Horsehead

Horsehead (2014) est le 1er long métrage de Romain Basset. Bien que tourné en anglais, c’est un film français.
Il raconte les cauchemars  de Jessica, étudiant le principe des rêves lucides, qui s’intensifient suite à sa venue dans la demeure familiale, à l’occasion du décès de sa grand mère qu’elle a peu connue. Sa mère et son beau père assistent impuissants, à l’aggravation des symptômes de Jessica…

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Si on essaye de suivre la maigre actualité du cinéma de genre français, il est difficile de passer à côté de Horsehead, projet en cours depuis un moment, dont le financement a été compliqué (le film a bénéficié de campagnes de crowfunding, oh my gore, pour finalement être sauvé par Starfix ). J’ai lu que le budget final était de 150 000 euros, je suis très surprise quand on sait qu’1 million d’euros pour un film de genre c’est déjà très très très bas.
Toujours est t il que la première chose qu’il faut remarquer et saluer à propos d’Horsehead, c’est bien la qualité de la mise en scène, sublimée par la lumière et les quelques effets spéciaux. Autant dire que pour un budget pareil (et pour un premier long), c’est très impressionnant. Et quand j’ai vu que l’entité maléfique était un être non identifié à tête de cheval, j’ai pris peur du ridicule de la chose. Et au final….on y croit. La tête respire quelque chose d’organique, d’imposant, avec un corps filmé à moitié dans l’ombre. Suffisamment éclairé pour comprendre que Romain Basset n’a pas honte de filmer son entité, mais avec une part d’ombre qui participe à mystifier cette chose.Malgré tout, le manque de budget a sûrement contraint l’équipe d’Horsehead a abusé des effets de lumière dont on sent parfois l’artifice.
Les séquences de cauchemars sont réussies (trip suffisamment barré, bel éclairage, une ambiance gothico-mystérieuse…), malgré une redondance dans le thème et la mise en scène.

On peut regretter que le film soit tourné en anglais malgré l’accent correct de Lilly Fleur Pointeaux (de la série  Nos années pensions), pour des questions de vente du film à l’international. On a déjà assez peu de réalisateurs français dans le cinéma de genre, alors si en plus c’est pour semer le doute chez le spectateur..

Du côté de l’interprétation, Lilly Fleur Pointeaux ne manque pas de charisme, mais peine à dégager quelque chose de fort, pour m’embarquer réellement dans sa quête. Catriona MacColl (vue dans le Théâtre Bizarre, 2011), qui joue la mère de Jessica, souffre surtout d’un personnage qui reste trop en surface, pas suffisamment exploité, qui est pourtant un élément central dans la quête-tête de Jessica.

La vraie faiblesse de Horsehead, c’est le manque cruel de scènes dans la vie réelle. La narration est plombée, c’est lourd. On ne peut pas développer une empathie pour le personnage de Jessica, dans la mesure où la voit à 80% dans ses cauchemars. Le spectateur ne pas pas comprendre l’essence même du personnage, les cauchemars ne peuvent transmettre à eux seuls, une compréhension des tourments, des questionnements, des doutes…

Et pourtant, l’histoire se prêtait à une narration intéressante. Jessica est sujette à ce qu’on appelle des « rêves lucides », c’est à dire, au delà d’être conscient de rêve, c’est le fait de mettre en pratique des techniques de maîtrise de soi et de ses actes, pendant un rêve. Le cinéma de genre regorge d’oeuvres autour des rêves, de la frontière entre l’imagination et le réel, mais cette notion de rêve lucide, est rare, pour ne pas dire inexistante. Malheureusement cet aspect n’est pas approfondi, Basset s’intéresse plutôt à comment son personnage vit cette expérience, plutôt que pourquoi. Un choix défendable (mais qui m’a frustrée un peu😀 )

On ne peut qu’encourager un film comme Horsehead, ne serait ce que pour montrer qu’il existe dans le cinéma de genre français, des réalisateurs qui possèdent un réel univers, mais il manque une narration percutante pour marquer durablement…