Date de sortie 9 mars 2016
Réalisé par John Crowley
Avec Saoirse Ronan, Julie Walters, Jim Broadbent,
Domhnall Gleeson, Emory Cohen, Jessica Paré, Fiona Glascott
Genres Drame, Romance
Production Irlandaise, Britannique, Canadienne
Synopsis
Dans les années 50, attirée par la promesse d'un avenir meilleur, la jeune Eilis Lacey (Saoirse Ronan) quitte son Irlande natale et sa famille pour tenter sa chance de l'autre côté de l'Atlantique. À New York.
Le mal du pays qui l’afflige à son arrivée s’estompe rapidement quand l’amour frappe à sa porte. Mais un drame viendra perturber son nouveau bonheur et elle devra faire un choix déchirant entre deux pays et les vies qui s’offrent à elle.
Saoirse Ronan
Après avoir acquis les droits du roman Brooklyn de ColmTóibín, les productrices Finola Dwyer et Amanda Posey ont demandé à Nick Hornby d’adapter la magnifique, mais sous-estimée, prose de Tóibín.
Pour Tóibín, le parcours d’Eilis est non seulement celui vers la maturité affective, mais il est aussi physique. "Mon livre raconte l’histoire secrète de deux pays : celle de mon pays, l’Irlande, qui, au cours des 150 dernières années, a vu toutes les familles perdre un ou deux de ses membres, des gens qui sont partis pour ne jamais revenir", dit-il. "Il s’agit donc de l’histoire secrète de l’Irlande, mais aussi celle des États-Unis."
Le potentiel cinématographique du roman ne laissait aucun doute aux yeux d’Hornby. "Colm a sa façon bien à lui de dépeindre la douleur animée par le désir d’être à deux endroits en même temps. Il s’est livré à un magnifique exercice d’équilibriste qui, selon moi, se prêtait particulièrement bien à un film. Si une jeune femme peut s’identifier à l’un des personnages d’Orgueil et préjugés, elle pourra sûrement s'identifier à Brooklyn. Au cœur de cette histoire règne une sorte de dilemme intemporel entre deux types de jeunes hommes." poursuit-il. "Non seulement cette histoire raconte-t-elle le voyage d’Eilis de l’Irlande vers l'Amérique, mais elle dépeint le parcours qui l’amènera à devenir la femme qu’elle veut être". C’est l’histoire d’une jeune femme qui trouve sa voix et sa capacité de choisir à une période de l’Histoire où beaucoup de choix étaient encore limités pour les femmes." explique la productrice Amanda Posey.
Pour faire l’équilibre entre une étude sur un personnage attachant et une critique sociale sur une partie de l’Histoire irlando-américaine, il fallait un réalisateur qui comprenait le stress émotionnel ressenti par Eilis et d'autres femmes comme elle.
John Crowley, est un Irlandais d’origine, installé en Angleterre.
Il débute sa carrière de metteur en scène primé en Irlande en présentant des pièces telles que Six Characters In Search Of An Author (The Abbey Theater, Dublin), Phaedra (The Gate Theater, Dublin), La chasse aux sorcières (The Abbey Theater, Dublin) et Double Helix. Cette dernière est jouée pour la première fois au Dublin Theater Festival de 1995 et au Peacock Dublin, avant de remporter le Kilkenny Cream of Ireland for the Performing Arts en 1996.
John Crowley déménage ensuite à Londres et s’installe au Donmar Warehouse, où il met en scène Tales from Hollywood de Christopher Hampton, Les bonnes de Jean Genet, Juno and the Paycock de Sean O’Casey, How I learned To Drive de Paula Vogel et Into the woods de Stephen Sondheim. Parmi ses productions londoniennes, il faut citer Fair Ladies at a Game of Poem Cards au Royal National Theater, Macbeth, mettant en vedette Rufus Sewell et Sally Dexter au Queens Theater, et Shadows pour la Royal Shakespeare Company.
John Crowley passe au cinéma et s’est fait connaître en tant que réalisateur de la comédie irlandaise Intermède paru en 2003, puis il a réalisé le drame Boy A, lauréat aux prix BAFTA.
L’auteur Colm Tóibín a vu des similitudes entre John et le personnage d’Eilis. "John Crowley connaît l’expérience d'être originaire de l’Irlande et de vivre sous le ciel anglais et de se déplacer entre les deux endroits. Dès que nous avons commencé à en parler, il a compris sur le champ." Avant même que Nick Hornby ne commence à écrire le scénario, le réalisateur fut attiré par l’universalité de l’expérience d’Eilis. "J’avais lu et aimé le roman, j’ai donc sauté sur l’occasion quand on m’a offert de lire le scénario. Le travail de Nick rend magnifiquement justice au roman de Colm Tóibín", explique-t-il.
