Red Room (Le jeu du "Roi")

Par Olivier Walmacq

Genre : horreur, gore, trash (interdit aux - 18 ans)
Année : 1999
Durée : 1h08

Synopsis : Quatre personnes se retrouvent enfermées dans une pièce, surveillées par micros et caméras, pour jouer au « jeu du roi ». Le principe ? Celui qui tire la carte du roi propose une épreuve à un ou deux autres joueurs, la personne qui refuse le défi étant éliminée. L'enjeu ? Dix millions de Yen pour le vainqueur...  

La critique :

Depuis les années 1990, le réalisateur japonais, Daisuke Yamanouchi, est devenu la nouvelle égérie du cinéma trash, mélangeant à la fois le gore et la pornographie à outrance. Les amateurs du cinéma extrême connaissent essentiellement le cinéaste pour des oeuvres certes confidentielles mais qui ont connu leur heure de gloire sur la Toile, notamment Blood Sisters, Girl Hell 1999, Kyôko vs. Yuki et Dead A Go ! Go !. Vient également s'ajouter Red Room, sorti en 1999.
Le long-métrage appartient aux films de la catégorie III, soit les productions japonaises extrêmes et interdites aux moins de 18 ans chez nous. Pour ceux qui connaissent bien cette catégorie de films, ils citeront probablement The Untold Story (Herman Yau, 1993), Ebola Syndrome (Herman Yau, 1996), Run and Kill (Billy Tang, 1993), Dream Home (Pang Ho-Cheung, 2010), ou encore Daughter of Darkness (Ivan Lai, 1993).

Au menu de toutes ces productions souvent faméliques, de la violence, de la torture, des viols, de la vengeance, des tueurs en séries, des meurtres abominables ou encore des jeux pornographiques déviants. Tout un programme ! En outre, Red Room mélange un peu tout cela à la fois. Inutile de préciser que le long-métrage n'est pas sorti au cinéma. Toutefois, avec Muzan-E (du même réalisateur), Red Room reste probablement le film le plus "connu" (un terme néanmoins à guillemeter vu la rareté de l'objet) de Daisuke Yamanouchi. Le long-métrage a connu un certain succès en vidéo.
A tel point qu'une suite, donc Red Room 2, sera réalisée l'année d'après. Toutefois, pas besoin d'un énorme budget pour tourner ce genre de pellicule anomique. Avec peu de moyens, Daisuke Yamanouchi est capable de signer les pires ignomines.

Il le prouve une nouvelle fois avec Red Room premier du nom. Inutile de mentionner la distribution du film, à moins que vous connaissiez les noms de Hiroshi Kitasenju, Sheena Nagamori, Mayumi Ookawa et Yuuki Tsukamoto ; mais j'en doute. En l'occurrence, le scénario de Red Room est à la fois basique et laconique. Attention, SPOILERS ! Quatre personnes se retrouvent enfermées dans une pièce, surveillées par micros et caméras, pour jouer au « jeu du roi ». Le principe ?
Celui qui tire la carte du roi propose une épreuve à un ou deux autres joueurs, la personne qui refuse le défi étant éliminée. L'enjeu ? Dix millions de Yen pour le vainqueur... Certes, certains contempteurs pourront éventuellement tonner et pester contre le cinéma de Daisuke Yamanouchi en pointant ses errements et son amateurisme.

Ils pourront également morigéner contre ce cinéma extrême et déviant qui, à priori, ne dénonce pas grand-chose. Et pourtant... Déjà, à travers Muzan-E, le réalisateur japonais s'intéressait aux légendes urbaines en conviant le spectateur à assister au long supplice d'une journaliste martyrisée et suppliciée par des individus anonymes. Ou le reflet d'une société nippone en plein marasme, honteuse de ses tabous et de ses propres maux, notamment en matière de sexualité débridée.
Avec Red Room, Daisuke Yamanouchi s'attaque à nouveau à notre société moderne et consumériste. Cette fois-ci, le cinéaste tance et dénonce tous ces jeux de téléréalité à la morale perfide et perverse. Certes, la diatribe est rapidement éludée au profit de ce qui intéresse le plus le réalisateur japonais : le sang, les scélératesses et les paraphilies perpétrées par plusieurs candidats transformés en bourreaux.

Ainsi, la tension monte crescendo. Dans un premier temps, les défis relevés sont relativement simples. L'introduction de Red Room nous invite à mater deux candidates s'embrasser langoureusement. Par la suite, c'est un homme qui subit le supplice d'un sèche-cheveux en marche disposé dans sa bouche. Bref, rien de bien méchant. Mais force est constater que Daisuke Yamanouchi possède un concept original. Concept qu'il exploite (évidemment) à satiété.
Les saynettes s'enchaînent dans un décor rudimentaire, teinté de couleurs rougeoyantes et de draps transparents. Les tortures et les supplices se déroulent donc en huis clos. Au moins, Daisuke Yamanouchi n'a pas eu besoin de déployer de gigantesques décors, donnant ainsi la sensation que les divers châtiments se déroulent tous (ou presque) dans une seule et unique pièce.

Puis, au fur et à mesure des abominations pratiquées par les protagonistes, la violence franchit une marche supplémentaire vers la décadence. Daisuke Yamanouchi tergiverse entre le gore, les effusions sanguinaires et une pornographie soft. Tout d'abord, c'est une jeune femme qui est violée par un assaillant libidineux. Puis, c'est une autre jeune femme qui subit la pénétration d'un objet contondant dans ses parties intimes. Le bourreau devient la propre victime de ses satyriasis, atrocement mutilé et castré par une de ces victimes. Bref, Daisuke Yamanouchi est fidèle à son cinéma et à son univers dépravé.
Que les choses soient claires. La critique de la téléréalité n'est qu'un leurre, une chimère. Ensuite, les acteurs sont unanimement médiocres. Une interprétation qui souffre inévitablement d'un certain amateurisme, hélas préjudiciable à la qualité du film. Et pourtant... Force est de constater que Red Room flatte notre voyeurisme et nos propres déviances. C'est tout le paradoxe du film. Un oxymore totalement assumé par un Daisuke Yamanouchi plus en forme que jamais.

Note : 11.5/20

 Alice In Oliver