Un pan du cinéma français aime le réalisme. Vérité des situations, des personnages, il se veut comme un reflet peu déformé de notre réalité. Le but de ce cinéma est la plupart du temps de rendre compte des problèmes d'une société. C'est ce que fait Je ne suis pas un salaud à travers son personnage principal interprété par Nicolas Duvauchelle. Eddie est ce que l'opinion publique ou ici le cinéma se fait de l'idée du français moyen. Peu de niveau d'études, colérique, alcoolique, vivant dans une barre d'immeuble et dans une précarité d'emploi. A ce tableau déjà très sombre, le cinéaste ajoute une histoire d'agression puis d'erreur judiciaire. C'est beaucoup pour un seul film. L'aspect positif de ce portrait est qu' Emmanuel Finkiel l'auteur réalisateur, va jusqu'au bout. On suivra Eddie dans sa reconstruction et dans sa chute. Rien n'est éludé, tout est raconté et quasi expliqué. Tout est expliqué si l'on fait exception du personnage d' Eddie dont la personnalité reste à la fois mystérieuse et cliché car on ignore ses origines et son parcours, et que sa manière de s'exprimer ainsi que son environnement en font ce que les médias appellent un " jeune de cité ". Une stigmatisation par le biais d'une expression toute faite constituant évidemment un raccourci. Du coup, bien qu'il soit présent à l'image tout du long et que l'on assiste à tout le processus de son histoire et de ses réactions (dont le titre du film nous donne d'ailleurs une première lecture), le personnage d' Eddie n'a rien de sympathique. Ce n'est ni un salaud magnifique qu'on aime détester, ni un cruel tueur comme on peut parfois accepter de suivre les aventures tout en frissonnant devant l'horreur, non c'est n'est qu'un "pauvre type" dans tous les sens du terme.
Toutes ses actions et ses choix nous sont tellement explicités qu'on ne peut ni vraiment le blâ, ni vraiment le plaindre. On se retrouve donc à se dire que ce type existe sûrement, que ses problèmes sont sûrement des vrais problèmes de société mais cela ne nous touche pas vraiment. Si une fiction veut nous faire ressentir une situation, nous faire poser des questions sur nous même, elle doit créer une empathie avec ses personnages pour mieux nous emmener là ou nous n'oserions pas penser nous retrouver. Là il ne se passe rien, devant trop de "réalisme" on reste détaché malgré tout ce qui se passe. Nicolas Duvauchelle fait tout ce qu'il peut pour faire vivre son personnage et le couple qu'il forme avec Mélanie Thierry est crédible mais souffre des mêmes problèmes de réalisme qui nous empêche de ressentir des émotions. Le personnage d' Ahmed est quand à lui trop absent pour amener un contrepoids efficace même si l'acteur est assez juste. Un paradoxe supplémentaire vient de la forme qui est assez léchée et même plutôt réussie avec des plans travaillés mais qui tombent à plat du fait de scènes trop explicatives. Du coup lors des moments plus "organiques" on n'est pas assez embarqué pour en profiter et ressentir le drame dans toute sa dimension. Finalement, Je ne suis pas un salaud est un film social dont la volonté de vouloir brasser trop de problématiques et de trop surligner les évènements finit par annihiler l'émotion et l'empathie pour ses personnages ce qui du coup laisse le spectateur à côté de sa démonstration.
Titre Original: JE NE SUIS PAS UN SALAUD
Réalisé par: Emmanuel Finkiel
Genre: Drame
Sortie le: 24 février 2016
Distribué par: Bac Films
Catégories : Critiques Cinéma
Tagué: antoine gouy, Driss Ramdi, emmanuel finkiel, Isabelle Kubiak, je ne suis pas un salaud, je ne suis pas un salaud critique, Maryne Cayon, MELANIE THIERRY, Nicolas Duvauchelle, Pascal Gastineau, Xavier Nogueras