du film (Eye of the Tiger de Survivor) ont supplanté la simplicité du premier chapitre. Conscient de la popularité de son personnage, Stallone glorifie et érige son boxeur au rang d'une statue musculeuse et callipyge.

La chanson n'est plus la même. Ce qui explique probablement ces trente premières minutes grandiloquentes, la cuistrerie confinant à la vulgarité, à l'image de cette parodie de boxe tournant au carnage et aux prises de catch avec un Hulk Hogan pédant et vindicatif. De quoi désarçonner les fans de la première heure. Pourtant, suite à la défaite subie contre Clubber Lang, la tonalité jusque-là comique se transmute soudainement en dramaturgie funeste. Roué de coups, à moitié groggy, Rocky pleure sur la dépouille de Mickey. Le boxeur sonné peut prendre sa retraite... Ou presque.
L'arrivée inopinée d'Appolo Creed doit sonner le toxin, la révolte et plus précisément exhumer "l'oeil du tigre". Certes, en apparence, le scénario de Rocky 3 peut paraître assez basique. Pourtant, on tient là un vrai bon chapitre, finalement très différent de ses deux prédécesseurs. 

A la fois plus clinquant et survolté que ses modèles, Rocky 3 s'apparente à une diatribe contre tous ces sportifs appâtés et aveuglés par cet esprit de lucre. Pour Rocky, il est temps de retrouver la sueur, ces salles de boxe poussièreuses et ce regard de tueur prêt à guerroyer contre Clubber Lang. En outre, Rocky doit affronter sa propre peur. Pas seulement celle de se prendre à nouveau une râclée contre Clubber Lang. Avant tout, ce nouveau round reste un combat contre lui-même.
Certes, ce troisième opus n'est pas exempt de tout reproche. A l'image des dialogues oiseux et des répliques absconses d'un Clubber Lang agonisant son adversaire d'injures. Sur ce dernier point, c'est un véritable festival d'acrimonies : "Pronostic ? Une boucherie", "T'as rien dans les couilles Balboa !", "Toi la femme, puisque ton mec est un dégonflé, pourquoi tu n'essaies pas un vrai mec ?", "Alors connard, t'es à nouveau venu prendre une branlée !"...
Bref autant de billevesées assénées par un Mister T. plus en forme que jamais. On tient là un vrai "bad guy". Certes, on peut éventuellement tonner contre toutes ces séquences de musculation et de remise en forme, à l'image de nos deux comparses (Rocky Balboa et Appolo Creed) courant et batifolant sur la plage. Pourtant, la magie fonctionne. Plus spectaculaire, plus bourrin et surtout plus cogneur et dévastateur, Rocky 3 accentue davantage le charisme de son personnage principal.
Par la suite, ce sens du spectaculaire et du consumérisme se fourvoiera dans le nanar et la caricature avec Rocky 4.

Note : 13/20

 Alice In Oliver