Un grand merci à Potemkine Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le dvd du film « La peau de Bax » de Alex Van Warmerdam.
« Un contrat urgent ? Tu ne peux pas simplement m’appeler pour me souhaiter un bon anniversaire ? »
Le matin de son anniversaire, Schneider, tueur à gages et père de famille dévoué, est missionné pour abattre Ramon Bax. Écrivain solitaire vivant au milieu des marécages, c’est une cible facile. Schneider accepte, il sera rentré pour dîner. Mais la tâche se révèle plus compliquée que prévue.
« Tu ne savais que le mardi était un jour de chance ? »
Pour le grand public, le cinéma néerlandais est avant tout incarné par les films de Paul Verhoeven, qui, bien avant sa longue parenthèse hollywoodienne (il y signera notamment les succès « Robocop » et « Basic instinct »), réalisa quelques-uns des plus beaux films de la production batave. On pense notamment à « Turkish Délices » ainsi qu’à « Katie Tippel ». Son retour sur sa terre natale au cours des années 2000 (avec le succès de « Black book ») a notamment contribué à remettre en lumière un cinéma hollandais qu’on avait quelque peu oublié. Pour autant, il serait réducteur de limiter le cinéma néerlandais à ce seul réalisateur. En effet, dans son ombre imposante gravite une production cinématographique plutôt avant-gardiste, mené par une poignée de réalisateurs parmi lesquels on compte notamment Jean Van De Velde et Alew Van Waremerdam. Artiste polyvalent et touche à tout (il est à la fois peintre, auteur, acteur, réalisateur, homme de théâtre), ce dernier a ainsi réalisé une dizaine de films en trois décennies, en marge de ses activités théâtrales. Trois ans après la sortie de so étrange « Borgman » (sélectionné alors en compétition officielle au Festival de Cannes), il nous revient avec « La peau de Bax », film pour lequel il cumule - une fois n’est pas coutume - les casquettes de scénariste, réalisateur et comédien.
« C’est une mission urgente et facile. Tu seras largement rentré chez toi à midi. A temps pour aider ta femme à préparer ton repas d’anniversaire. »
« La peau de Bax » est un film étrange. Un OVNI cinématographique. Un œuvre totalement inclassable, basée sur un pitch accrocheur et efficace à défaut d’être vraiment novateur : deux tueurs à gages qui ne se connaissent pas sont manipulés par leur employeur commun qui souhaite les engager dans un face-à-face mortel. Pourquoi ? Le scénario du film, plutôt minimaliste, ne nous dira rien des motivations de cet étrange employeur. Ce postulat - au demeurant simple mais machiavélique - servant simplement de point de départ à un film franchement barré qui flirte constamment sans vraiment s’y rattacher avec le film noir, la comédie absurde et le western. D’ailleurs, étonnement, c’est peut-être à ce dernier genre que le film s’apparente le plus. Un western nordique et épuré, qui prendrait pour décor une zone inhabité peuplée de roseaux. Les décors jouent d’ailleurs un rôle important dans l’austérité et l’ambiance froide du film. Cherchant toujours à surprendre les spectateurs là où ils ne l’attendent pas, le réalisateur s’amuse avec ses personnages improbables en jouant de leurs apparences trompeuses (le bon père de famille qui se révèle être un tueur impitoyable dont la seule préoccupation est de finir son contrat à temps pour rentrer à l’heure diner avec sa famille, son homologue qui se fait passer pour un écrivain raté et alcoolique). De même, il prend un malin plaisir à imaginer des situations et des rebondissements tous plus improbables les uns que les autres, visant à entraver le bon déroulement de l’inévitable affrontement entre les deux hommes (irruptions imprévues d’un couple au bord de la crise de nerf, d’un grand-père libidineux ou encore d’une ex maitresse hystérique et vengeresse), créant une ambiance des plus cocasses. Le film se permet ainsi quelques belles embarquées tant comiques qu’absurdes avant de faire place au duel tant attendu qui tient in fine toutes ses promesses. Bien servi par des acteurs au diapason (à noter le grand plaisir de retrouver dans un petit rôle le vétéran Henri Garcin), il en ressort un film étonnant, en forme de joyeux bordel. Une œuvre foutraque, dingue, mais au final assez jouissive à regarder.
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