Les acteurs et les réalisateurs sont des hommes comme les autres -enfin, presque. Ça leur arrive même d'être virés ! Disputes, retards, divergences artistiques, comportements ingérables et finances catastrophiques, voilà autant de raisons pour lesquelles il peut arriver qu'on les pousse vers la sortie. On se penche sur 6 cas particuliers.
Harvey Keitel sur Apocalypse Now (1979)
A tournage cauchemardesque, anecdotes croustillantes. Loin de déroger à la règle, est un véritable réservoir à histoires. Au printemps 1975, Francis Ford Coppola annonce qu'il va adapter la nouvelle feuilletonnante de Joseph Conrad, Au Cœur des Ténèbres, en la situant durant la guerre du Vietnam. Pour interpréter le rôle du Capitaine Willard, Coppola aurait sondé de nombreux acteurs comme James Caan, Jack Nicholson, Robert De Niro ou encore Dustin Hoffman. C'est finalement Harvey Keitel qui est retenu. L'acteur est fort d'une expérience militaire puisqu'il a été marine (plus exactement : Marine Corps rifleman) pendant trois ans. Mais voilà que deux semaines après le début du tournage Harvey Keitel est remercié par un Coppola dont la mégalomanie commence à pointer le bout de son nez. L'argument de la dispute ? Un casque. Pour les besoins d'une scène Coppola a demandé à Harvey Keitel de revêtir un casque. L'acteur, fort de son passé militaire, fait remarquer au réalisateur que le port de cet accessoire n'est pas logique : le faire tomber en pleine jungle revient à faire du bruit et indiquer sa position à l'ennemi. Il ajoute, dans une interview avec Jason Matloff, que c'est la raison pour laquelle les forces spéciales portent des bandanas. Si, sur le coup, Keitel pense que Coppola abdique à cette réflexion, l'acteur est débarqué après quelques jours. C'est Martin Sheen, dont on connaît les déboires, qui reprendra le rôle. Le plus absurde dans cette histoire c'est Walter Murch, le sound designer et monteur son du film, qui nous l'affirme : Harvey Keitel est toujours au montage. En effet, on aperçoit sa silhouette microscopique à l'avant d'un bateau dans un plan qu'il n'était pas nécessaire de retourner -et probablement trop cher.
Xavier Gens sur Hitman (2007)
figurait déjà dans notre top des adaptations de jeux-vidéo les plus horribles. La raison de cette réputation a très certainement à voir avec les déboires rencontrés par Xavier Gens sur le tournage. Lorsque EuropaCorp décide de s'associer à ce projet d'adaptation conduit par la Fox ils songent tout de suite à Xavier Gens dont ils produisent le premier long-métrage, le terrifiant Frontière(s). Mais très vite des rumeurs circulent au sujet du projet : la Fox n'aurait pas du tout apprécié la direction trop violente prise par le réalisateur français. En conséquence, il se murmure que Gens déserterait le plateau et qu'il aurait même été spolié du montage, confié à Olivier Mégaton, alors second assistant réalisateur sur le film, qui devra également retourner certaines séquences. Et le résultat, en forme de véritable patchwork, semble donner raison aux rumeurs. Plus tard, Xavier Gens expliquera : " On m'a laissé totalement libre pendant le tournage. Mais quand j'ai montré mon montage aux gens de la 20th Century Fox, tout a changé. Soudain, ils ne voulaient plus de ma version, jugée trop violente, trop élaborée. Ils ont fait basculer le film vers quelque chose de plus grand public, de moins sophistiqué. Je n'ai pas pu les en empêcher, et ils ont nommé un nouveau monteur pour m'aider à reformater le film selon leur volonté. " Affaire classée.
Ryan Gosling sur Lovely Bones (2009)
Vous ne le saviez probablement pas mais Ryan Gosling aurait du tenir le rôle de Jack Salmon dans le Lovely Bones de Peter Jackson. Lors des lectures avec le réalisateur, Ryan Gosling s'est d'abord inquiété de ne pas parvenir à jouer un personnage ayant une bonne trentaine d'année -Gosling était alors âgé de 26 ans-, inquiétude balayée par Peter Jackson qui lui assure qu'un peu de maquillage fera l'affaire. Et puis finalement, c'est un Ryan Gosling avec presque trente kilos en trop qui se présente face à un Peter Jackson ignorant de cette transformation. Gosling est alors passé de 68 à 95 kilos. Si l'acteur a pensé qu'il s'agissait d'une addition intéressante à son rôle, le réalisateur n'a semble-t-il pas vu la chose sous cet angle. Selon ses propres mots, l'acteur s'est vite retrouvé " fat and unemployed " (gros et au chômage). Il confie d'ailleurs sa recette prise de poids rapide : boire de la Häagen-Dazs fondue à chaque fois qu'on a soif. Yummy ! Du côté de Jackson, on assure que Ryan Gosling n'avait tellement pas l'air confiant à l'approche du tournage qu'il devenait urgent de trouver un acteur à la tête froide. C'est ainsi que Mark Wahlberg rejoint le projet seulement un jour avant le début du tournage.
