Dialogue : conseils de william c. martell (1)

Par William Potillion @scenarmag

Si vous vous demandez pourquoi l’un de vos personnages ne fonctionne pas, William C. Martell aurait peut-être une petite idée sur la question du dialogue.
William C. Martell prend un exemple personnel : il avait sur l’un de ses scripts plusieurs enquêteurs sur différentes scènes de crime. Puis, il se rendit compte que tous ces personnages ayant une fonction similaire pouvaient être aisément et plus efficacement remplacés par un seul personnage.

Mais à la réécriture de son scénario, il se rendit compte aussi que le personnage en question était sous-développé et que ses dialogues paraissaient fades. Le personnage était tout bonnement dénué de personnalité.

Il comprit alors que la clef du problème était qu’il n’avait aucune idée de qui était ce personnage. Qui était-il lorsqu’il n’était pas présent sur une scène de crime ?
Alors il imagina un passé et il reconstruisit la personnalité de son personnage. Il reprit son scénario et révisa les dialogues de son personnage à la lumière des découvertes qu’il avait faites sur lui. Le personnage acquit alors une voix unique qui le distinguait et empêchait toute confusion avec les autres personnages.

Pour William C. Martell, le problème fondamental d’un dialogue confus, qui ne permet pas d’identifier clairement un personnage vient habituellement du manque d’intimité de l’auteur avec le personnage.
Il ne suffit pas de connaître celui-ci superficiellement (est-il marié ou non ? A t-il des enfants ? Son activité professionnelle…), il faut aller plus profondément dans sa psyché (connaître par exemple si une blessure mal refermée au cours de son enfance n’interfère pas avec son comportement, ses relations et le dialogue qu’il profère).

Vous devez connaître votre personnage, savoir qui il est lorsque personne d’autre ne prête attention à lui. Vous devez pénétrer son intimité.
Que pense-t-il qu’il soit ? Comment se voit-il ? Que veut-il ? Qu’est-ce qu’il déteste le plus en lui ? Qu’est-ce qui a fait qu’il est devenu ce qu’il est ? Qu’est-ce qui le fait avancer ?
Il vous faut mettre le doigt sur ses motivations même si lui-même ne les définit pas clairement. Vous êtes le créateur des hôtes de ce monde, vous êtes omniscient de leur passé, de leur présent et de leur devenir.

Concernant le dialogue, toutes ces choses qui déterminent votre personnage se révèlent non seulement dans ses actions mais aussi dans ce qu’il dit et de la manière qu’il le dit.
Pour Martell, le dialogue s’articule autour de deux choses : la signification des mots proférés et ce qui transcende de la personnalité du personnage sur la manière qu’il utilise pour énoncer son dialogue.

Chaque bribe de dialogue ne devrait pas pouvoir s’échanger entre les personnages. Elle appartient en propre au personnage qui la prononce. Considérez chaque ligne de dialogue comme quelque chose qui dépasse la signification et qui expose comme en sous-texte la personnalité choisie.
De nombreux personnages, comme de nombreuses personnes dans la vie réelle, portent un masque social. Autant celui-ci peut expliquer la signification d’un dialogue (il a dit ceci parce qu’il ne veut pas révéler une vérité profonde sur lui-même) autant le masque social doit se trahir dans la façon dont est prononcé ce qu’il dit.

Par prononcer, il faut comprendre que les circonstances influent énormément sur ce qui est dit.
Si un personnage dit Je t’aime à une femme et que son objectif dans cette scène est de lui soutirer des informations, ce Je t’aime trahit dans les faits une hypocrisie, par exemple.

En jouant sur la signification et la réalité qui se cache derrière ce qui est dit, vous donnez de la vie au personnage. En apprenant à le connaître, à connaître ses peurs, ses rêves, ses besoins et ses secrets, vous ajoutez autant de dimensions salvatrices à l’image d’un personnage auprès du lecteur.