On ne connaissait la société belge Nwave Pictures que pour avoir, avec un succès mitigé, surfé sur la vague du Monde de Némo avec Les aventures extraordinaires de Sammy. Vincent Kesteloot, réalisateur de Sammy 2, sortira le 20 avril prochain, Robinson Crusoé, adaptation pour le coup très libre de l’oeuvre de Daniel Defoe. Visiblement aménagé pour plaire aux plus petits, Robinson Crusoé bénéficie d’une animation correcte mais un tantinet impersonnelle. Nul doute qu’il ne restera pas dans les mémoires comme une adaptation immanquable. Nous avons pu le voir, en avant-première, ce dimanche 17 avril.
Mardi (Kaya Yanar), un perroquet vit sur une île, désertée par la vie humaine, en compagnie de ses amis animaux. Il s’ennuie profondément mais il est convaincu qu’un autre monde existe. Ce qui se confirme à l’arrivée d’un mystérieux inconnu, Robinson Crusoé (Matthias Schweighöfer) et de son chien, sur une embarcation inquiétante.
Robinson Crusoé (Matthias Schweighöfer) et Mardi (Kaya Yanar)
Robinson Crusoé est un roman dont l’adaptation peut se révéler très riche. On peut notamment y parler de la solitude, de la nécessité de l’homme de rester un être social, du retour à la nature, de l’autosuffisance alimentaire et même de l’ambiguïté morale de l’homme blanc suprématiste. Adapté pour les enfants, ces sujets sont surement abrupte pris tel quel mais tout le génie d’un dessin animé réussit est bel et bien d’offrir plusieurs degrés de lecture, de s’ouvrir aux adultes autant qu’aux enfants, de laisser sa philosophie imprégner malgré tous les esprits. C’est d’ailleurs ce qui a fait le succès de studio prestigieux comme Pixar par exemple. Ici, l’intention de donner du corps au récit semble inexistante. Des ajouts à l’histoire, inspirés par Vendredi ou la vie sauvage de Michel Tournier, comme l’existence d’un chien, ou le choix de Robinson de rester sur l’île, sont autant de preuves d’un choix délibéré d’orienter le récit uniquement vers les minots. Bien que le roman de Tournier amène, lui, les gamins à la réflexion. Ce qui donne pour résultat, le film commençant d’ailleurs par la fin, que la trame avance sans surprise aucune.Papi, la chèvre (Dieter Hallervorden)
Puisqu’il ne s’agit que d’un divertissement, oubliant la portée de l’oeuvre originelle, est-ce alors un bon moment à passer ? Pas tout à fait. Il y a certes, quelques moments plaisants, jouant sur les courses poursuites entre de vieux matous rachitiques et les autres animaux, utilisant comme décors la cabane et les aménagements de Robinson. C’est même le meilleur moment du film, le seul où l’animation fait preuve d’un peu d’audace et le scénario d’un peu d’inventivité en promettant aux vilains félins, un sort peu enviable et assez drôle, les amis de Crusoé multipliant les cascades improbables. Pour le reste, une trop longue première partie où les animaux hésitent à établir le contact et des quiproquos mal exploités rende le long-métrage ennuyeux. Le seul moment d’enthousiasme étant probablement, comme nous l’avons suggéré plus haut, la construction de la cabane du héros. La relation d’amitié naissante entre Robinson et ses amis n’est pas vraiment émouvante. La faute à l’animation des personnages qui manquent cruellement d’expression. Après la mort de son chien, c’est à peine si l’on voit effleurer la tristesse sur le visage de Robinson. Bizarrement, Rosie le tapir (Ilka Bessin) a les yeux plus expressifs.Papi, la chèvre (Dieter Hallervorden), Rosie le tapir (Ilka Bessin), le hérisson (Aylin Tezel) et Robinson Crusoé (Matthias Schweighöfer)
Robinson Crusoé n’éblouira pas vos mirettes et n’embrumeras pas vos yeux. Parmi la foule de bambins présent à l’avant-première, on ne peut pas dire que la rigolade fut franche. Pas franchement raté mais loin d’être inoubliable, Robinson Crusoé reste tout à fait dispensable. Peut-être même que, conformément à ses vœux, on pourrait le laisser seul sur son île. Préférer lui un petit chef d’oeuvre comme Le petit Prince, autre monument de la littérature enfantine, autrement mieux adapté par On Animation Studios, qui a su conserver le fond et sublimer la forme.
Boeringer Rémy
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