Saoirse Ronan, Jim Broadbent et Jessica Paré
"Je pense que dans ce livre, j’ai essayé de construire un personnage qui n’avait pas conscience de soi, qui ne passait pas son temps à se regarder dans le miroir, qui n’était pas trop insistante, mais qui avait une sorte de grande sensibilité autour d’elle, presque de l’entêtement à certains moments" Voilà comment l'auteur décrit Eilis, la protagoniste de Brooklyn. Pour traduire avec succès cette histoire au grand écran, il faillait trouver une actrice principale capable de dépeindre les subtilités et les sensibilités du personnage principal. C’est là qu’est entrée en scène Saoirse Ronan, née à New York de parents irlandais et élevée en périphérie de Dublin.
Pour l’actrice principale Saoirse Ronan, il est évident que Nick Hornby a réussi à cerner les moeurs de cette petite ville d’Irlande. "Ce qui est le plus incroyable avec Nick, c’est qu’il ne vient même pas d’Irlande! Pourtant, il a réussi à saisir entièrement l’esprit de ce pays et ses habitants. Le scénario est tellement bien écrit et si magnifiquement subtil."
"C’est une histoire près de mon cœur parce qu’elle parle de ma famille. C’est le voyage que mes parents ont fait dans les années 1980, ils sont emménagés à New York et ils ont vécu le même genre de situations, même si c’était à une époque et une ère différente. J’ai eu de la chance parce que je suis très Irlandaise à certains égards, mais j’ai aussi une sensibilité à l’américaine et je suis né à New York. Je crois que cette expérience fut encore plus émouvante pour moi, parce que j’avais un fort sentiment d’appartenance à ces communautés et à ces gens." commente l'actrice.
Julie Walters, qui joue le rôle de Mme "Ma" Kehoe dans le film, admire aussi la source dont est puisé le film. Elle fut également impressionnée par la façon dont le scénariste a distillé le roman pour en élaborer un scénario riche, sobre et émotionnel avec lequel les artisans ont pu travailler. "Quand vous voyez un film inspiré par un roman que vous avez lu, le résultat n’est souvent pas à la hauteur parce que rien ne peut rivaliser avec votre imagination", explique Julie Walters. "Mais ce script est merveilleux et il ne m’a pas du tout déçu, au point tel que j’ai pensé que Nick Hornby était de descendance irlandaise."
Domhnall Gleeson, qui interprète le prétendant Jim Farrell, déclare. "Le scénario est très subtil, et je pense que John est aussi un réalisateur très subtil. Il m’a dit ce qu’il attendait de moi, et je lui ai dit ce dont j’aurais besoin de sa part pour y arriver; puis nous avons convenu de nous donner ce que chacun attendait de l’autre. Je pense qu’il est merveilleux avec les acteurs et avec les membres de l’équipe."
Les rôles de Tony Fiorello et Jim Farrell furent tout aussi importants pour transposer le roman à l’écran : ils induisent des tentations à Eilis des deux côtés de l’Atlantique.
Emory Cohen et Domhnall Gleeson : deux acteurs complementaires.
Emory Cohen, qui est né et qui a grandi à New York, s’est avéré un choix naturel pour le rôle de Tony, le Brooklynois. Bien qu’il se soit fait connaître en interprétant des personnages plus troublés dans la série Smash, diffusée à NBC, et dans The Place Beyond the Pines de Derek Cianfrance, il s’est lancé dans une autre direction en jouant le rôle d’un jeune homme affectueux aux bonnes manières.
"J’ai toujours pensé à ce film sur le plan du premier amour. Qu’est-ce que ça veut dire être un homme ? Qu’est-ce que ça veut dire aimer de tout son coeur ? Qu’est-ce que ça veut dire apprécier les petites choses de la vie ? Ce sont des questions auxquelles je n’avais pas à répondre dans des films plus sombres où je finissais toujours par frapper les gens !"
La capacité naturelle d'Emory Cohen et son instinct authentique ont été des facteurs décisifs pour John Crowley.
Pour contrebalancer le magnétisme de Tony, il fallait quelqu’un dans le rôle de Jim Farrell qui ferait en sorte que le difficile choix d’Eilis soit aussi crédible.
