Les gens les plus désagréables à notre goût dans la vie réelle sont souvent les plus fascinants. Alors que dans la vie réelle, nous ne parvenons que rarement à les comprendre, dans la vie d’auteur, il nous faut comprendre pourquoi nos personnages agissent, pensent et aiment comme ils le font et ceci, surtout si leurs actions et leurs motivations sont à des années lumière des nôtres.
Une chose doit être tenue pour certaine : nous aspirons à ce que nous soyons appréciés. Socialement, on agit en conséquence pour respecter les autres, pour respecter les lois.
Dans une œuvre de fiction, ces comportements sont fort heureusement évités chez des personnages qui feront de l’immoralité (par exemple) un moyen de pourrir la vie des autres personnages. De toutes façons, ces personnages parfois un peu étranges, foncièrement égoïstes ou carrément mauvais sont nécessaires pour ajouter du conflit et ajouter du piquant aux scènes.
Nous avons tous compris que l’antagoniste à chaque qu’il apparaît traîne en son sillage, de la peine, de la souffrance voire même de la mort (et la plupart du temps d’innocentes personnes). Et ce quelque soit le degré de souffrance qu’il occasionne.
La notion d’antagoniste est elle-même à nuancer. En effet, sa fonction est clairement de s’opposer au protagoniste. Cela ne signifie pas pour autant qu’il doit être affublé de préjugés négatifs.
Rien n’interdit dans une fiction que l’antagoniste soit quelqu’un de bien comme il peut être un saligaud avec toute les nuances possibles entre ces extrêmes.
Cependant, tout comme son antagonisme, le protagoniste n’est pas nécessairement quelqu’un de bien. Il peut avoir un comportement étrange, avoir des relents de méchanceté en lui ou être quelqu’un qui s’apitoie sur lui-même ou encore être malhonnête.
Bien sûr, si vous ne souhaitez pas que de telles qualités accompagnent votre protagoniste en permanence tout au long de l’histoire, il est souvent utile au cours de celle-ci de lui faire emprunter temporairement des voies contraires à son éthique.
A propos de qualités, quelles sont celles qui forcent la sympathie ?
– D’abord, le personnage est accessible. Le lecteur peut le comprendre et a envie de le connaître mieux. Un personnage qui a des secrets et qui n’est pas ouvert aux autres n’incite pas à la confiance. Si l’intrigue inclue un secret chez votre personnage principal, ce secret devra être révélé (il fait partie de l’intrigue, après tout. Le lecteur se pose une question sur ce secret et vous devriez lui apporter une réponse).
– Ensuite, ce personnage est un être humain ce qui implique qu’il n’est pas parfait. Il n’est pas nécessairement névrotique, loin de là. Il a simplement des faiblesses que nous pouvons tous comprendre ou identifier. Un sentiment d’infériorité, un tempérament primesautier ou des difficultés à comprendre ses enfants, par exemple.
– C’est aussi un personnage dont les traits dominants sont essentiellement positifs et qui possèdent en lui les germes pour racheter ses mauvaises actions (N’oubliez pas qu’il est avant tout un être humain).
A lire au sujet des traits de caractère de votre personnage :
LES TRAITS DE CARACTERE DU PERSONNAGE
Parmi les traits positifs utilisés seuls ou conjointement, on note des personnages stoïques, généreux, faisant preuve de compassion. L’intelligence est aussi un trait qui retient l’attention d’un lecteur et favorise auprès de celui-ci un préjugé ou une opinion plutôt positifs du personnage.
Ce peut être quelqu’un qui prend des risques ce qui auprès d’un lecteur qui est dans sa vie réelle quelqu’un de très prudent peut orienter chez ce dernier une admiration tout à fait saine.
Le héros peut s’engager sur des problèmes sociaux, être modeste, apprécier la vie jusque dans ses moindres battements…
En observant la vie, vous découvrirez de nombreuses possibilités pour ajouter des qualités qui feront aimer le personnage que vous souhaitez que vos lecteurs aiment (ce qui encore une fois n’exclut pas l’antagoniste).
– Le personnage à priori sympathique est porteur d’espoir. Le lecteur est enclin généralement à s’emparer de causes, de buts qui servent une foi, une croyance, un espoir quelconque en une vie meilleure. L’espoir a l’avantage d’être protéiforme mais son essence réside surtout dans l’énergie qui lui insuffle une telle force (ne mentionne-t-on pas la force de l’espoir ?).
L’amour, la justice, la compréhension de la nature humaine, se battre pour ses rêves ou prendre tous les risques au seul nom de l’amour (et le sens de cet amour est très large. Ce peut être se sacrifier pour l’être aimé comme cela peut être l’amour de la philosophie, par exemple).
– Le personnage qui force la sympathie (et donc une certaine identification avec le lecteur qui va partager soit des traits communs directement ou par personnage interposé soit parce qu’il va reconnaître des situations qui le touchent, c’est ce que l’on nomme l’empathie) est un personnage qui fait preuve de courage et d’endurance, qui résiste à l’adversité et qui serait un modèle à suivre.
