Il y a des fois où des films ne livrent pas toutes leurs clés mais restent des coups de cœur indéniables. C’est le cas du nouveau film de Jeff Nichols qui, avec Midnight Special, s’approche pour la première fois de la SF.
Le film commence directement en posant des questions avec 2 hommes qui semblent avoir enlevé un petit garçon. Mais nous allons vite découvrir qu’il a été retiré d’une secte et que celui qui l’a enlevé pourrait bien être son père … et que le môme en question pourrait être doté de capacités étranges … tout cela est réservé pour le premier tiers du film et nous n’irons pas plus loin car le film se doit de préserver son mystère et le fait très bien pour que laisser au spectateur le temps de s’interroger sur les personnages et leurs actions.
Midnight Special se construit ainsi comme un road movie nocturne qui convoque autant Rencontre du Troisième Type que le plus récent Tomorrowland avec l’identité qui est si forte de Jeff Nichols. Le réalisateur nous plonge directement au coeur du récit, sans introduction. Une façon de nous déstabiliser mais aussi de faire appel à notre interprétation. Si on accroche, nous serons alors disposés à croire au reste du film, sinon, on restera sur le bas côté. Mais dès que l’on choisit de croire, la route est alors passionnante. Nichols dépeint ici une Amérique que l’on a peu l’occasion de voir avec des personnages qui n’ont pas grand chose des héros invincibles. Il y a un garçon malade, un père désemparé qui n’évolue pas accompagné d’un ami bien plus sensé qui ira jusqu’au bout par amitié. De la secte aux pouvoirs du garçon, tout nous ramène à la croyance ... non pas religieuse mais seulement de l’espoir dans un autre monde et c’est ce qui rend le film si spécial.
Mais en plus de cette croyance, Midnight Special parle aussi d’un grand thème très fort, celui d’être parent et de connaitre son enfant. Et le film peut se voir sous deux angles, celui qui serait simple et pessimiste de voir une métaphore d’un enfant malade et que ses parents accompagne jusqu’à la mort qu’ils doivent accepter. L’autre angle est bien plus intéressant et positif puisqu’il s’agit pour des parents de laisser grandir leur enfant, d’accepter ses choix et la personne qu’il doit devenir tout en croyant toujours en lui. Dans les 2 cas, Nichols montre parfaitement les doutes qui peuvent habiter les parents et la pureté de la croyance dans l’enfant.
Ne vous attendez cependant pas à un film de SF à grand spectacle car Nichols reste dans la sphère intime pour provoquer le mystère mais aussi l’attachement à ses personnages qui s’interrogent. La SF reste à sa place et ne vient pas envahir le discours, elle ne sert que de contexte au propos du réalisateur qui préfère alors garder encore quelques réponses pour lui pour laisser le spectateur s’interroger encore après le film. Un choix osé et frustrant (dommage de ne pas en savoir plus sur la secte) à l’heure où tout est prémâché mais qui fait du bien, nous permettant ainsi de réfléchir au destin de ce Midnight Special et à la vie de ses parents. Il ne reste plus qu’à dire que le casting regroupant Michael Shannon, Joel Edgerton, Kirsten Dunst et Adam Driver est évidemment formidablement dirigé pour conclure qu’il s’agit là d’un véritable coup de cœur.