Domhnall Gleeson, célèbre acteur de théâtre et de cinéma, mieux connu du public pour ses rôles dans Il était temps, Frank et la série de films Harry Potter, correspondait parfaitement à ce rôle. "C’était mon devoir de faire de Jim une personne pour qui on veut rester, un amour pour lequel on veut tout abandonner ", avoue l'acteur sur les motivations de son personnage.
Domhnall Gleeson possède une intelligence consommée, explique John Crowley. "Il réfléchit beaucoup à tout ce qu'il fait, il pense profondément à tous ses rôles et il les interprète intensément. C’était très important que Jim et Tony occupent des espaces différents dans le film et que cela soit tout à fait plausible, tout en étant deux versions opposées de l’homme avec lequel Eilis pourrait se retrouver.
Ils ont des sentiments complètement différents en tant qu’interprètes." rajoute le réalisateur.
"C’était très important que Jim et Tony occupent des espaces différents dans le film et que cela soit tout à fait plausible, tout en étant deux versions opposées de l’homme avec lequel Eilis pourrait se retrouver. Ils ont des sentiments complètement différents en tant qu’interprètes."
La costumière, Odile Dicks-Mireaux, s’est inspirée de vieilles photographies de Vivian Maier et d’Elliott Erwit pour recréer un style authentique pour chaque personnage de New York. Elle a aussi évité de s’inspirer des médias de masse et de la publicité de cette période qui sont facilement accessibles. "John Crowley m’a spécifiquement demandé de ne pas regarder les magazines de mode, mais de m’inspirer plutôt du vrai monde. Les personnages ne sont pas des vedettes d’Hollywood, ce sont des femmes de la classe ouvrière qui essaient de gagner leur vie à New York. Ce fut assez difficile de garder cela à l’esprit."
Odile Dicks-Mireaux poursuit : "J’ai passé beaucoup de temps à regarder le travail des photographes américains de cette période, qui présente une grande richesse, puis j’ai cherché à obtenir des images précises comme celles de personne dans la rue à New York ou à Ellis Island. Ainsi, j’ai pu regarder et trouver des costumes, c’est normal quand il faut aller à toute vitesse parce que la distribution est arrivée.
Heureusement, on peut trouver beaucoup de vêtements authentiques en bon état. Il n’est pas toujours nécessaire de les fabriquer. John voulait que les costumes soient très naturels et réels."
"Il y a une énorme différence entre l’Amérique et l’Irlande de l’après-guerre. C’est comme si l’Amérique n’avait pas souffert de la misère de l’après-guerre, et le style des vêtements y est très différent", ajoute Odile Dicks-Mireaux. "En Amérique, on trouvait de la couleur. Il y avait du rouge, du caramel, du jaune ocre, du rose et des couleurs pâles qu’on ne trouvait tout simplement pas en Irlande. Les couleurs en Irlande sont atténuées, et la coupe des robes plus sobres, tout an ayant un sens de l’esthétisme. Pour les hommes toutefois, le style irlandais des années 1950 n’était pas très inspirant."
Mon opinion
Un film sans aucun coup d'éclat. Émouvant sans être larmoyant. Toute en finesse, la réalisation de John Crowley ne manque de délicatesse. Ce grand réalisateur de théâtre, connu et reconnu, récompensé en maintes reprises offre, avec ce film, la justesse nécessaire pour rendre l'ensemble attachant de bout en bout.
Le scénario s'appuie sur l'œuvre éponyme de Colm Tóibín. Une parenthèse de l'Histoire "irlando américaine", mêlée à de grands et beaux sentiments. Un roman paru en 2009 qui n'est pas sans rappeler notre actualité.
La reconstitution parfaite, la magnifique photographie, l'étude approfondie et le travail sur les costumes de l'époque, offrent à la principale protagoniste, Saoirse Ronan tout un univers dans lequel elle est parfaite de retenue et d'une certaine élégance, de la première à la dernière image. Julie Walters nous régale au travers de quelques dialogues percutants. Jessica Paré, glaciale dans ses premières apparitions, ne manque pas de panache. Jim Broadbent participe avec son habituel talent à ce casting dans lequel chacun trouve sa juste place. Les actrices que l'on aperçoit, entre autres, lors des repas dans la pension de famille sont toutes parfaites. Les échanges verbaux sont savoureux et sonnent justes. Les jeunes et talentueux Domhnall Gleeson et Emory Cohen complètent ce casting sans faille aucune.
Brooklyn ne manque pas d'altruisme ni d'authenticité, et reste un beau moment de cinéma. C'est déjà beaucoup.