C’est celui qui réagit tout de suite lorsqu’une situation dangereuse survient, qui ne sera pas paralysé par la peur ou qui saura surmonter cet effroi naturel pour aller à la rencontre et à l’encontre du danger.
C’est quelqu’un de bien mais ce n’est pas facile tous les jours.
L’idée est donc qu’une qualité que l’on juge positive (et en fin de compte, c’est très subjectif comme démarche) serve d’accroche pour permettre à un lecteur de se pénétrer des problèmes et des complications que décrit l’intrigue.
Même si votre lecteur n’est pas d’accord avec toutes les valeurs qui animent votre héros, les traits de caractère de celui-ci, ses motivations aussi, certaines de ses valeurs peuvent aider à mettre le lecteur dans les pas du personnage.
Quelles sont les qualités qui forcent l’antipathie ?
D’abord, pourquoi l’antipathie ? On pourrait prendre comme définition que bien que l’on puisse comprendre les motivations et l’état d’esprit d’un personnage, les qualités qui le définissent ne permettent pas au lecteur d’instaurer une empathie entre lui et le personnage.
– Le personnage en question est affublé de traits dominants essentiellement négatifs. La vanité ou l’orgueil, l’égoïsme, la cruauté, l’insensibilité ou l’indifférence, la soif du pouvoir, la déviance, l’immoralité (évidemment)…
Enfin, tous ces traits que nous pensons ne pas posséder, que nous ne reconnaissons pas en nous.
Si votre protagoniste est concerné par de tels traits de caractère négatifs et qu’il est appelé au cours de son évolution dans l’histoire à changer, à être sauvé en quelque sorte, vous devriez alors lui donner au moins un trait positif (intelligence, loyauté, une ambition aussi, par exemple) sur lequel cette rédemption possible va pouvoir s’appuyer.
– Le personnage antipathique crée de la souffrance et généralement chez des personnages vulnérables. Vous remarquerez que les auteurs qui jouent avec cette tournure d’esprit lient les actions du personnage à son passé. Son comportement s’explique par ce qu’il a vécu (et habituellement dans son enfance). Le passé d’un personnage même s’il ne fait pas partie de l’intrigue possède des ramifications dans toute l’histoire. Et comme le lecteur a tendance à se reconnaître chez les personnages vulnérables, une antipathie naturelle se crée envers le personnage qui profite de la vulnérabilité des autres.
A lire :
PERSONNAGE & BLESSURE PSYCHOLOGIQUE
– Lorsqu’un personnage est son propre ennemi même s’il n’a pas encore la capacité de le comprendre le rend antipathique. C’est comme dans la vie réelle, il y a des personnes que l’on cherche à éviter parce qu’elles sont arrogantes, impérieuses, campées dans leurs opinions et préjugés, lunatiques, n’ont aucun sens de l’humour ou de l’autodérision, qui inspirent de la défiance ou de la suspicion ou qui ont tendance à voir le mal en tout.
L’immaturité lorsqu’elle est due à une sur-protection qui a protégé le personnage des réalités de la vie et partant, ne l’a pas mis en face de la propre réalité de sa personnalité inspire une antipathie peut-être en partie par comparaison ou envie.
Le pouvoir aussi provoque une aversion chez un protagoniste dont le lecteur ne reconnaît pas la légitimité ou dont il dénonce l’abus (encore une fois même si ce protagoniste n’a pas conscience que ses agissements blessent les autres).
L’idée à retenir est qu’un protagoniste qui n’a pas encore la capacité de comprendre que ses comportements ou certains de ses traits de caractère le rendent antipathique devra se révéler à lui-même au-travers des événements et des rencontres qu’il fera au cours de l’histoire.
– Le personnage crée des sentiments contradictoires chez le lecteur, du moins il le met mal à l’aise. Il peut évoquer des sentiments de vulnérabilité que le lecteur peut reconnaître indirectement chez des personnes qu’il connaît et avec lequel il a des problèmes similaires (souvenez-vous que le lecteur rechigne à reconnaître qu’il éprouve en lui les sentiments exacts qu’il croit déceler chez un personnage, il évite par conséquent de se comparer au personnage).
De même, une action méprisable chez un héros (cela arrive et lui donne de la profondeur) peut créer un véritable sentiment d’inconfort chez le lecteur.
– Le personnage attire le lecteur. En effet, même s’il ne parvient pas à s’identifier avec le protagoniste, le lecteur est immanquablement attiré par lui. Cette fascination est probablement compliquée à expliquer mais on peut tabler en grande partie sur la pulsion scopique qui fait de nous tous en quelque sorte des voyeurs . Nous sommes plus ou moins curieux à propos de la vie des autres et même lorsque cette vie est imaginaire. Par contrecoup, nous nous surprenons à haïr ou à mépriser cet individu de fiction qui nous force à l’observer.
– Et aussi surprenant que cela puisse paraître puisque le passé d’un personnage nous aide à l’apprécier, ce même passé peut nous le rendre détestable. Un principe est certain : le passé d’un personnage renforce toujours sa position actuelle dans l’histoire.