Brenda Chapman sur Rebelle (2012)
Brenda Chapman est la réalisatrice et scénariste de le film des studios Pixar. Elle est assez rapidement débarquée du projet au profit de Mark Andrews pour des raisons d'agenda dit-on. On regrette notamment que Brenda Chapman ne soit pas assez expérimentée pour tenir les délais de production. Si Andrews se remémore une passation tranquille et dans l'intérêt du projet, Brenda Chapman ne semble pas avoir gardé les mêmes souvenirs que son successeur. Elle accuse plutôt la production de vouloir mettre le projet entre les mains d'un homme pour qu'il sot mieux accepté. Des financeurs peut-être ? Les premières ébauches de , alors intitulé The Bear and the Bow, laissaient entrevoir un conte plus sombre et aux paysages enneigés. Une histoire somme toute assez éloignée du conte de princesse se déroulant dans les landes écossaises parsemées de bruyères. La réalisatrice quant à elle reste persuadée que son sexe n'est en rien étranger à l'histoire : " Parfois, les femmes expriment une idée et sont stoppées, pour qu'ensuite un homme exprime essentiellement la même idée et obtienne l'approbation générale. Jusqu'à ce qu'il y ait un nombre suffisant de femmes aux postes exécutifs haut placés, cela continuera de se produire. " Quelques semaines seulement après la nouvelle de son éviction, Brenda Chapman change de crèmerie en plaquant Pixar pour LucasFilm, la société de George Lucas. La réalisatrice garde un souvenir amer de son expérience sur Rebelle : " C'était une histoire que j'avais imaginé, qui m'était très personnelle - en tant que mère et en tant que femme. Qu'on me l'enlève, qu'on la confie à quelqu'un d'autre, un homme en plus, fut une expérience horrible. " Des anicroches qui font tâche pour un film d'animation voulant transformer l'image de la princesse en femme forte et indépendante.
Stuart Townsen sur Le Seigneur des Anneaux (2001)
Peter Jackson n'en était pas à son premier coup d'essai en virant Ryan Gosling de son Lovely Bones. Vous l'ignorez peut-être mais jusqu'à la veille du premier jour de tournage c'est Stuart Townsend qui incarnait Aragorn dans Le Seigneur des Anneaux. Les raisons de son éviction restent assez floues. L'âge de l'acteur -26 ans au moment du tournage- est un temps évoqué : Stuart Townsend ne serait pas parvenu à incarner la sagesse et la maturité du rôdeur au sang royal. Dans une interview au Weekly Entertainment datant de 2002, l'acteur irlandais explique : " Je répétais et m'entraînais depuis deux mois, puis tout à coup j'étais viré la veille du tournage. Après ils m'ont dit que je ne serais pas payé pour rupture de mon contrat et non respect de ma durée de travail. J'ai passé un sale moment avec eux, donc j'étais presque soulagé d'être débarqué, jusqu'à ce qu'ils ne veuillent pas me payer. Je n'ai pas d'affinité avec les décideurs, vraiment aucune. Le réalisateur me voulait pour le rôle et soudain il a pensé que c'était mieux d'engager quelqu'un de différent avec vingt ans de plus. " Et quel homme ! Viggo Mortensen, jusqu'alors cantonné aux seconds rôles dans des films pas toujours géniaux, a été parachuté sur le devant de la scène. Il peut désormais choisir ses projets sur la base de l'affinité artistique. Quant à savoir si le rôle d'Aragorn aurait autant réussi à Stuart Townsend c'est une question qui restera à jamais sans réponse...
Tony Scott sur Top Gun (1986)
Dans l'histoire, restera à jamais le film de Tony Scott et pourtant le tournage n'a vraiment pas été une partie de plaisir pour le réalisateur qui a été viré trois fois en tout et pour tout ! Les raisons de cette triple éviction et ré-embauche sont nombreuses. Tout d'abord, le réalisateur se disputait quasi quotidiennement avec les producteurs, Don Simpson et Jerry Bruckheimer. Ensuite, on accuse le budget du film qui explose : 15 millions de dollars de dépassement, ça fait beaucoup. Sachant que le simple déplacement d'un avion pour tourner un nouveau plan se facturait 25 000 dollars, on imagine que le budget a du grimper fort et très vite ! Enfin, le tragique accident de Art Scholl a dû achever d'établir une ambiance tendue entre les équipes de tournages et les financeurs. L'expert de la voltige aérienne a perdu le contrôle de son appareil et s'est crashé dans le Pacifique. Son corps et l'avion n'ont jamais été retrouvés. Autant d'incidents qui n'ont pas entièrement terni la confiance puisque Tony Scott a de nouveau travaillé avec les producteurs de sur Le Flic de Beverly Hills 2, Jours de Tonnerre, USS Alabama ou encore Ennemi d'État.