Un grand merci à Marco Polo Production pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Steve McQueen : the man & Le Mans » de Gabriel Clarke et John McKenna.
« La course automobile me plait : j’aime la compétition. J’aime battre les autres. J’aime la sensation du pouvoir »
« Steve McQueen : the man and Le Mans » est un documentaire prenant qui propose une virée en compagnie d’une des plus grandes stars de cinéma de l’histoire. En 1970, Steve McQueen arrive en France avec, en tête, un challenge d’envergure : tourner « le film ultime de course automobile ». Une œuvre qu’il désire baptiser sobrement« Le Mans ». Un projet personnel qui a, en six mois, changé sa vie sur le plateau et en dehors.
« Ne t’inquiète pas, tu dormiras quand tu seras mort ! »
Dans la galaxie étoilée d’Hollywood, Steve McQueen compte parmi les étoiles filantes. De celles qui brillent avec intensité mais qui passent malheureusement beaucoup trop vite. Star absolue du cinéma américain des années 60 (« La grande évasion », « Les sept mercenaires », « Bullit » ou encore « La canonnière du Yang Tsé »), la carrière de l’acteur commencera néanmoins à ralentir dans les années 70, jusqu’à son décès prématuré en 1980, à l’âge de seulement 50 ans. Le moment clé dans cette carrière semble avoir été le tournage de « Le Mans » en 1970. En effet, passionné de sports mécaniques, Steve McQueen rêvait depuis longtemps de faire le film le plus réaliste possible sur le milieu des courses automobiles, après les tentatives mitigées de John Frankenheimer (« Grand prix ») et de James Goldstone (« Virages ») . Un projet véritablement personnel et ambitieux, puisque le « Roi du cool » décida non seulement de financer lui-même le film, mais aussi de prendre part à des courses professionnelles pour être le plus crédible possible à l’écran. Pour autant, le tournage du film autant que sa préparation se sont avérés chaotiques. Et si au fil des années le film est devenu culte pour une génération entière de cinéphiles, il n’en demeure pas moins qu’il fut un échec critique et commercial important à sa sortie. Avec « Steve McQueen : the man & Le Mans », les documentaristes anglais Gabriel Clarke et John McKenna tentent de dresser un portrait sans concessions de l’acteur à travers le récit du tournage de « Le Mans », qui apparait pour lui comme un virage raté tant à titre personnel qu’à titreprofessionnel.
« J’ai conquis le monde mais je ne me suis pas conquis moi-même »
« The man & Le Mans ». Derrière l’évidence du jeu de mots, les deux documentaristes mettent en miroir l’homme, alors au sommet de sa gloire, et le film qui fut, selon eux, l’un des tournants majeurs de vie et de carrière. Grâce à un colossal travail de recherche, qui a notamment permis d’exhumer de nombreux documents d’archives ainsi que les rushs du film que l’on croyait perdu (plus de 300 km de pellicule furent utiliser pendant le tournage) et à de nombreux témoignages de ceux qui ont participé de près ou de loin à ce tournage (famille de Steve McQueen, assistant réalisateur, scénaristes, acteurs, pilotes), le film dresse un portrait sans concession de l’acteur et du film sur trois niveaux. Tout d’abord, le film fait le récit d’une époque où la société rêve de modernité. De bolides toujours plus beaux et plus rapides (400 km/h !), symboles de puissance. De courses sans règles de sécurité, particulièrement meurtrières, qui font de ces pilotes des gladiateurs des temps modernes et qui offrent aux spectateurs un spectacle particulièrement impressionnant. Ensuite, il y a le film dans le film. Ou comment cette énorme production, en dépit de réelles innovations techniques (les caméras embarquées sur les voitures pour que immerger les spectateurs dans la course), vira au cauchemar le plus complet. Il faut dire que le tournage, débuté sans scénario, fut émaillé de nombreux incidents graves (accident de voiture hors plateau pour Steve McQueen et l’actrice principale, accident et amputation de l’un des pilotes du film), qui accentua la pression sur les épaules de l’acteur (également co-produteur) qui perdit peu à peu tout contrôle sur ce film qui devait être son projet le plus personnel. En effet, après le limogeage de son réalisateur (le grand John Sturges qui l’avait notamment dirigé dans « La grande évasion ») et de son scénariste attitrés, les financeurs du film reprendront la main sur le projet et imposeront un réalisateur et un scénario contre l’avis de la star. Enfin, le film dresse un portrait intime et sans concession de l’acteur, qui se révèle perfectionniste, exigeant, passionné et tête brûlée. Tiraillé entre les excès (sexe, drogue, alcool) et une forme de paranoïa (l’acteur aurait du être présent à la soirée où Sharon Tate et ses amis furent assassinés par Charles Manson, qui l’avait également identifié comme une cible potentielle), l’homme finira par se perdre dans le bourbier du Mans, qui marquera une première sortie de route personnelle et professionnelle (séparation d’avec sa femme, limogeage de ses collaborateurs les plus fidèles, rupture définitive avec plusieurs de ses amis les plus proches dont son associé). De ce tournage éprouvant, l’acteur perdra le goût des sports automobiles et ne reprendra plus jamais part à aucune compétition. Mais plus grave encore, il semble que ce soit l’amiante contenue dans les combinaisons qui soit à l’origine du cancer qui lui sera fatal. Si on pourra toujours reprocher aux réalisateurs d’avoir privilégié un format étonnement statique pour leur documentaire (alors même qu’il traite d’un film sur la vitesse), ces derniers signent néanmoins avec « Steve McQueen : the man & Le Mans » un documentaire passionnant tant sur le mythique acteur que sur les coulisses du film. De quoi ravir tout bon cinéphile.
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