La suite de Man of Steel devient l’affrontement des plus grands héros de DC comics et l’introduction d’un univers partagé aux grandes ambitions. Zack Snyder a de la pression sur les épaules et a-t-il réussi son pari ou Batman V Superman – l’Aube de la Justice a-t-il les yeux plus gros que le ventre ?
Batman V Superman commence donc en tirant déjà les conclusions du final apocalyptique de Man of Steel. En effet, après avoir ressassé encore une fois le meurtre des parents Wayne, nous voyons donc Bruce courir vers l’un de ses immeubles détruits par l’affrontement entre Superman et Zod, voyant alors les pertes humaines et convoquant à nouveau le fantôme du 11 septembre 2001 dont l’Amérique ne s’est jamais remise. De là viendra alors la rancœur de Bruce Wayne envers l’homme de fer et la menace extra-terrestre qu’il représente. Le développement de ce Batman plus âgé et plus violent est plutôt bien géré dans le scénario et par un Ben Affleck impeccable de sobriété, orientant alors le film vers une tonalité encore plus sombre que la trilogie de Nolan.
Mais si les choix et le développement du chevalier noirs sont plutôt bien traités, le reste ne sera pas du même acabit. En effet, le film peine pendant 1h30 d’exposition à avoir une orientation claire, multipliant les scènes sans liant, les discours sans intérêt d’un Lex Luthor à la folie irritante (Jesse Eisenberg en roue libre), l’introduction maladroite de Wonder Woman et des films à venir (le rêve sorti de nulle part de Bruce Wayne dans le désert) et surtout une incompréhension de tout ce qui entoure Superman pourtant toujours campé par l’impeccable Henry Cavill avec une attachante Amy Adams à ses côtés dans le rôle de Lois Lane. En effet, le scénario et le réalisateur ne savent pas trop quoi faire de ce personnage d’ordinaire plus lumineux (parfaite opposition à l’obscurité et aux méthodes de Batman) qui ne fait ici que tirer la gueule et s’interroger sans cesse sur son rôle sans y croire.
Pourtant, autour de Superman, il y a de belles choses qui sont évoquées dont une magnifique scène de sauvetage au Mexique qui redonne la majesté qu’il faut au personnage. Il y a même les thèmes passionnants du surhomme et de son impact (politique et religieux, positif comme négatif) sur l’humanité et les questions qu’il engendre ou encore la mythologie qui sont évoqués. Mais malheureusement, cela n’est jamais abouti ou alors abordé avec maladresse et c’est dommage car le film pourrait ainsi bénéficier d’une aura encore plus épique et grandiose. Mais au lieu de cela le film ressasse un Superman inutilement torturé (Batman l’est déjà pour deux) et des machinations de Luthor sans motivation claire.
Puis arrive enfin dans le dernier tiers l’affrontement tant attendu entre les deux héros mais ceux-ci n’ayant pas de motivation vraiment valable (la source même de l’affrontement devient même assez superficielle), il n’y a pas vraiment d’attachement aux personnages ni même de parti pris à avoir d’où un gros désintérêt pour la bagarre en cours. Même la réalisation de Snyder est à ce moment là assez fouillis, avec des scènes d’action parfois assez illisibles. Et cela devient même ridicule quand les deux personnages trouvent une raison de finalement devenir en 1 seconde les meilleurs amis du monde. Car oui, il faut bien qu’ils se rabibochent vite fait pour faire face à la menace explosive qu’avait réservé Luthor et qui nécessitera l’apparition d’une Wonder Woman badass à souhait dans un déluge d’effets visuels qui confine à l’overdose, nous orientant vers l’un des arcs les plus importants de Superman mais qui n’en développera malheureusement pas l’impact émotionnel à cause du développement laborieux qui aura précédé.
Blockbuster exigeant et passionnant par ses bribes de thèmes proposé et une version sans concession du chevalier noir, Batman v Superman se perd malheureusement régulièrement dans un scénario bordélique qui doit mixer sans y arriver l’univers de Batman, la personnalité à part de Superman, les menaces de Luthor, les impératifs de franchise et des éléments spectaculaires. Il en ressort un film avec autant de bons moments que d’autres plus pathétiques, un film inégal qui trouvera peut-être plus de justesse en version longue où à la vision des films qui suivront, mais cela ne va pas empêcher cette affrontement mythique attendu de cartonner déjà au box office.